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Loe raamatut: «Mémoires pour servir à l'Histoire de France sous Napoléon, Tome 1», lehekülg 7

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§ X

La commission législative, intermédiaire des cinq-cents, fut successivement présidée par Lucien, Boulay de la Meurthe, Daunou, Jacqueminot; celle des anciens, par Lemercier, Lebrun, Regnier.

Boulay fut depuis ministre d'état, président de la section de législation au conseil d'état.

Daunou était oratorien, député du Pas-de-Calais, homme de bonnes mœurs, bon écrivain: il avait rédigé la constitution de l'an III, il fut le rédacteur de celle de l'an VIII: il a été archiviste impérial.

Jacqueminot était de Nancy, il est mort sénateur.

Lebrun fut troisième consul.

Regnier devint grand-juge et duc de Massa.

Les commissions législatives intermédiaires délibéraient en secret. Il eût été d'un mauvais effet de rendre publiques les discussions d'une assemblée qui ne se trouvait souvent formée que de 15 ou 16 membres. Ces deux commissions, aux termes de la loi du 19 brumaire, ne pouvaient rien sans l'initiative du gouvernement qui l'exerçait, en provoquant l'attention de la commission des cinq-cents sur un objet déterminé; celle-ci rédigeait sa résolution, qui était convertie en loi par la commission des anciens.

La première loi importante de cette session extraordinaire fut relative au serment. On ne pouvait le prêter qu'à la constitution qui n'existait plus; il fut conçu en ces termes: «Je jure fidélité à la république une et indivisible, fondée sur la souveraineté du peuple, le régime représentatif, le maintien de l'égalité, la liberté et la sûreté des personnes et des propriétés.»

Les deux conseils se réunissaient de droit, le 19 février 1800; le seul moyen de les prévenir était de promulguer une nouvelle constitution, et de la présenter à l'acceptation du peuple, avant cette époque. Les trois consuls et les deux commissions législatives intermédiaires se réunirent à cet effet en comité, pendant le mois de décembre, dans l'appartement de Napoléon, depuis neuf heures du soir jusqu'à trois heures du matin. Daunou fut chargé de la rédaction. La confiance de l'assemblée reposait entièrement dans la réputation et les connaissances de Siéyes. On vantait depuis long-temps la constitution qu'il avait dans son porte-feuille. Il en avait laissé percer quelques idées qui avaient germé parmi ses nombreux partisans, et qui de là s'étant répandues dans le public, avaient porté au plus haut point cette réputation que, dès la constituante, Mirabeau s'était plu à lui faire, lorsqu'il disait à la tribune: «Le silence de Siéyes est une calamité nationale.» En effet, il s'était fait connaître par plusieurs écrits profondément pensés: il avait suggéré, à la chambre du tiers-état, l'idée-mère de se déclarer assemblée nationale; il avait proposé le serment du jeu de paume, la suppression des provinces et le partage du territoire de la république en départements: il avait professé une théorie du gouvernement représentatif et de la souveraineté du peuple, pleine d'idées lumineuses et qui étaient passées en principes. Le comité s'attendait à prendre connaissance de son projet de constitution, tant médité; il pensait n'avoir à s'occuper que de le reviser, le modifier, et le perfectionner par des discussions profondes. Mais, à la première séance, Siéyes ne dit rien: il avoua qu'il avait beaucoup de matériaux en porte-feuille, mais qu'ils n'étaient ni classés, ni coordonnés. A la séance suivante, il lut un rapport sur les listes de notabilité. La souveraineté était dans le peuple; c'était le peuple qui devait directement ou indirectement commettre à toutes les fonctions; or, le peuple, qui est merveilleusement propre à distinguer ceux qui méritent sa confiance, ne l'est pas à assigner le genre de fonctions qu'ils doivent occuper. Il établissait trois listes de notabilité: 1o communale, 2o départementale, 3o nationale. La première se composait du dixième de tous les citoyens de chaque commune, choisis parmi les habitants eux-mêmes; la deuxième, du dixième des citoyens portés sur les listes communales du département; la troisième, du dixième des individus inscrits sur les listes départementales: cette liste se réduisait à six mille personnes, qui formaient la notabilité nationale. Cette opération devait se faire tous les cinq ans; et tous les fonctionnaires publics, dans tous les ordres, devaient être pris sur ces listes, savoir: le gouvernement, les ministres, la législature, le sénat ou grand-jury, le conseil-d'état, le tribunal de cassation, et les ambassadeurs, sur la liste nationale; les préfets, les juges, les administrateurs, sur la liste départementale; les administrations communales, les juges-de-paix, sur la liste communale. Par là, tout fonctionnaire public, les ministres même seraient représentants du peuple, auraient un caractère populaire. Ces idées eurent le plus grand succès: répandues dans le public, elles firent concevoir les plus heureuses espérances; elles étaient neuves, et l'on était fatigué de tout ce qui avait été proposé depuis 1789; elles venaient d'ailleurs d'un homme qui avait une grande réputation dans le parti républicain; elles paraissaient être une analyse de ce qui avait existé dans tous les siècles. Ces listes de notabilité étaient des espèces de listes de noblesse non héréditaire, mais de choix. Cependant les gens sensés virent tout d'abord le défaut de ce systême, qui gênerait le gouvernement, en l'empêchant d'employer un grand nombre d'individus propres aux fonctions, parce qu'ils ne seraient pas sur les listes nationale, départementale, communale. Cependant le peuple serait privé de toute influence directe dans la nomination de la législature; il n'y aurait qu'une participation fort illusoire et toute métaphysique.

