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Henri IV en Gascogne (1553-1589)

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XVI

Berger de Xivrey a noté, d'après d'Aubigné, ce curieux incident de la conférence de Nérac:

«La Meausse, gouverneur de Figeac, était un vieux gentilhomme d'un esprit juste et ferme. Lors des conférences de Nérac, il avait d'un seul mot détruit tout l'effet d'une comédie jouée par Catherine de Médicis, et peinte de main de maître par d'Aubigné. «La reine ayant ouï quelques gentilshommes ployer en leurs réponses particulières, les voulut voir et essayer ensemble en sa chambre, et là découpler une harangue curieusement élaborée par Pibrac, auquel on avait recommandé l'éloquence miraculeuse de Pologne, comme à un coup de besoin. Cependant elle, de son côté, avait appris par cœur plusieurs locutions qu'elle appelait consistoriales.

«Pibrac, bien préparé, harangua devant ces fronts d'airain, merveilleux en délicatesse de langage, exprès en ses termes, subtil en raisons, lesquelles il fortifiait et illustrait d'exemples agréables, presque tous nouveaux et curieusement recherchés…

«Il fut si pathétique qu'il rendit comme en extase les plus délicats de ses auditeurs. Adonc la reine, ayant les yeux comme larmoyants, se lève de sa chaire et haussant les mains sur sa tête, s'écria plusieurs fois: «Eh bien! mes amis, donnons gloire au Dieu vivant, faisons choir de ses mains la verge de fer!» Et comme elle eut demandé au nez de quelques-uns: «Que pouvez-vous répliquer?» tout fut muet, jusques au gouverneur de Figeac, nommé La Meausse, qui, comme l'interrogation s'adressait à lui, répondit: «Je dis, Madame, que Monsieur que voilà a bien étudié; mais de payer ses études de nos gorges, nous n'en pouvons comprendre la raison.» (Page 131.)

XVII

Ces pages sur les rapports du roi de Navarre avec les Etats de Béarn sont extraites d'une excellente étude, publiée en 1865 par M. Alphonse Pinède, avocat, sous ce titre: Les Béarnais au temps de Henri IV. (Page 137.)

XVIII

Il est certain que la lettre adressée, le 10 avril 1580, à la reine Marguerite par le roi de Navarre partant pour Cahors, était purement diplomatique. La reine de Navarre connaissait à merveille le projet formé par son mari d'aller se saisir d'une ville sur laquelle il avait, par son mariage, d'incontestables droits; mais il importait, à tous égards, que Marguerite parût avoir ignoré les desseins de son mari, afin surtout de ne pas sembler prendre part à la guerre qui éclatait entre le roi de France et le roi de Navarre. (Page 144. – Le renvoi n'est pas indiqué.)

XIX

Berger de Xivrey a longuement commenté la lettre du roi de Navarre à Madame de Batz sur la prise de Cahors. Après avoir relevé cette qualification: «A ma cosine», employée, dit-il, pour cousine, il poursuit en ces termes:

«Ce titre, que le roi de Navarre donne à Madame de Batz, s'explique aisément par l'extraction illustre de cette dame et par celle de son mari. Bertrande de Montesquiou, femme du baron de Batz, descendait des anciens ducs de Gascogne; Manaud de Batz, troisième fils de Pierre de Batz et de Marguerite de Léaumont, tirait son origine des anciens vicomtes du même pays, dignité dont furent revêtus, pendant le dixième siècle et une partie du onzième, les vicomtes de Lomagne, ancêtres directs des barons de Batz. Les preuves de cette descendance furent vérifiées en 1784 par une commission composée de dom Clément et de dom Poirier, religieux bénédictins; de MM. de Bréquigny et Désormeaux, de l'Académie des inscriptions et belles-lettres; Chérin, généalogiste des ordres du Roi; Ardillier, administrateur général des domaines de la couronne, et Pavillet, premier commis de l'ordre du Saint-Esprit.»

