Loe raamatut: «L’Assassin Zéro»
L ‘ A S S A S S I N Z É R O
(UN THRILLER D’ESPIONNAGE DE L’AGENT ZÉRO—VOLUME 7)
J A C K M A R S
Jack Mars
Jack Mars est actuellement l’auteur best-seller aux USA de la série de thrillers LUKE STONE, qui contient sept volumes. Il a également écrit la nouvelle série préquel L’ENTRAÎNEMENT DE LUKE STONE, ainsi que la série de thrillers d’espionnage L’AGENT ZÉRO.
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Image de couverture : Copyright GlebSStock, utilisée sous licence à partir de Shutterstock.com.
LIVRES DE JACK MARS
SÉRIE DE THRILLERS LUKE STONE
TOUS LES MOYENS NÉCESSAIRES (Volume #1)
PRESTATION DE SERMENT (Volume #2)
SALLE DE CRISE (Volume #3)
LUTTER CONTRE TOUT ENNEMI (Volume #4)
PRÉSIDENT ÉLU (Volume #5)
L’ENTRAÎNEMENT DE LUKE STONE
CIBLE PRINCIPALE (Tome #1)
DIRECTIVE PRINCIPALE (Tome #2)
MENACE PRINCIPALE (Tome #3)
UN THRILLER D’ESPIONNAGE DE L’AGENT ZÉRO
L’AGENT ZÉRO (Volume #1)
LA CIBLE ZÉRO (Volume #2)
LA TRAQUE ZÉRO (Volume #3)
LE PIÈGE ZÉRO (Volume #4)
LE FICHIER ZÉRO (Volume #5)
LE SOUVENIR ZÉRO (Volume #6)
L’ASSASSIN ZÉRO (Volume #7)
UNE NOUVELLE DE L’AGENT ZÉRO
PROLOGUE
Je n’arrive pas à localiser Sara.
Voilà ce que Todd Strickland lui avait dit au téléphone. Zéro était à peine rentré de Belgique depuis un jour, après avoir révélé que le président russe tirait les ficelles dans une tentative d’annexer l’Ukraine avec l’aide des USA, quand il avait appris la nouvelle. Strickland avait gardé un œil sur Sara depuis qu’elle avait été émancipée et qu’elle avait déménagé en Floride. Mais, à présent, elle semblait s’être évanouie dans la nature. Sa ligne téléphonique avait été coupée et sa localisation désactivée. Même ses colocataires ne l’avaient pas vue depuis deux jours.
Envoie-moi l’adresse de chez elle par texto, lui avait demandé Zéro. Je vais prendre un avion.
À peine trois heures plus tard, il se retrouva devant une maison délabrée de Jacksonville en Floride, à l’endroit que Sara appelait chez elle depuis un peu plus d’un an. Il monta les marches en béton fissurées et frappa à la porte d’entrée du plat de la main, encore et encore, sans relâche jusqu’à ce que quelqu’un finisse par répondre.
“Hé mec,” grommela un ado blond dégingandé avec des tatouages le long des bras. “Qu’est-ce que vous foutez ici ?”
“Sara Lawson,” demanda Zéro. “Tu sais où elle pourrait être ?”
Le gamin fronça les sourcils d’un air étonné, mais un sourire narquois recourba ses lèvres. “Pourquoi ? D’autres fédéraux la cherchent ?”
Des fédéraux ? Un frisson parcourut le dos de Zéro. Si quelqu’un prétendant être du FBI s’est pointé ici, ça pourrait vouloir dire qu’elle a été kidnappée.
“Je suis son père.” Il avança d’un pas en donnant un coup d’épaule au gamin, et le poussa pour entrer dans la maison.
“Hé, vous ne pouvez pas débarquer ici comme ça !” essaya-t-il de protester. “Je vais appeler les flics, mec…”
Zéro se retourna vers lui. “C’est Tommy, c’est ça ?”
Les yeux du blond s’écarquillèrent d’appréhension, mais il ne répondit pas.
