Tasuta

Sans Laisser de Traces

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Märgi loetuks
Sans Laisser de Traces
Sans Laisser de Traces
Tasuta audioraamat
Loeb Elisabeth Lagelee
Lisateave
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Chapitre 17

Riley jurait entre ses dents en s’engageant sur le parking d’un bâtiment rectangulaire au toit plat. Trois personnes vêtues de l’uniforme du FBI se tenaient devant la porte, en compagnie de représentants de la police locale.

— Ça n’augure rien de bon, dit Riley. J’aurais préféré arriver avant la horde.

— Sans blague, marmonna Bill.

On leur avait expliqué qu’une femme avait été enlevée à l’intérieur d’une clinique médicale, tôt le matin.

— Au moins, nous avons reçu l’info, cette fois, dit Bill. Peut-être qu’on a une chance de la retrouver vivante.

Riley acquiesça silencieusement. Personne ne savait à quel moment et dans quel lieu les premières victimes avaient été kidnappées. Les femmes s’étaient contentées de disparaître, puis de réapparaître mortes au milieu d’une scène cryptique née dans le cerveau du tueur.

Peut-être que ce sera différent, cette fois, pensa-t-elle.

Elle était soulagée d’apprendre que quelqu’un avait assisté au crime et appelé le numéro d’urgence. La police locale savait qu’un tueur en série était recherché et ils avaient immédiatement contacté le FBI. Tous étaient partis du principe que c’était l’œuvre du même esprit tordu.

— Il a quand même des coups d’avance, dit Riley. Si c’est bien lui. Ce n’est pas le genre d’endroit où je l’imaginais enlever une femme.

Elle avait plutôt imaginé le tueur traîner dans un parking souterrain ou une piste de jogging un peu isolée. Peut-être même un quartier mal éclairé.

— Pourquoi une clinique communautaire ? se demanda-t-elle. Et pourquoi en plein jour ? Pourquoi prendrait-il le risque d’entrer dans le bâtiment ?

— Il n’a pas dû choisir au hasard, dit Bill. Allez, on y va.

Riley se gara le plus près possible de la zone délimitée par la police. Alors qu’ils descendaient de la voiture, elle reconnut l’agent spécial chargé d’enquête Carl Walder.

— Ça n’augure vraiment rien de bon, murmura Riley à Bill en marchant vers le bâtiment.

Riley n’avait pas beaucoup d’estime pour Walder – un homme au visage poupin, semé de tâches de rousseur, et aux cheveux bouclés teints en roux. Ni Riley, ni Bill n’avait jamais travaillé avec lui, mais l’homme traînait une mauvaise réputation. D’autres agents racontaient qu’il était le pire chef possible – quelqu’un qui ne savait pas vraiment ce qu’il faisait et qui avait donc plus de raisons qu’un autre d’affirmer son autorité.

Pire encore, Walder était le supérieur de leur propre chef d’équipe, Brent Meredith. Riley ne connaissait pas son âge, mais elle savait qu’il avait remonté la chaîne alimentaire du FBI bien trop vite pour son bien – et pour le bien des autres.

Aux yeux de Riley, Walder était un cas d’école du principe de Peter. Il s’était élevé avec succès jusqu’au grade de son incompétence.

Walder s’avança pour accueillir Riley et Bill.

— Agent Paige, Agent Jeffreys, content de voir que vous avez pu venir, dit-il.

Sautant les banalités d’usage, Riley posa immédiatement à Walder la question qui la préoccupait.

— Comment savons-nous qu’il s’agit du tueur qui a enlevé les trois autres femmes ?

— À cause de ceci, dit Walder en brandissant un sachet de plastique qui renfermait une rose artificielle de mauvaise qualité. Nous l’avons trouvée par terre.

— Oh merde, dit Riley.

Le Bureau avait pris soin de ne donner aucun détail à la presse sur le modus operandi du tueur – notamment son habitude de déposer des roses aux pieds des corps. Ce n’était donc pas l’œuvre d’un imitateur ou d’un tout nouveau tueur.