Encouragé par ce succès, Siéyes fit connaître dans les séances suivantes la théorie de son jury constitutionnel, qu'il consentit à nommer sénat conservateur. Il avait cette idée dès la constitution de l'an III, mais elle avait été repoussée par la convention. «La constitution, disait-il, n'est pas vivante, il faut un corps de juges en permanence, qui prennent ses intérêts, et l'interprètent dans tous les cas douteux. Quelle que soit l'organisation sociale, elle sera composée de divers corps: l'un aura le soin de gouverner; l'autre de discuter et de sanctionner les lois. Ces corps, dont les attributions seront fixées par la constitution, se choqueront souvent, l'interpréteront différemment, le jury national sera là, pour les raccorder et faire rentrer chaque corps dans son orbite.» Le nombre des membres fut fixé à quatre-vingts, au moins âgés de quarante ans. Ces quatre-vingts sages, dont la carrière politique était terminée, ne pourraient plus occuper aucune fonction publique. Cette idée plut généralement, et fut commentée de diverses manières: les sénateurs étaient à vie, c'était une nouveauté depuis la révolution, et l'opinion souriait à toute idée de stabilité; elle était fatiguée des incertitudes et de la variété qui s'étaient succédé depuis dix ans.

Peu après il fit connaître sa théorie de la représentation nationale; il la composait de deux branches: un corps-législatif de deux-cents cinquante députés, ne discutant pas, mais qui semblable à la grand'chambre du parlement, voterait et délibérerait au scrutin; un tribunal de cent députés, qui, semblable aux enquêtes, discuterait, rapporterait, plaiderait contre les résolutions rédigées par un conseil d'état, nommé par le gouvernement, qui se trouverait investi de la prérogative de rédiger les lois. Au lieu d'un corps-législatif, turbulent, agité par des factions et par ses motions d'ordre si intempestives, on aurait un corps grave, qui délibérerait après avoir écouté une longue discussion dans le silence des passions. Cependant le tribunat aurait la double fonction de dénoncer au sénat les actes du gouvernement inconstitutionnels, même les lois adoptées par le corps-législatif; et, à cet effet, le gouvernement ne pourrait les proclamer que dix jours après leur adoption par le corps-législatif. Ces idées furent accueillies favorablement du comité et du public. On était si ennuyé des bavardages des tribunes, de ces intempestives motions d'ordre qui avaient fait tant de mal et si peu de bien, et d'où étaient nées tant de sottises et si peu de bonnes choses, qu'on se flatta de plus de stabilité dans la législation, et de plus de tranquillité et de repos; c'était ce que l'on desirait.

Plusieurs séances furent employées à la rédaction, et à des objets de détails relatifs à la comptabilité et aux lois. Le moment vint enfin où Siéyes fit connaître l'organisation de son gouvernement; c'était le chapiteau, la portion la plus importante de cette belle architecture, et dont l'influence devait être le plus sentie par le peuple. Il proposa un grand-électeur à vie, choisi par le sénat conservateur, ayant un revenu de six millions, une garde de trois mille hommes, et habitant le palais de Versailles: les ambassadeurs étrangers seraient accrédités près de lui; il accréditerait les ambassadeurs et ministres français dans les cours étrangères. Les actes du gouvernement, les lois, la justice, seraient rendus en son nom. Il serait le seul représentant de la gloire, de la puissance, de la dignité nationales; il nommerait deux consuls, un de la paix, un de la guerre; mais là se bornerait toute son influence sur les affaires: il pourrait, il est vrai, destituer les consuls et les changer; mais aussi le sénat pourrait, lorsqu'il jugerait cet acte arbitraire et contraire à l'intérêt national, absorber le grand-électeur. L'effet de cette absorption équivaudrait à une destitution; la place devenait vacante, le grand-électeur prenait place dans le sénat pour le reste de sa vie.