“J’ai entendu parler de toi,” lui dit Zéro sans hausser le ton. Strickland lui avait fait un briefing complet pendant qu’il était en route. “Je sais qui tu es. Tu ne vas pas appeler les flics. Tu ne vas pas appeler ton papa avocat. Tu vas aller t’asseoir ici, sur le canapé, et fermer ta putain de gueule. Tu m’entends ?”
Le gamin ouvrit la bouche comme s’il voulait dire quelque chose…
“J’ai dit la ferme,” lâcha Zéro.
Le gamin dégingandé battit en retraite sur le canapé, comme un chien file dans son panier, et s’assit à côté d’une jeune fille qui ne devait même pas avoir dix-huit ans, si toutefois elle atteignait cet âge un jour.
“Tu es Camilla ?”
La fille secoua frénétiquement la tête. “Je m’appelle Jo.”
“Je suis Camilla.” Une jeune latina descendait les marches. Elle avait les cheveux bruns et était beaucoup trop maquillée. “Je partage la chambre de Sara.” Elle détailla Zéro de haut en bas. “Vous êtes vraiment son père ?” demanda-t-elle d’un air dubitatif.
“Ouais.”
“Alors… qu’est-ce que vous faites ?”
“Quoi ?”
“Comme boulot. Sara nous a dit ce que vous faisiez.”
“Je n’ai pas de temps à perdre,” murmura-t-il en levant les yeux au plafond. “Je suis comptable,” dit-il à la fille.
Camilla secoua la tête. “Mauvaise réponse.”
Zéro haussa les épaules. Sara a dû dire à ses amis la vérité sur moi. “Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? Que je suis un espion de la CIA ?”
Camilla cligna des yeux. “Eh ben… ouais.”
“Pour de vrai ?” demanda le blond sur le canapé.
Zéro leva les mains de frustration. “S’il te plaît, dis-moi juste où est-ce que tu as vu Sara pour la dernière fois.”
Camilla regarda ses colocataires, puis baissa les yeux. “Très bien,” dit-elle à voix basse. “Il y a quelques jours, elle cherchait à acheter, et je lui ai donné…”
“Acheter ?” demanda Zéro.
“De la drogue, mec. Faut suivre un peu,” dit le blond.
“Elle avait besoin d’un remontant,” poursuivit Camilla. “Je lui ai donné l’adresse de mon vendeur. Elle s’est pointée là-bas, puis elle est revenue. Le lendemain matin, elle est repartie. Je pensais qu’elle allait au boulot, mais elle n’est jamais revenue. Sa ligne est coupée. Je vous jure que c’est tout ce que je sais.”
Zéro faillit péter les plombs devant ces gosses irresponsables, à peine adultes, qui envoyaient une adolescente seule chez un dealer. Mais il ravala sa colère. Il fallait qu’il la retrouve.
Elle a besoin de toi.
“Ce n’est pas tout,” dit-il à Camilla. “Je veux le nom et l’adresse de ce type.”
*
Vingt minutes plus tard, Zéro se tenait devant une barraque de Jacksonville à la façade crasseuse, avec un lave-linge cassé sur le porche. D’après Camilla, c’était là que créchait le dealer, un type nommé Ike.
Zéro n’avait pas d’arme sur lui. Il s’était tellement précipité pour se rendre à l’aéroport qu’il avait passé la porte avec seulement ses clés de voiture et son téléphone. Mais maintenant, il regrettait de ne pas en avoir pris une.
Comment je vais la jouer ? Enfoncer la porte, lui botter le cul et demander des réponses ? Ou frapper à la porte et discuter gentiment ?
Il décida que la deuxième option était la meilleure pour commencer. Ensuite, il aviserait.
Au troisième coup bref, une voix masculine s’éleva de l’intérieur de la maison. “Une minute, putain ! J’arrive !” Le type qui apparût à la porte était plus grand que Zéro, plus musclé que Zéro, et bien plus tatoué que Zéro (qui n’avait aucun tatouage). Il portait un débardeur blanc avec ce qui semblait être une tache de café dessus, et son jean était trop grand pour lui. Il retombait bas sur ses hanches.
“C’est toi Ike ?”
Le dealer le regarda de haut en bas. “Vous êtes flic ?”