— Qui c’était, cette fois ? demanda Bill.

— Elle s’appelle Cindy MacKinnon, dit Walder. C’est une infirmière auxiliaire autorisée. Elle a été enlevée alors qu’elle arrivait tôt dans la matinée pour préparer la clinique.

Walder pointa du doigt les deux autres agents, une jeune femme et un homme plus jeune encore.

— Vous connaissez peut-être les agents Craig Huang et Emily Creighton. Ils vous rejoignent sur l’affaire.

Bill marmonna de façon audible :

— Putain, mais c’est quoi…

Riley lui envoya une bourrade dans les côtes pour le faire taire.

— Huang et Creighton ont déjà été briefés, ajouta Walder. Ils en savent maintenant autant que vous.

Riley bouillait intérieurement. Elle voulut répondre à Walder que, non, Huang et Creighton n’en savaient pas autant qu’elle. Pas autant que Bill. Ils ne pouvaient pas en savoir autant sans avoir passé du temps sur les scènes de crime, sans avoir passé des heures à examiner les preuves. Ils n’avaient pas investi autant de temps et d’énergie professionnelle qu’elle et Bill. Et elle était certaine que ni l’un, ni l’autre de ces jeunes recrues n’avait jamais pénétré l’esprit d’un tueur pour deviner son expérience.

Riley prit une profonde inspiration pour dominer sa colère.

— Avec tout le respect que je vous dois, dit-elle, l’agent Jeffreys et moi-même, nous nous débrouillons très bien et nous allons avoir besoin de travailler assez rapidement. De l’aide… ne nous aidera pas.

Elle faillit ajouter que l’aide apportée ne ferait que les ralentir, mais elle se retint à temps. Inutile d’humilier les gamins.

Riley devina l’ombre d’un sourire sur le visage poupin de Walder.

— Avec tout le respect que je vous dois, Agent Paige, répondit-il. Le sénateur Newbrough n’est pas d’accord.

Le cœur de Riley se serra. Elle se rappela la conversation désagréable qu’elle avait eu avec le sénateur et ce qu’il lui avait dit : « Vous ne le savez peut-être pas, mais j’ai de bons amis parmi vos supérieurs. »

Bien sûr, il fallait que Walder fasse partie de ces « bons amis ».

Walder leva le menton et prit à nouveau la parole avec une autorité empruntée.

— Le sénateur m’a dit que vous aviez du mal à cerner l’importance de cette affaire.

— J’ai bien peur que le sénateur ne laisse ses émotions s’emballer, dit Riley. C’est compréhensible et je compatis. Il est désemparé. Il pense que le meurtre de sa fille est politique, personnel ou les deux à la fois. Il est évident que ce n’est pas le cas.

Walder plissa les yeux d’un air sceptique.

— En quoi est-ce évident ? demanda-t-il. Pour moi, il est évident qu’il a raison.

Riley en croyait à peine ses oreilles.

— Monsieur, la fille du sénateur est la troisième victime d’une série qui s’élève maintenant à quatre, dit-elle. Il sévit depuis plus de deux ans. Si sa fille se retrouve parmi les victimes, ce n’est qu’une coïncidence.

— Je me permets de ne pas être d’accord, dit Walder. Les agents Huang et Creighton ne sont pas d’accord non plus.

Comme si elle avait attendu ce signal, l’agent Emily Creighton intervint :

— Cela arrive de temps en temps, non ? dit-elle. Je veux dire, parfois, le meurtrier met en scène un autre meurtre avant de s’attaquer à sa cible ? Pour faire croire que ce n’est pas personnel ?

— Ce dernier kidnapping pourrait avoir le même objectif, ajouta l’agent Craig Huang. Un dernier leurre.

Riley s’abstint de rouler les yeux au ciel devant la naïveté de ces gamins.