§ XI

Napoléon avait peu parlé dans les séances précédentes, il n'avait aucune expérience des assemblées: il ne pouvait que s'en rapporter à Siéyes, qui avait assisté aux constitutions de 1791, 93, 95; à Daunou, qui passait pour un des principaux auteurs de cette dernière; enfin, aux trente ou quarante membres des commissions, qui tous s'étaient distingués dans la législature, et qui prenaient d'autant plus d'intérêt à l'organisation des corps, qui devaient faire la loi, qu'ils étaient appelés à faire partie de ces corps. Mais le gouvernement le regardait; il s'éleva donc contre des idées si extraordinaires. Le grand-électeur disait-il, s'il s'en tient strictement aux fonctions que vous lui assignez, sera l'ombre, mais l'ombre décharnée d'un roi fainéant. Connaissez-vous un homme d'un caractère assez vil pour se complaire dans une pareille singerie; s'il abuse de sa prérogative, vous lui donnez un pouvoir absolu. Si, par exemple, j'étais grand-électeur, je dirais, en nommant le consul de la guerre et celui de la paix, Si vous faites un ministre, si vous signez un acte sans que je l'approuve, je vous destitue. Mais, dites-vous, le sénat à son tour absorbera le grand-électeur: le remède est pire que le mal, personne, dans ce projet, n'a de garantie. D'un autre côté, quelle sera la situation de ces deux premiers ministres? l'un aura sous ses ordres les ministres de la justice, de l'intérieur, de la police, des finances, du trésor; l'autre, ceux de la marine, de la guerre, des relations extérieures. Le premier ne sera environné que de juges, d'administrateurs, de financiers, d'hommes en robes longues; le deuxième, que d'épaulettes et d'hommes d'épée: l'un voudra de l'argent et des recrues pour ses armées; l'autre n'en voudra pas donner. Un pareil gouvernement est une création monstrueuse, composée d'idées hétérogènes, qui n'offrent rien de raisonnable. C'est une grande erreur de croire que l'ombre d'une chose puisse tenir lieu de la réalité.

Siéyes répondit mal, fut réduit au silence, montra de l'indécision, de l'embarras; cachait-il quelque vue profonde? était-il dupe de sa propre analyse? c'est ce qui sera toujours incertain; quoiqu'il en soit, cette idée fut trouvée insensée. S'il eût commencé le développement de tout son projet de constitution, par le titre de gouvernement, rien n'eût passé, il eût été discrédité tout d'abord; mais déja tout était adopté en partie, sur la foi qu'on avait en lui.

L'adoption des formes purement républicaines fut proposée: la création d'un président, à l'instar des États-Unis, le fut aussi; celui-ci aurait le gouvernement de la république pour dix ans, et aurait le choix de ses ministres, de son conseil-d'état et de tous les agents de l'administration. Mais les circonstances étaient telles, que l'on pensa qu'il fallait encore déguiser la magistrature unique du président. On concilia les opinions diverses, en composant un gouvernement de trois consuls, dont l'un serait le chef du gouvernement, aurait toute l'autorité, puisque seul il nommait à toutes les places, et seul avait voix délibérative; et les deux autres, ses conseillers nécessaires. Avec un premier consul, on avait l'avantage de l'unité dans la direction; avec les deux autres consuls, qui devaient nécessairement être consultés, et qui avaient le droit d'inscrire leurs opinions au procès-verbal, on conserverait l'unité, et l'on ménagerait l'esprit républicain. Il parut que les circonstances et l'esprit public du temps ne pouvaient alors rien suggérer de meilleur. Le but de la révolution qui venait de s'opérer n'était pas d'arriver à une forme de gouvernement plus ou moins aristocratique, plus ou moins démocratique; mais le succès dépendait de la consolidation de tous les intérêts, du triomphe de tous les principes pour lesquels le vœu national s'était prononcé unanimement, en 1789. Napoléon était convaincu que la France ne pouvait être que monarchique; mais le peuple français tenant plus à l'égalité qu'à la liberté, et le principe de la révolution étant fondé sur l'égalité de toutes les classes, il y avait absence absolue d'aristocratie. Si une république était difficile à constituer fortement, sans aristocratie, la difficulté était bien plus grande pour une monarchie. Faire une constitution dans un pays qui n'aurait aucune espèce d'aristocratie, ce serait tenter de naviguer dans un seul élément. La révolution française a entrepris un problême aussi insoluble que celui de la direction des ballons.