“Non. Je cherche ma fille, Sara. Seize ans, blonde, à peu près cette taille…”
“Je n’ai jamais vu votre fille, mec.” Ike secoua la tête. Il avait le front plissé.
Mais Zéro vit l’infime et presque imperceptible plissement de l’œil, ainsi que le minuscule tremblement de ses lèvres, alors qu’Ike tentait de rester impassible. La colère. Il avait décelé un bref flash de colère en prononçant le nom de Sara.
“Ok, désolé de t’avoir dérangé,” dit Zéro.
“Pas de souci,” répondit froidement le type. Il commença à refermer la porte.
Dès qu’Ike se fut partiellement retourné, Zéro leva le pied et décocha un coup puissant juste en dessous de la poignée de porte. Elle s’ouvrit violemment, s’abattit sur le dealer et le jeta à plat ventre sur le tapis marron.
Zéro fut sur lui en un instant, l’avant-bras contre sa trachée. “Tu la connais,” gronda-t-il. “Je l’ai vu dans tes yeux. Dis-moi où elle est allée, sinon je…”
Il entendit un grognement, puis vit une masse noire et feu, alors qu’un Rottweiler massif bondissait sur lui. Il eut à peine le temps de réagir et n’eut pas d’autre choix que de suivre la force du chien et de rouler avec. Ce dernier retroussa les babines et trouva prise dans son bras, enfonçant ses crocs dans la chair.
Zéro serra les dents et roula une fois de plus pour que le chien se retrouve sous lui, puis il appuya de manière à forcer son avant-bras mordu à entrer dans la bouche du chien qui essayait de resserrer davantage sa prise.
Le dealer se releva et quitta la pièce, alors que la main libre de Zéro fouillait derrière lui à la recherche de quoi que ce soit qui pourrait être utile. Le chien se tortillait et se débattait sous lui, essayant de se libérer, mais Zéro maintenait ses pattes ensemble pour qu’il ne puisse pas se relever. Sa main trouva un plaid miteux posé sur le canapé en cuir, et il le tira vers lui.
Avec sa main libre, il balança un seul coup sur le museau du chien, pas assez fort pour le blesser vraiment, juste assez pour que ses crocs se desserrent et qu’il libère son bras. Durant la demi-seconde avant que les crocs se referment à nouveau, il enroula le plaid autour de la tête du chien et relâcha ses jambes afin qu’il puisse se retourner et se relever.
Puis, il passa le bout du plaid sous son corps et attacha les extrémités derrière sa tête, enveloppant fermement la moitié avant du Rottweiler dans le plaid. Le chien ruait et se débattait, essayant de se libérer… ce qu’il allait finir par réussir à faire. Aussi, Zéro se remit debout et se précipita vers le dealer.
Il déboula dans une minuscule cuisine, juste à temps pour voir Ike sortir un vieux pistolet tout sale d’un tiroir. Il allait se retourner avec, quand Zéro bondit en avant et le stoppa d’une main, puis lui fit lâcher prise en serrant et tournant sa main, ce qui disloqua certainement, et cassa même peut-être, l’un des doigts du type.
Ike poussa un cri et se recroquevilla en tenant sa main, tandis que Zéro pointait l’arme sur son front.
“Ne me tue pas, mec,” gémit-il. “Ne me tue pas. S’il te plaît, ne me tue pas.”
“Dis-moi ce que je veux savoir. Où est Sara ? Quand l’as-tu vue pour la dernière fois ?”
“Ok, ok ! Écoute, elle est venue me voir, mais elle ne pouvait pas payer. Alors, on a trouvé un arrangement où elle devait livrer ma marchandise dans toute la ville…”
“Ta drogue,” corrigea Zéro. “Elle devait livrer ta drogue dans toute la ville. Dis-le.”
“Ouais, ma drogue. Ça faisait juste quelques jours et elle s’en sortait bien, alors je lui ai filé un gros paquet de pilules…”
“De quoi ?”