— C’est une histoire vieille comme le monde, dit-elle. De la fiction. Ça ne se passe pas comme ça dans la vraie vie.

— Eh bien, dit Walder d’un ton autorité, cette fois oui.

— Non n’avons pas le temps pour ça, grogna Riley qui avait épuisé toute sa patience. Y a-t-il des témoins ?

— Un, dit Walder. Greta Tedrow a appelé le numéro d’urgence, mais elle n’a pas vu grand-chose, en fait. Elle est assise à l’intérieur. La réceptionniste est là également, mais elle n’a pas vu ce qui s’est passé. Quand elle est arrivée à huit heures, les flics étaient déjà sur place.

À travers les portes en verre de la clinique, Riley aperçut deux femmes dans la salle d’attente. L’une était mince et vêtue de vêtements de sport. Elle tenait par la laisse un cocker anglais. L’autre était une femme plus ronde, d’âge moyen, aux traits hispaniques.

— Avez-vous interrogé Mme Tedrow ? demanda Riley à Walder.

— Elle était trop secouée pour parler, dit Walder. Nous allons la ramener au département d’Analyse Comportementale.

Cette fois, Riley leva les yeux au ciel. Quel était l’intérêt de traiter un témoin innocent comme un suspect ? Pourquoi la bousculer ? Déjà qu’elle était secouée…

Ignorant le geste de protestation de Walder, elle ouvrit la porte et traversa le vestibule.

Bill la suivit. Il laissa Riley interroger le témoin, pendant qu’il examinait les bureaux adjacents et jetait un coup d’œil dans la salle d’attente.

La femme au chien leva un regard anxieux vers Riley.

— Qu’est-ce qui se passe ? demanda Greta Tedrow. Je suis prête à répondre aux questions, mais personne ne m’a encore rien demandé. Pourquoi je ne peux pas rentrer chez moi ?

Riley s’assit sur une chaise près d’elle et lui tapota le bras.

— Vous allez rentrer chez vous, Mme Tedrow, et très bientôt, dit-elle. Je suis l’agent Paige et j’aimerais vous poser quelques questions.

Greta Tedrow hocha la tête en tremblant. Le cocker anglais demeura allongé sur le sol, son regard chaleureux posé sur Riley.

— C’est un beau chien, dit Riley. Il est bien élevé. Il a quel âge ? Ou alors c’est une femelle ?

— C’est un mâle. Il s’appelle Toby. Il a cinq ans.

Riley tendit lentement la main vers le chien. Avec la permission silencieuse de l’animal, elle lui caressa la tête.

Sa maîtresse hocha la tête, comme pour la remercier. Riley sortit son calepin et son stylo.

 

— Maintenant, prenez votre temps, ne vous précipitez pas, dit Riley. Dites-moi avec vos mots ce qui s’est passé. Essayez de vous souvenir de tout.

La femme prit la parole de façon hésitante.

— Je promenais Toby, dit-elle en pointant le doigt vers l’extérieur. On passait juste au coin, derrière les haies, par là-bas. La clinique venait juste d’apparaître sur le côté. J’ai cru entendre quelque chose. J’ai regardé. Il y avait une femme dans l’entrée. Elle tapait sur les portes en verre. Je crois qu’on l’avait bâillonnée. Puis quelqu’un l’a tirée vers l’arrière et je ne l’ai plus vue.

Riley tapota à nouveau la main de la femme.

— C’est très bien, Mme Tedrow, dit-elle. Avez-vous vu son assaillant ?

La femme fouilla sa mémoire.

— Je n’ai pas vu son visage, dit-elle. Je ne pouvais pas voir son visage. La lumière était allumée dans la clinique, mais…

Riley vit un éclair traverser le regard de la femme.

— Oh, dit-elle. Il portait un masque de ski sombre.

— Très bien. Et que s’est-il passé après ?

La femme sembla soudain plus agitée.