A propos du début de la lettre royale: «Je ne me dépouillerai pas, combien que je sois tout sang et poudre…» Berger de Xivrey fait les remarques suivantes:

«Ces mots, où il n'y a rien d'exagéré, indiquent d'une manière précise la date de cette lettre au moment où finissait le terrible combat de quatre jours, qui venait de réduire Cahors au pouvoir du roi de Navarre. D'Aubigné et Sully ont raconté cet événement avec des détails fort circonstanciés, et néanmoins cette lettre et la suivante ajoutent encore plusieurs notions précieuses à l'Histoire universelle et aux Economies royales. Le journal de Faurin nous apprend que cette lutte acharnée du roi de Navarre et des défenseurs de Cahors dura du samedi 28 mai au mardi 31. C'est donc le 31 au soir que dut être écrite cette lettre à Madame de Batz. La prise de Cahors est un événement capital dans l'histoire du roi de Navarre et de son parti. «En toutes ses autres actions, dit Davila, ayant rendu des preuves de sa vivacité merveilleuse, il donna en celle-ci autant d'étonnement à ses gens que de terreur à ses ennemis, leur faisant connaître à quel point il était vaillant et hardi dans les combats.»

Quand on connaît la véritable histoire de la prise de Cahors, on lit, avec un intérêt assaisonné d'une pointe de gaîté, les récits que nous allons reproduire.

Le 4 juin 1580, Daffis, premier président du parlement de Toulouse, adressait à Henri III la lettre suivante, publiée dans les Archives historiques de la Gironde par Tamizey de Larroque:

«Sire,

«Pour la continuation de nos plus grandes misères est survenue la prise de la ville de Cahours par la prodition et intelligence d'aucuns des principaux habitants d'icelle et autres qui s'y étaient introduits en grand nombre. Ce n'a été, néanmoins, sans que vos sujets aient fait tous devoir de la conserver. Mais l'entreprise était dressée de si longue main et les forces des adversaires étaient si prêtes, que les pauvres habitants n'y ont pu résister et enfuir; la plupart ont été misérablement massacrés et meurtris. C'était une ville des plus grandes et plus catholiques dans ce ressort, qui s'était toujours bien maintenue. Etant d'ailleurs jugée forte de telle conséquence qu'on n'en pense point après Toulouse de plus importante

Le récit de P. de L'Estoile est franchement comique:

«Le dimanche 20e jour de mai (1580), partie par surprise, partie par intelligence, les huguenots de Gascogne, partisans du roi de Navarre, gagnèrent l'une des portes de la ville de Cahors, et y eut âpre combat, auquel le seigneur de Vesins, sénéchal et gouverneur de Mercy, fut blessé avec plusieurs des siens, et enfin, après avoir vertueusement combattu et soutenu l'assaut, deux jours et deux nuits, n'étant le plus fort, se retira à Gourdon. Le roi de Navarre y vint en personne, dix heures après la première entrée des siens, usant d'un trait et diligence de Béarnais, s'étant levé de son lit d'auprès de sa femme, avec laquelle il voulut coucher exprès, afin qu'elle ne se défiât de rien. Sur quoi ainsi elle osa bien assurer Leurs Majestés que son mari n'y était pas, encore qu'il y combattit en personne, y ayant perdu tout plein de bons soldats de sa garde et leur capitaine Saint-Martin, et étant demeuré à la fin maître de la ville. – La friandise du grand nombre de reliques et autres meubles et joyaux précieux étant dedans Cahors fut la principale occasion de l'entreprise.» (Page 151.)

XX

La surprise de Mont-de-Marsan, en 1580, est racontée par Poeydavant:

«Bertrand Baylens, sieur de Poyanne, un des plus braves gentilshommes de la Gascogne et gouverneur de Dax, fit une entreprise hardie sur la ville de Mont-de-Marsan, qui appartenait au roi de Navarre, et qui était la meilleure place du pays. Il trouva le secret de gagner le meunier d'un moulin, dont il se saisit et où il entra par escalade avec son lieutenant Lartigue, suivi du reste de sa troupe. A la faveur de cet avantage, il aboutit facilement au pied des murs, près de la porte principale de la haute ville, dans laquelle était le château.

«Il y avait un corps de garde à cette porte qu'on ouvrait chaque nuit pour faire passer la ronde dans le faubourg, qui était clos de murailles. Poyanne se tint si tranquille avec ceux qui l'accompagnaient, que la ronde ayant repassé du faubourg dans la ville, il y entra pêle-mêle, tailla en pièces le corps de garde et se rendit maître de la ville.