“Des pilules sur ordonnance. Des analgésiques. Ensuite, elle a disparu, mec. Elle ne s’est jamais repointée, n’a jamais rien livré. Mes clients étaient furax. Elle m’a fait perdre plus de mille dollars. Et elle a même pris l’une de mes caisses, vu qu’elle n’a pas de voiture…”
Zéro prit un air moqueur. “Tu lui as filé pour mille dollars de drogue, et elle s’est barrée avec ?”
“Ouais, mec.” Il leva les yeux vers Zéro avec les mains en l’air près de son visage dans une position défensive. “Si tu réfléchis bien, c’est moi la vraie victime dans l’histoire…”
“Ta gueule.” Il appuya doucement le canon contre le front d’Ike. “Où est-ce qu’elle était censée aller, et qu’est-ce qu’elle a pris comme voiture ?”
*
Zéro prit l’Escalade noir qu’il avait “emprunté” à Ike, ainsi que son flingue, et il utilisa le GPS de son téléphone pour rouler aussi vite que possible jusqu’au lieu de livraison, regardant pendant tout le trajet s’il ne voyait pas une berline Chevy bleue, quatre portes, de 2001.
Il n’en vit aucune jusqu’au lieu de livraison qui, constata-t-il avec tristesse, était un centre de loisirs local. Mais il n’avait pas le temps de s’en soucier pour le moment. Aussi, il se demanda, Que ferait Sara ? Où irait-elle ?
Il connaissait déjà la réponse avant même d’avoir fini de se poser la question. Elle flottait vers lui dans l’odeur iodée de l’air aussi facilement que le fait d’évoquer un souvenir.
Ils savaient tous dans la famille que Kate, la défunte mère de Maya et Sara, avait un endroit préféré au monde. Elle y avait emmené les filles à trois occasions. La première fois, elles n’avaient que huit et six ans, quand Kate leur avait dit : “C’est mon endroit préféré.”
C’était une plage du New Jersey, une appellation qui faisait généralement tiquer Zéro. La plage était trop rocailleuse et l’eau était souvent trop froide, sauf pendant les deux mois d’été, mais ce n’était pas ce que Kate aimait là-bas. Elle aimait simplement la vue. Elle y allait tous les ans quand elle était petite, jusqu’à son adolescence, et vouait un amour profond et presque incompréhensible à cet endroit.
La plage. Il savait que Sara irait à la plage.
Il se servit de son téléphone pour localiser les plus proches et s’y rendit en roulant comme un fou, coupant la priorité aux gens et grillant les feux. Il fut d’ailleurs surpris qu’aucun flic ne sorte de nulle part pour l’arrêter. Les parkings des plages n’étaient pas grands, longs et étroits, occupés par les voitures de familles heureuses. Mais il ne vit aucun véhicule correspondant à celui qu’Ike avait décrit.
Il fouilla trois des plages les plus grandes et les plus proches de chez Sara et de son boulot, mais il ne trouva rien. Le soleil déclinait rapidement. Dans un coin de sa tête, il savait que les USA avaient un nouveau président, puisque l’ancien Président de la Chambre des Représentants avait prêté serment dans l’après-midi. Maria avait été invitée à la cérémonie, et devait sans doute se trouver au cocktail à l’heure qu’il était, avec plein de politiciens guindés et de personnalités influentes, à boire du champagne et à discuter tranquillement d’un avenir radieux, tandis que Zéro passait au crible la côte de Jacksonville à la recherche de sa fille disparue qui, la dernière fois qu’il l’avait vue, avait appelé la police pour le faire déguerpir et lui avait hurlé qu’elle ne voulait plus jamais le revoir.
“Allez, Sara,” se murmura-t-il en allumant les phares. “Donne-moi quelque chose. Aide-moi à te trouver. Il doit y avoir un…”
Il s’arrêta en réalisant son erreur. Il avait cherché les plages publiques, les plages populaires. Mais la plage de Kate était petite et peu fréquentée. Et Sara avait pour un millier de dollars de pilules avec elle. Elle ne voudrait pas se retrouver dans un endroit bondé.