— Je n’ai pas pris le temps de réfléchir. J’ai sorti mon téléphone et j’ai appelé la police. J’ai eu l’impression que ça sonnait longtemps avant que quelqu’un ne réponde. Je lui parlais quand un 4x4 a surgi de derrière le bâtiment. Il a démarré à fond la caisse avant de tourner à gauche.

Riley prenait des notes rapides. Walder et ses deux jeunes protégés étaient entrés et les regardaient, mais elle les ignora.

— Quel genre de 4x4 ? demanda-t-elle.

La dame plissa le front.

— Un Ram, je crois. Oui, c’est ça. Assez vieux… Des années quatre-vingt-dix, peut-être. Il était très sale, mais je crois qu’il était bleu très foncé. Il transportait quelque chose à l’arrière. Un peu comme un camping-car, mais c’en était pas un. Un genre de toit en aluminium, avec des fenêtres.

— Une cabine en fibres de verre ? suggéra Riley.

La femme hocha la tête.

— Je crois qu’on appelle ça comme ça.

La mémoire du témoin réjouissait et impressionnait Riley.

— Et le numéro de la plaque ? demanda-t-elle.

La femme eut soudain l’air pris au dépourvu.

— Je, je ne l’ai pas noté, dit-elle d’un air déçu.

— Pas même une lettre ou un nombre ? demanda Riley.

— Je suis désolée, mais je ne l’ai pas vu. Je ne comprends pas comment j’ai pu le rater.

Walder s’approcha et murmura vivement à l’oreille de Riley.

— Nous devons l’emmener au département, dit-il.

Il recula d’un pas quand Riley se redressa.

— Merci, Mme Tedrow, dit Riley. C’est tout pour le moment. La police a-t-elle pris vos cordonnées ?

La femme hocha la tête.

— Alors, rentrez chez vous et reposez-vous, dit Riley. Nous vous contacterons très bientôt.

La femme sortit de la clinique avec son chien et reprit le chemin de chez elle. Walder semblait tout près d’exploser de rage et d’exaspération.

— Qu’est-ce que vous venez de faire ? demanda-t-il. J’ai dit que nous devions l’emmener au département !

Riley haussa les épaules.

— Je ne vois vraiment pas pourquoi, dit-elle. Nous devons avancer rapidement et elle nous a dit tout ce qu’elle pouvait.

— Je veux qu’un de nos hypnotiseurs travaille avec elle. Pour l’aider à se souvenir du numéro de plaque. Il doit être quelque part dans sa mémoire.

— Agent Walder, dit Riley en prenant soin de ne pas avoir l’air trop impatient, Greta Tedrow est un des témoins les plus observateurs que j’ai interrogés depuis longtemps. Elle a dit qu’elle n’avait pas vu la plaque. Qu’elle ne l’avait pas notée. Ça l’ennuyait. Elle ne comprenait pas comment elle avait pu le rater. Venant de quelqu’un qui a une mémoire aussi vive, cela ne peut vouloir dire qu’une seule chose.

Elle s’interrompit, mettant au défi Walder de découvrir lui-même sa conclusion. Elle comprit à son expression vide qu’il n’avait pas la moindre idée de ce que cela pouvait être.

— Il n’y avait pas de plaque à noter, dit-elle enfin. Soit l’assaillant l’a retirée, soit elle était couverte de boue. Tout ce qu’elle a vu, c’est un espace vide là où la plaque aurait dû se trouver. Si il y avait eu une plaque, la femme aurait au moins retenu quelques lettres ou chiffres.

Bill laissa s’échapper un petit rire admiratif. Riley voulut lui faire signe de se taire, mais songea que cela ne ferait qu’empirer les choses. Elle décida de changer de sujet.

— La famille de la victime a-t-elle été contactée ? demanda-t-elle à Walder.

Walder hocha la tête.