«Dupleix ajoute que, pendant le combat qui se fit au corps de garde, un des habitants de la ville alla fermer la porte. Poyanne, qui s'en aperçut, courut l'ouvrir au même instant et, par ce moyen, introduisit le reste de ses soldats.»

Il fit ouvrir une autre porte pour livrer passage à Borda, maire de Dax, qui avait rendez-vous avec lui, à la tête d'un détachement. Les assaillants ne perdirent que vingt-cinq hommes. Poyanne fut blessé. La garnison fut plus éprouvée.

«On doit cet éloge à Poyanne que, quoique ayant sujet d'être irrité contre les ennemis, il ne s'en vengea nullement. Il se contenta seulement de réclamer le secours de Biron pour s'emparer du château, qui résistait encore; mais la retraite de Poudenx, par laquelle la garnison fut affaiblie, le força bientôt à se rendre. Poyanne, ayant été laissé gouverneur de la ville, voulait faire démolir les fortifications; mais le roi de Navarre obtint de son beau-frère (Henri III) la défense de continuer la démolition…» (Page 157.)

XXI

Brantôme a porté sur le maréchal de Matignon, qu'il n'aimait pas, le jugement suivant: «Après que mondit maréchal de Biron fut parti de la Guienne, fut en sa place subrogé le maréchal de Matignon, un très fin et trinquat (rusé) Normand, et qui battait froid d'autant que l'autre battait chaud; c'est ce qu'on disait à la cour, qu'il fallait un tel homme au roi de Navarre et au pays de Guienne, car cervelles chaudes les unes avec les autres ne font jamais bonne soupe.»

 

Les Archives historiques de la Gironde ont publié une très intéressante et très précieuse lettre de Matignon adressée à Henri IV, quinze jours après la mort de Henri III. On voit, dans ce document, que le maréchal mettait au service du nouveau roi de France un zèle et un dévouement sans bornes. La lettre est datée du 18 août 1589. (Page 158.)

XXII

Après les négociations relatives au traité de Fleix, Monsieur, duc d'Anjou et d'Alençon, «fut reçu à Bordeaux, dit l'abbé O'Reilly dans son Histoire, avec une pompe extraordinaire». Le lendemain de son arrivée, il se rendit au parlement avec le maréchal de Biron et y fut longuement harangué et complimenté. Trois jours après, il y eut une grande procession d'actions de grâce, à laquelle assistaient «toutes les autorités de la ville, tous les fonctionnaires publics, les paroisses avec leur croix, la musique de Saint-André et de Saint-Seurin, l'archevêque portant le Saint-Sacrement, suivi des évêques de Bazas et de Dax; le duc d'Anjou, la reine Marguerite donnant le bras au grand sénéchal; tous les seigneurs et dames de la suite…»

On a remarqué avec raison, dit l'auteur du Château de Pau, que tout ce qu'il y a de grand et d'élevé dans le caractère de Henri s'associe naturellement, et par un mélange piquant, à des traits d'une familiarité d'autant plus précieuse à recueillir, qu'elle est le vivant témoignage d'un cœur paternel et d'une sincérité pleine de candeur. Cette familiarité s'explique aussi par les mœurs béarnaises et par les habitudes que le roi avait contractées sous le toit de son aïeul. Il aimait à «se faire petit avec les petits».

On a fait des volumes rien qu'avec les récits des aventures auxquelles nous faisons allusion. Voici une anecdote caractéristique entre toutes, empruntée à la Notice sur Nérac de M. de Villeneuve-Bargemont:

«Le duc d'Anjou, pendant le séjour qu'il fit à Nérac après la paix de Fleix, étant sorti pour aller parcourir les promenades qui ornent la ville, rentre fort mécontent de n'avoir été salué par personne et se plaint amèrement à son beau-frère de cette incivilité, qui était si contraire à tout le bien qu'il lui avait dit de ses sujets. «Je ne conçois rien à cela, dit Henri; mais, ventre saint-gris! venez avec moi, nous éclaircirons la chose.» En effet, dès qu'ils paraissent, la foule se presse autour d'eux. La joie, l'affection, le respect se peignent sur tous les visages. Henri frappe sur l'épaule de l'un, demande à l'autre des nouvelles de sa femme et de ses enfants, serre la main à celui-ci, fait un salut à celui-là, adresse quelques paroles honnêtes à tous, et rentre au château avec un cortège nombreux. «Eh bien! dit-il au duc d'Anjou, vous avais-je rien dit de trop sur l'honnêteté de mes braves bourgeois de Nérac? – Parbleu! je le crois bien: c'est vous qui leur faites presque toujours les avances… – Oh! par ma foi! mon frère, entre Gascons nous ne tirons jamais à la courte paille. Personne ne calcule avec moi, et je ne calcule avec personne; nous vivons à la bonne franquette, et l'amitié se mêle à toutes nos actions.»