Siéyes eût pu, s'il l'eût voulu, obtenir la place de deuxième consul; mais il desira se retirer: il fut nommé sénateur, contribua à organiser ce corps, et en fut le premier président. En reconnaissance des services qu'il avait rendus en tant de circonstances importantes, les commissions législatives, par une loi, lui firent don de la terre de Crosne, à titre de récompense nationale. Il dit depuis à l'empereur: «Je n'avais pas supposé que vous me traiteriez avec tant de distinction, et que vous laisseriez tant d'influence aux consuls, qui paraissaient devoir vous importuner et vous embarrasser.» Siéyes était l'homme du monde le moins propre au gouvernement; mais essentiel à consulter, car quelquefois il avait des aperçus lumineux et d'une grande importance. Il aimait l'argent; mais il était d'une probité sévère, ce qui plaisait fort à Napoléon: c'était la qualité première qu'il estimait dans un homme public.

Pendant tout le mois de décembre, la santé de Napoléon fut fort altérée. Ces longues veilles, ces discussions où il fallait entendre tant de sottises, lui faisaient perdre un temps précieux, et cependant ces discussions lui inspiraient un certain intérêt. Il remarqua que des hommes, qui écrivaient très-bien, et qui avaient de l'éloquence, étaient cependant privés de toute solidité dans le jugement, n'avaient pas de logique, et discutaient pitoyablement: c'est qu'il est des personnes qui ont reçu de la nature le don d'écrire et de bien exprimer leurs pensées, comme d'autres ont le génie de la musique, de la peinture, de la sculpture, etc. Pour les affaires publiques, administratives et militaires, il faut une forte pensée, une analyse profonde, et la faculté de pouvoir fixer long-temps les objets, sans être fatigué.

§ XII

Napoléon choisit pour deuxième consul Cambacérès, et pour troisième Lebrun. Cambacérès, d'une famille honorable de Languedoc, était âgé de cinquante ans; il avait été membre de la convention, et s'était conservé dans une mesure de modération: il était généralement estimé. Sa carrière politique n'avait été déshonorée par aucun excès. Il jouissait, à juste titre, de la réputation d'un des premiers jurisconsultes de la république. Lebrun, âgé de soixante ans, était de Normandie. Il avait rédigé toutes les ordonnances du chancelier Maupeou, il s'était fait remarquer par la pureté et l'élégance de son style. C'était un des meilleurs écrivains de France. Député au conseil des anciens, par le département de la Manche, il était d'une probité sévère, n'approuvant les changements de la révolution que sous le point de vue des avantages qui en résultaient pour la masse du peuple; car il était né d'une famille de paysans.

La constitution de l'an VIII, si vivement attendue de tous les citoyens, fut publiée et soumise à la sanction du peuple, le 13 décembre 1799, et proclamée le 24 du même mois; la durée du gouvernement provisoire fut ainsi de quarante-trois jours.

Les idées de Napoléon étaient fixées; mais il lui fallait, pour les réaliser, le secours du temps et des évènements. L'organisation du consulat n'avait rien de contradictoire avec elles; il accoutumait à l'unité, et c'était un premier pas. Ce pas fait, Napoléon demeurait assez indifférent aux formes et dénominations des différents corps constitués. Il était étranger à la révolution. La volonté des hommes qui en avaient suivi toutes les phases, dut prévaloir dans des questions aussi difficiles qu'abstraites. La sagesse était de marcher à la journée sans s'écarter d'un point fixe, étoile polaire sur laquelle Napoléon va prendre sa direction pour conduire la révolution au port où il veut la faire aborder.

MÉMOIRES DE NAPOLÉON

ULM. – MOREAU

Défauts des plans de campagne, suivis en 1795, 1796, 1797. – Position des armées françaises en 1800. – 3. Position des armées autrichiennes. – Plan du premier consul. Dispositions qu'il prend. – Ouverture de la campagne. – Bataille d'Engen. – Bataille de Mœskirch. – Bataille de Biberach. – Manœuvres et combats autour d'Ulm. – Kray quitte Ulm. Prise de Munich. Combat de Neubourg. – 11. Armistice de Parsdorf, le 15 juillet 1800. – Remarques critiques.