— Son mari. Il est arrivé il y a quelques minutes, mais il n’a pas pu tenir le coup. Nous l’avons renvoyé chez lui. Il vit à quelques pâtés de maisons. Je vais envoyer les agents Huang et Creighton l’interroger.

Les deux jeunes agents se tenaient à quelques pas et discutaient à bâtons rompus. Ils se tournèrent vers Riley, Bill et Walder, visiblement contents d’eux-mêmes.

— Emily... Heu, l’agent Creighton et moi, nous avons élucidé le mystère, dit Huang. Il n’y a aucun signe d’effraction. Le criminel doit avoir un complice à l’intérieur. En fait, il connaît quelqu’un qui travaille à la clinique. Peut-être qu’il y travaille lui-même.

— Il a dû mettre la main sur une clef, renchérit Creighton. Peut-être qu’il l’a volée ou empruntée et fait un double, quelque chose comme ça. Et il connaissait le code de l’alarme. Il est entré et il est ressorti sans l’activer. Nous allons interroger le personnel en gardant ça en tête.

— Et nous savons ce que nous cherchons, dit Huang. Quelqu’un qui en veut au sénateur Newbrough.

Riley ravala sa colère. Ces deux gamins tiraient des conclusions hâtives. Bien sûr, ils avaient peut-être raison. Mais combien de pistes avaient-ils ignorées ? Elle balaya du regard la salle d’attente et les couloirs adjacents. Une autre possibilité prit forme dans son esprit. Elle se tourna vers la réceptionniste d’origine hispanique.

— Perdóneme, señora, lui dit-elle. Dónde está el cuarto de provisiones ?

— Allá, dit la femme en pointant le doigt vers la porte du couloir.

Riley ouvrit la porte. Elle jeta un coup d’œil à l’intérieur, puis se tourna vers Walder et dit :

— Je peux vous dire exactement comment il est entré dans le bâtiment. Il est sorti de cette pièce.

Walder prit l’air agacé. Par effet de contraste, Bill semblait absolument ravi. Riley savait qu’il détestait Walder autant qu’elle. Il espérait sans doute qu’elle donnerait à Walder une leçon d’investigation.

Les deux agents regardaient fixement par la porte ouverte. Ils se tournèrent vers Riley.

— Je ne comprends pas, se plaignit Emily Creighton.

— Ce n’est qu’un placard, renchérit Craig Huang.

— Vous voyez ces cartons dans le fond ? dit Riley. Ne touchez à rien.

Bill et Walder se joignirent au groupe qui observait l’intérieur du placard. Des fournitures – paperasses et pansements – s’empilaient sur les étagères. Des blouses blanches étaient rangées dans un coin. Mais plusieurs cartons sur le sol ne semblaient pas à leur place. Tout était rangé soigneusement, sauf ces boîtes qui formaient des angles étranges. Derrière elles, s’ouvrait un espace vide.

— Les boîtes se trouvaient contre le mur, commenta Bill. Quelqu’un aurait pu se cacher derrière.

— Faites venir la police scientifique, grogna Walder en direction des jeunes agents.

Il se tourna ensuite vers Riley ;

— Quelle est votre théorie ?

Le scénario se mit en place rapidement dans le cerveau de Riley. Elle entreprit d’en dessiner les grandes lignes.

— Il est arrivé à la clinique hier, dit-elle. Sans doute tard dans la journée, à une heure où il y a du monde. Au milieu des patients, il a demandé quelque chose de simple à la réceptionniste. Un test de pression artérielle, peut-être. Et peut-être même qu’elle s’est occupée de lui – Cindy MacKinnon, la femme qu’il surveillait, la femme qu’il est venu enlever. Ça lui aurait fait plaisir.

— Nous ne pouvons pas en être certains, dit Walder.

— Non, admit Riley. Et, bien sûr, il n’aurait pas donné son vrai nom, mais vous devriez quand même vérifier le registre des tests qu’elle a administrés, en éliminant tous les noms que le personnel connaît. En fait, vous devriez passer en revue tous ceux qui sont venus hier.