«Qui n'a relu avec bonheur, ajoute Bascle de Lagrèze, les touchantes histoires du bon roi entrant incognito dans une chaumière, dans une hôtellerie, pour surprendre dans la bouche du peuple la vérité qu'on pouvait avoir intérêt à ne pas laisser pénétrer jusqu'à lui?» (Page 158.)

XXIII

Bascle de Lagrèze a consacré à Catherine de Bourbon un des plus intéressants chapitres du Château de Pau. Nous en détachons les lignes suivantes:

«En l'absence de Henri, qui poursuivait au loin ses aventureuses et nobles destinées, sa très chère et très aimée sœur, Madame la princesse de Navarre, régente et lieutenante-générale, résidait au château de Pau et s'occupait de la douce mission de faire le bonheur des Béarnais.

«Elle avait partagé avec son frère les tendresses d'une mère dévouée, et reçu comme lui une éducation sérieuse. Dans une sombre allée du parc royal, la reine Jeanne avait fait bâtir un petit castel qu'elle nommait «Castel-Béziat», charmante expression du pays qui devrait se traduire par château chéri comme un enfant gâté. Catherine y fut élevée. Le silence et la solitude ne conviennent-ils pas mieux pour l'éducation d'une jeune fille que les bruits de fêtes et d'intrigues dont retentissent les palais des rois?

«Jeanne d'Albret, s'adressant à son fils dans son testament, «lui recommande expressément la tutelle et défense de Madame Catherine sa sœur». Henri aimait trop sa sœur pour ne pas se conformer au vœu de sa mère. Il se hâta d'obtenir pour elle la liberté de rentrer en Béarn, où la ramena Madame de Tignonville, sa gouvernante. C'est dans le palais de Pau que cette noble princesse, d'un esprit supérieur, d'un savoir prodigieux, s'occupa des affaires du pays, consacrant ses loisirs à la culture des arts, à la poésie et à la musique. Elle jouait très bien du luth et chantait encore mieux.

«Elle était aussi bonne que spirituelle. Son frère et elle s'aimaient comme s'étaient aimés Marguerite de Valois et François Ier. Plusieurs lettres de Henri IV prouvent bien tout l'attachement qu'il lui portait. Il lui écrivait un jour: «La racine de mon amitié sera toujours verte pour vous, ma chère sœur». Dans une de ses lettres au roi de France, notre Henri s'excuse d'avoir tout quitté pour accourir à Pau, parce qu'il avait appris que sa sœur était malade.

«Catherine semblait être née pour régner; si elle ne régna pas de droit, elle gouverna de fait nos contrées. Elle remplaçait son frère absent. Elle administrait ses Etats sous le titre de régente, et jamais administration plus douce ne fut plus prospère. Le feu des guerres de religion et les horreurs des discordes civiles qui désolaient la France, n'atteignirent pas le Béarn, et si quelques difficultés surgirent, elle sut les conjurer, en faisant appel à l'affection que lui portait le peuple.

«Catherine restait à Pau sans se marier. Cependant jamais princesse ne se vit recherchée par un plus grand nombre de prétendants. Palma Cayet en a fait la récapitulation détaillée et complète; parmi eux figurent Monsieur, depuis duc d'Alençon, le duc de Lorraine (qui fut plus tard beau-père de Catherine), Philippe roi d'Espagne, le duc de Savoie, le roi d'Ecosse, le duc d'Anhalt, le duc de Montpensier, le comte de Soissons.