Il s’arrêta sur le bas-côté et ouvrit le navigateur de son téléphone. Il se dépêcha de chercher les plages les moins populaires, les plages rocheuses, les endroits où les gens n’allaient pas souvent. La recherche n’était pas simple, et il avait l’impression de ne pas obtenir de résultats, jusqu’à ce qu’il clique sur les images. Et c’est alors qu’il la vit…
Il y avait une plage qui ressemblait vraiment à celle de Kate, comme si elle avait été créée à partir de ses propres souvenirs.
Zéro roula dans sa direction à près de cent-trente kilomètres heure, se fichant pas mal de la police ou des règles de circulation, et même des autres conducteurs, zigzaguant entre les voitures qui avançaient bien trop lentement, des gens qui rentraient tranquillement passer la soirée chez eux sans savoir que sa fille était peut-être morte, quelque part, près du rivage.
Il s’engagea sur le minuscule parking en gravier et enfonça la pédale de freins quand il la vit : une berline bleue, la seule voiture sur le parking, stationnée tout au bout. La nuit était tombée, donc il laissa les phares allumés et gara l’Escalade au milieu du parking. Il sauta hors du véhicule et courut jusqu’à la berline.
Il ouvrit la porte arrière.
Et elle était là, ressemblant à un ange mais avec une mine affreuse : son bébé, sa plus jeune fille, à la fois belle et pâle, allongée prostrée sur la banquette arrière avec les yeux dans le vague à moitié ouverts, des pilules éparpillées au sol autour d’elle.
Zéro chercha immédiatement son pouls. Il en sentit un, bien que lent. Puis, il pencha sa tête en arrière et s’assura que ses voies respiratoires n’étaient pas obstruées. Il savait que la plupart des morts par overdose résultaient de voies respiratoires bloquées qui empêchaient de respirer pour finir par causer un arrêt cardiaque.
Mais elle respirait, même si son souffle était faible.
“Sara ?” lui cria-t-il au visage. “Sara ?”
Elle ne répondit pas. Il la sortit de la voiture et la souleva. Elle était incapable de se tenir debout toute seule.
“Je suis vraiment désolé,” lui dit-il. Puis, il enfonça deux doigts dans sa gorge.
Elle eut un hoquet involontaire, puis deux, et vomit sur le parking. Elle toussait et crachait pendant qu’il la tenait et lui disait, “Ça va aller, ça va aller.”
Il la mit dans l’Escalade, laissant les portes de la berline ouverte avec des pilules partout sous les sièges, et roula sur près de trois kilomètres avant de trouver une épicerie dans une station-service. Il acheta deux litres d’eau avec un billet de vingt et n’attendit même pas qu’on lui rende la monnaie.
Là, sur le parking d’une station-service de Floride, il resta assis avec elle sur la banquette arrière, sa tête posée sur ses genoux, à lui caresser les cheveux en lui donnant de petites quantités d’eau, restant à l’affût du moindre signe signifiant qu’il faudrait l’amener aux urgences. Ses pupilles étaient dilatées, mais ses voies respiratoires étaient ouvertes et son pouls revenait lentement à la normale. Ses doigts tremblaient légèrement, mais quand il glissa sa main dans la sienne, ils se refermèrent sur les siens. Zéro retint ses larmes en se souvenant d’elle quand elle n’était encore qu’un bébé, qu’il la tenait sur ses genoux et que ses minuscules doigts se refermaient sur les siens.
Il ne savait plus depuis combien de temps il était assis ici, avec elle. Quand il leva de nouveau les yeux vers l’horloge, il vit que plus de deux heures s’étaient écoulées.
C’est alors qu’elle cligna des yeux, gémit doucement, et dit : “Papa ?”
“Ouais,” chuchota-t-il. “C’est moi.”
“Est-ce que c’est réel ?” demanda-t-elle d’une voix qui flotta vers lui comme dans un rêve.
“C’est réel,” lui dit-il. “Je suis là et je vais te ramener à la maison. Je vais t’emmener loin d’ici. Je vais prendre soin de toi… même si tu dois me haïr pour ça.”
“Ok,” acquiesça-t-elle doucement.