Cela prendrait du temps, elle le savait. Mais ils devaient suivre toutes les pistes aussi vite que possible. Il fallait arrêter cet homme.

— Il est venu, dit Riley, et s’est mélangé aux autres patients. Peut-être que quelqu’un se souviendra de quelque chose de bizarre. Pendant que tous regardaient ailleurs, il s’est glissé dans ce placard.

— Ce n’est pas là qu’ils gardent les médicaments et je ne vois rien ici qui ait de la valeur, ajouta Bill. Je ne pense pas que ce soit très bien gardé.

— Il s’est glissé sous la dernière étagère et derrière ces boîtes en cartons, dit Riley. Le personnel n’a rien remarqué. La clinique a fermé à l’heure habituelle et tout le monde est rentré chez soi. Quand il a été certain d’être seul, le criminel a poussé les boîtes sur le côté, il est sorti et il a fait comme chez lui. Il a attendu toute la nuit. Je pense même qu’il a bien dormi.

La police scientifique fit son entrée et les agents s’écartèrent pour les laisser partir à la recherche des cheveux, des empreintes digitales ou quoi que ce soit qui puisse contenir une trace ADN ou les lancer sur une piste.

— Vous avez peut-être raison, marmonna Walder. Nous allons devoir chercher tous les endroits où il aurait pu passer la nuit. C'est-à-dire un peu partout.

— La solution la plus simple, dit Riley, est souvent la meilleure.

Elle enfila des gants en plastique et parcourut le couloir en jetant un coup d’œil dans chaque pièce. L’une était une salle de repos destinée au personnel. Il y avait là un canapé qui semblait confortable.

— Il a passé la nuit là, dit-elle avec un sentiment de certitude.

Walder jeta un œil à l’intérieur.

— Personne n’entre dans cette pièce tant que la police scientifique ne s’en est pas occupée, dit-il en faisait de son mieux pour avoir l’air efficace et professionnel.

Riley fit demi-tour pour se diriger à nouveau vers la salle d’attente.

— Il était déjà là quand Cindy MacKinnon est arrivée ce matin, parfaitement à l’heure. Il l’a attrapée.

Riley pointa le doigt vers le bout du couloir.

— Puis il est reparti avec elle par la porte de derrière. Son 4x4 l’attendait juste là.

Riley ferma les yeux un instant. Elle le voyait presque. Une image floue sur laquelle elle ne parvenait pas à faire la mise au point. S’il avait eu certaines caractéristiques bien reconnaissables, quelqu’un l’aurait remarqué. Il devait être banal. Pas obèse, pas spécialement grand, ni petit, pas de coupe de cheveux étrange, pas de tatouages, pas de coloration. Il aurait porté des vêtements usés, mais rien qui puisse le rattacher à un métier particulier. De vieux habits confortables et souvent portés. Ces habits devaient lui sembler naturels, pensa-t-il. Il s’habillait sans doute de cette façon tous les jours.

— Quel lien a-t-il avec ces femmes ? murmura-t-elle. D’où vient sa colère ?

— Nous le découvrirons, dit Bill fermement.

Walder ne pipait mot à présent. Riley devinait pourquoi. La théorie fumeuse d’un complice travaillant à la clinique, élaborée par ses deux protégés, semblait maintenant parfaitement ridicule. Quand Riley reprit la parole, ce fut d’un ton qui transpirait la condescendance :

— Agent Walder, j’apprécie l’enthousiasme juvénile de vos deux agents, dit-elle. Ils apprennent. Ils seront très bons, un jour. J’en suis persuadée. Mais je crois que l’agent Jeffreys et moi-même seront plus à même d’interroger le mari.

Walder poussa un soupir et lui adressa un hochement de tête bref et presque invisible.

Sans ajouter un mot, Riley et Bill quittèrent la scène du crime. Elle avait des questions importantes à poser au mari de la victime.