§ Ier

La république française avait eu sur le Rhin trois armées pendant les campagnes de 1795, 1796 et 1797. L'une, désignée sous le nom d'armée du Nord, avait son quartier-général à Amsterdam, et était composée des troupes bataves, environ vingt mille hommes, et d'un pareil nombre de troupes françaises. Par les traités existants entre les deux républiques, celle de Hollande devait entretenir un corps de vingt-cinq mille Français pour protéger ce pays. Cette armée de quarante à quarante-cinq mille hommes, était chargée de la garde des côtes de la Hollande depuis l'Escaut jusqu'à l'Ems, et du côté de terre des frontières jusque vis-à-vis Wésel. La deuxième armée, sous le nom de Sambre-et-Meuse, avait son quartier-général à Dusseldorf, bloquait Mayence et Erenbreisten. La troisième, sous le nom d'armée du Rhin, avait son quartier-général à Strasbourg; elle s'appuyait à la Suisse, et formait le blocus de Philisbourg.

L'armée du Nord n'était en réalité qu'une armée d'observation, qui n'avait plus pour but, que de contenir les partisans de la maison d'Orange, et de s'opposer aux tentatives que l'Angleterre pourrait faire pour débarquer des troupes en Hollande. La paix conclue à Bâle avec la Prusse, les maisons de Saxe et de Hesse, avait rétabli la tranquillité dans tout le nord de l'Allemagne.

L'armée de Sambre-et-Meuse, nécessaire tant que la Prusse faisait partie de la coalition, était devenue inutile du moment que la république française n'avait plus à soutenir la guerre que contre l'Autriche et l'Allemagne méridionale. Dans la campagne de 1796, cette armée, commandée par Jourdan, marcha sur le Mein, s'empara de Wurtzbourg et prit position sur le Rednitz; sa gauche appuyée au débouché de la Bohême par Egra, tandis que sa droite débouchait sur la vallée du Danube. L'armée du Rhin, commandée par Moreau, partit de Strasbourg, traversa les montagnes noires et le Vurtemberg, passa le Lech et entra en Bavière. Pendant que ces deux armées manœuvraient sous le commandement de deux généraux indépendants l'un de l'autre, l'armée autrichienne, opposée à ces deux armées du Rhin et de Sambre-et-Meuse, était réunie sous le commandement unique de l'archiduc Charles. Elle se centralisa sur le Danube à Ingolstadt et Ratisbonne et se trouva placée entre les armées françaises, dont elle parvint à empêcher la jonction. L'archiduc battit Bernadotte qui commandait la droite de l'armée de Sambre-et-Meuse, l'accula sur Vurtzbourg et enfin le rejeta au delà du Rhin. L'armée du Rhin resta spectatrice de cette marche de l'Archiduc sur l'armée de Sambre-et-Meuse; et ce fut trop tard que Moreau ordonna à la division Desaix de passer sur la rive gauche du Danube pour secourir Jourdan; ce défaut de résolution du général de l'armée du Rhin, obligea bientôt cette même armée à se mettre en retraite. Elle repassa le Rhin, et reprit la première position sur la rive gauche. Ainsi l'armée autrichienne, en nombre très-inférieur aux armées françaises réunies, fit échouer, sans aucune bataille générale, le plan de campagne des Français, et reconquit toute l'Allemagne.

Le plan des Français était vicieux pour la défensive comme pour l'offensive. Du moment que l'on n'avait pour ennemie que l'Autriche, il ne fallait avoir qu'une seule armée, n'agissant que sur une seule ligne et conduite par une seule tête.

En 1799, la France était maîtresse de la Suisse. On forma deux armées: l'une appelée armée du Rhin; l'autre, armée d'Helvétie. La première qui prit ensuite le nom d'armée du Danube, sous le commandement de Jourdan, passa le Rhin, traversa les montagnes noires, arriva à Stockach, où ayant été battue par l'archiduc, elle fut obligée de repasser le Rhin, dans le temps même que l'armée d'Helvétie restait dans ses positions, maîtresse de toute la Suisse. On commit donc encore la même faute, d'avoir deux armées indépendantes au lieu d'une seule; et lorsque Jourdan fut battu à Stockach, c'est sur la Suisse qu'il aurait dû se replier, et non sur Strasbourg et Brisack. Depuis, l'armée du Rhin fut chargée de la défense de la rive gauche du fleuve, vis-à-vis Strasbourg; et l'armée d'Helvétie, qui devenait l'armée principale de la république, perdit une partie de la Suisse, et garda long-temps la Limath; mais à Zurich, conduite par Masséna, et profitant de la faute que firent les alliés en se divisant aussi en deux armées, elle battit les Russes, et reprit toute la Suisse.