Il se détendit enfin en réalisant qu’elle était hors de danger maintenant. Sara s’endormit et Zéro se glissa sur le siège avant du SUV. Il ne pouvait pas la mettre dans un avion dans cet état, mais il pouvait conduire pour la ramener, toute la nuit s’il le fallait. Maria se débarrasserait du véhicule pour lui sans poser de questions. Et les autorités locales rendraient une petite visite au dealer, Ike.
Il tourna la tête vers elle, pelotonnée sur la banquette arrière avec les genoux pliés et la joue contre le cuir souple, l’air paisible mais vulnérable.
Elle a besoin de toi.
Et il avait besoin qu’on ait besoin de lui.
4 SEMAINES PLUS TARD
CHAPITRE UN
“Tu es prêt ?” demanda Alan Reidigger à voix basse en vérifiant le chargeur du Glock noir dans sa grosse main. Zéro et lui étaient adossés à un mur en contreplaqué, restant cachés sous couvert de l’obscurité. Il faisait presque trop noir pour y voir quoi que ce soit, mais Zéro savait que, dans un court moment, tout l’endroit serait illuminé comme un soir du Quatorze Juillet.
“Toujours prêt,” chuchota Zéro. Il tenait un Ruger LC9 dans sa main gauche, un petit pistolet argenté à chargeur neuf coups, tout en fléchissant les doigts de sa main droite. Il ne devait pas oublier la blessure qu’il avait subie près de deux ans plus tôt, quand une ancre en acier s’était écrasée sur sa main, la rendant inutilisable. Trois opérations et plusieurs mois de rééducation physique plus tard, il avait récupéré presque tout son usage, malgré des dommages nerveux irréversibles. Il pouvait tirer avec une arme à feu, mais le coup avait tendance à dévier à gauche, un souci mineur qu’il avait appris à compenser.
“Je pars à gauche,” indiqua Reidigger, “et je dégage la voie. Tu vas à droite. Garde les yeux ouverts et surveille tes arrières. Je parie qu’il y a une surprise ou deux qui nous attendent.”
Zéro ne put s’empêcher de sourire. “Oh, c’est toi qui lances les hostilités maintenant, partenaire à mi-temps ?”
“Essaie de suivre un peu, vieillard.” Reidigger lui retourna son sourire, ses lèvres se recourbant derrière la barbe épaisse qui obscurcissait la partie inférieure de son visage. “Prêt ? Allons-y.”
À cette simple commande chuchotée, ils laissèrent tous les deux de la façade en contreplaqué derrière eux et se séparèrent. Zéro leva le Ruger, son canon suivant sa ligne de mire pendant qu’il se glissait en tournant dans une allée étroite.
Au début, il n’y eut que le silence et l’obscurité, sans aucun bruit dans cet espace caverneux. Zéro dut empêcher ses muscles de se tendre, leur ordonnant de rester relâchés et de ne pas ralentir sa vitesse de réaction.
C’est juste comme toutes les autres fois, se dit-il. Tu as déjà fait ça avant.
Puis, des lumières éclatèrent à sa droite dans une série d’éclairs puissants et discordants. Un flash sortit du canon d’une arme, accompagné par le bruit assourdissant du coup de feu. Zéro se jeta en avant, fit une roulade, et se redressa sur un genou. La forme n’était rien de plus qu’une silhouette, mais il y voyait suffisamment pour tirer deux coups qui atteignirent cette dernière en plein cœur.
Je n’ai pas perdu la main. Il se redressa légèrement en restant bas, avançant accroupi. Garde les yeux ouverts. Surveille tes arrières… Il se retourna juste à temps pour voir une autre forme sombre apparaître, barrant la route derrière lui. Zéro se jeta en arrière, atterrissant sur les fesses en tirant deux coups de plus. Il entendit des projectiles siffler juste au-dessus de sa tête, les sentant quasiment souffler dans ses cheveux. Ses deux tirs atteignirent sa cible, l’un dans le torse et l’autre dans le front de la silhouette.
De l’autre côté de la structure, parvinrent trois coups secs en rafale rapide. Ensuite, ce fut le silence. “Alan,” chuchota-t-il dans l’oreillette. “La voie est libre ?”
“Pas encore,” fut sa réponse. Une salve de tirs automatiques fendit l’air, suivis par deux coups émanant du Glock. “La voie est libre. Retrouve-moi de l’autre côté.”
Zéro resta dos au mur en avançant rapidement, le contreplaqué rugueux frottant contre son gilet tactique. Il distingua un mouvement furtif au-dessus de lui, depuis le toit plat de la structure. Un seul coup bien placé à la tête élimina la menace.
Il atteignit l’angle et s’arrêta, prenant une profonde inspiration avant de se montrer. Alors qu’il faisait le tour, Ruger levé, il se retrouva nez-à-nez avec Reidigger.
“J’en ai trois,” lui dit Zéro.
“Deux de mon côté,” grommela Alan. “Ce qui veut dire…”
Zéro n’eut pas le temps de crier un avertissement en voyant une forme humaine apparaître derrière Alan. Il leva son pistolet, juste au-dessus de l’épaule d’Alan, et tira deux fois.
Mais pas assez vite. Alors que Zéro tirait, Alan cria et serra sa jambe.
“Ah, putain !” grogna Reidigger. “Pas encore une fois.”
Zéro grimaça, alors que de brillantes lumières fluorescentes s’allumaient soudain, illuminant tout le terrain d’entraînement intérieur. Des talons claquèrent contre le sol bétonné et, un moment plus tard, Maria Johansson débarqua, bras croisés sur son blazer blanc, sa bouche maquillée faisant la moue.
“Qu’est-ce qui se passe ?” protesta Reidigger. “Pourquoi on s’arrête ?”
“Alan,” gronda Maria, “peut-être que tu devrais suivre tes propres conseils et surveiller tes arrières.”
“Quoi, ça ?” Alan désigna sa cuisse où une balle de paintball verte avait éclaboussé son pantalon. “C’est juste une égratignure.”
Maria haussa le ton. “L’artère fémorale aurait été touchée. Tu serais mort en quatre-vingt-dix secondes.” À l’attention de Zéro, elle ajouta, “Beau travail, Kent. Tu bouges presque comme quand tu étais plus jeune.”
Zéro décocha un sourire à Alan, qui lui fit furtivement un doigt.
L’entrepôt dans lequel ils se trouvaient était une ancienne usine de conditionnement en gros, jusqu’à ce que la CIA la rachète et la transforme en terrain d’entraînement. Le dispositif en lui-même était le produit de l’ingénieur excentrique de l’agence Bixby, qui avait fait de son mieux pour simuler un raid nocturne. La “base” qu’ils avaient pris d’assaut était composée de structures en contreplaqué, tandis que les flashs des canons des armes étaient des stroboscopes placés un peu partout dans les locaux. Les bruits des coups de feu étaient reproduits numériquement et diffusés via des haut-parleurs haute-définition qui faisaient écho dans cet immense espace et donnaient presque l’impression aux oreilles entraînées de Zéro que c’étaient de vrais coups de feu. Les formes humaines n’étaient rien d’autre que des mannequins en gel balistique fixés sur des chariots, tandis que les armes de paintball étaient automatisées, programmées pour tirer quand les capteurs décelaient un mouvement à diverses portées.
La seule chose vraie de l’exercice étaient les balles réelles qu’ils utilisaient, raison pour laquelle Zéro et Reidigger portaient des gilets tactiques pare-balles… Voilà pourquoi ce centre d’entraînement n’était accessible qu’aux agents des Opérations Spéciales, dans lesquelles Zéro se retrouvait à nouveau enrôlé.
Après le fiasco en Belgique, dans lequel ils s’étaient tous les deux confrontés au président russe Aleksandr Kozlovsky et avaient dévoilé le pacte secret qu’il avait avec le président des USA Harris, dire que Zéro et Reidigger s’étaient retrouvés dans le pétrin était un doux euphémisme. Ils étaient devenus des fugitifs internationaux recherchés dans quatre pays pour avoir enfreint plus d’une dizaine de lois. Mais ils avaient eu raison à propos du complot, et il ne semblait pas vraiment justifié pour eux deux qu’ils passent le reste de leurs vies en prison.
Aussi, Maria avait tiré toutes les ficelles possibles, se mouillant vraiment pour ses anciens coéquipiers et amis. Ça tenait presque du miracle qu’elle ait réussi à faire passer toute cette histoire pour une opération top-secret sous sa supervision.
Bien sûr, la contrepartie était qu’ils devaient retourner bosser pour la CIA.
Même si Zéro ne comptait pas l’admettre à haute voix, c’était comme un retour à la maison pour lui. Il avait travaillé dur ce dernier mois, se remettant au sport, allant an centre de tir pour s’entraîner tous les jours, boxant et évitant les coups d’opposants ayant presque la moitié de son âge. Le poids qu’il avait pris durant son absence d’un an et demi s’était volatilisé. Il s’améliorait au tir de sa main droite blessée. Maria avait raison, il était presque au même niveau qu’avant.
Alan Reidigger, de son côté, avait résisté au maximum. Il avait passé les quatre dernières années de sa vie sous l’alias d’un mécanicien appelé Mitch, alors que l’agence le croyait mort. Revenir à la CIA était la dernière chose qu’il voulait mais, étant donné le choix entre ça ou un trou à E-6, il avait accepté à contrecœur les conditions de Maria, mais en tant que ressource plutôt qu’agent à part entière, raison pour laquelle Zéro plaisantait en l’appelant “partenaire à mi-temps.” L’implication d’Alan dépendrait des besoins et il fournirait son soutien si nécessaire, aidant également à former des agents plus jeunes.
Mais avant ça, il fallait qu’ils retrouvent tous les deux la forme pour se battre.
Reidigger voulut essuyer la peinture verte sur son pantalon, ce qui ne fit que l’étaler un peu plus sur sa cuisse. “Laisse-moi nettoyer ça, et on s’y remet,” dit-il à Maria.
Elle secoua la tête. “Je ne vais pas passer toute la journée dans ce lieu étouffant à te voir prendre coup après coup. On reprendra après les vacances.”
Alan marmonna, mais acquiesça quand même. Il avait été un excellent agent en son temps. Et même maintenant, il s’avérait être encore vif et apte au combat. Il était rapide, malgré son poids en trop au niveau du ventre. Pourtant, il avait toujours été un aimant à balles. Zéro ne pouvait même pas se rappeler le nombre de fois où Reidigger s‘était fait tirer dessus durant sa carrière, mais ça ne devait pas être loin d’un nombre à deux chiffres, en particulier depuis qu’il avait pris une balle à l’épaule durant leur épopée belge.
Un jeune technicien débarqua avec un chariot en acier à roulettes pour récupérer leurs équipements, tandis que trois autres s’affairaient à remettre en ordre la zone d’entraînement. Zéro dégagea la balle de la chambre du Ruger, retira le chargeur et posa les trois éléments sur le chariot. Puis, il arracha les bandes Velcro de son gilet tactique et le fit passer par-dessus sa tête pour l’enlever, se sentant soudain plus léger de quelques kilos.
“Alors, il y a une chance que tu aies changé d’avis ?” demanda-t-il à Alan. “Pour Thanksgiving. Les filles seraient ravies de te voir.”
“Et ça me ferait plaisir de les voir aussi,” répondit-il, “mais je vais passer mon tour pour cette fois. Je préfère vous laisser vous retrouver en famille.”
Alan ne s’attarda pas sur le sujet, et il n’en avait pas besoin. Les relations de Zéro avec Maya et Sara avaient été plus que tendues depuis un an et demi. Mais cela faisait maintenant plusieurs semaines que Sara était retournée chez lui, depuis qu’il l’avait retrouvée sur une plage en Floride. Maya et lui avaient commencé à se parler de plus en plus par téléphone et elle avait presque sauté dans le premier avion quand elle avait appris ce qui était arrivé à sa petite sœur, mais Zéro l’avait rassurée et convaincue de rester à l’école jusqu’aux vacances. Cette semaine serait la première depuis longtemps où ils allaient tous se retrouver sous le même toit. Et Alan avait raison. Il y avait encore beaucoup de boulot à accomplir pour réparer les dommages qui les avaient séparés pendant si longtemps.