«C'est ce dernier prince qui avait inspiré une passion profonde à la sœur de Henri IV, dont le cœur était aussi aimant que celui de son frère. Le comte de Soissons, après avoir plu d'abord au roi de Navarre, encourut sa disgrâce pour toujours. Henri, dont le caractère était ouvert et loyal, ne pouvait souffrir le comte, toujours sérieux et dissimulé. Il l'accusait aussi d'avoir aspiré à se faire subroger à sa place, avec l'aide du pape, de l'Espagne et de la Ligue.

«Rien ne put changer les sentiments de Catherine. Durant vingt-cinq ans elle conserva son premier amour. Elle repoussait tous les prétendants, et attendait. Dans sa douce mélancolie, elle ne laissa jamais échapper une plainte, et semblait se complaire dans sa lointaine espérance.

«Lorsque notre Henri, ce parvenu légitime, fut enfin tranquillement assis sur le trône de France, il appela Catherine auprès de lui, désireux de lui faire oublier, par un mariage convenable, celui dont il avait empêché la réalisation.

«Catherine fut obligée de quitter Pau pour aller rejoindre son frère. La nouvelle de son départ jeta l'alarme dans le cœur des Béarnais. Ils comprenaient la perte immense qu'ils allaient faire. C'était leur dernière princesse qui allait leur être ravie. C'était leur protectrice, leur orgueil et leur amour, qui allait abandonner le château, à jamais déshérité de ses maîtres et de ses rois.

«Henri IV entoura sa sœur unique de soins et d'affection, autant que d'égards et d'honneurs. Elle avait partagé toutes ses idées, il voulut lui faire partager ses nouvelles croyances. Catherine était douée d'une trop grande fermeté de caractère pour abandonner facilement sa nouvelle religion: cependant elle consentit à se faire instruire pour plaire au roi. Elle se décida enfin à un mariage tardif. Les archives du château ont conservé les pactes de mariage d'entre haut et puissant prince Henry duc de Lorraine, et Madame Catherine, princesse de France et de Navarre, sœur unique du roi, 1598. C'est le 31 janvier 1599 que le mariage fut célébré. En 1604, Catherine, qui n'avait pas revu sa ville de Pau, mourut à l'âge de 46 ans, précédant de six années son frère dans la tombe.» (Page 167. – Le renvoi porte XVIII par erreur.)

XXIV

Nous avons plusieurs fois mentionné, dans notre récit, les diverses négociations du roi de Navarre avec les souverains étrangers. Des détails complémentaires au sujet de ces négociations peuvent offrir quelque intérêt.

Lors du voyage de Ségur à Londres, au mois de juillet 1583, il s'agissait pour Henri, non seulement de travailler, avec les princes protestants, à la création d'une ligue défensive et offensive54, mais encore d'élaborer un projet de mariage entre Catherine de Bourbon, sa sœur, et Jacques, fils de Marie Stuart, déjà reconnu comme roi d'Ecosse, et à qui devait revenir la couronne d'Angleterre après la mort d'Elisabeth. Ce projet parut avoir, pendant longtemps, des chances d'aboutir, comme on en peut juger par la correspondance de Henri.

Catherine refusa Jacques. «Pour celui-là, disait-elle plus tard à Sully, j'avoue que je fus si sotte, à cause de quelques fantaisies que j'avais lors en tête, que je n'y voulus point entendre.»

En 1585, les Guises, Catherine de Médicis et le roi de Navarre engagèrent une triple négociation auprès des cantons catholiques suisses. M. L. Combes, professeur d'histoire à la Faculté des Lettres de Bordeaux, a publié en 1879, dans les Annales de cette Faculté, les lettres écrites, à ce sujet, par la Maison de Lorraine, par la reine-mère et par Henri. «Les Suisses, dit-il, valaient à eux seuls une armée, avec leur solidité, leur bravoure, leur fidélité.»

Voici l'expression caractéristique de la lettre du roi de Navarre aux cantons, en date du 10 juin 1585, lettre tirée, comme les autres, des archives de Lucerne:

«Messieurs, chacun peut juger par l'intérêt que j'avais au service de Sa Majesté, que je ne suis jamais entré dans les armes que pour ma juste défense et pour la protection d'une bonne et grande partie des sujets du roi, que je voyais livrés à une certaine ruine par l'établissement de ceux qui regardent plus la terre que les cieux, et qui n'avaient pas de moindres desseins que ceux dont nous voyons aujourd'hui les effets… – N'ai-je pas des catholiques avec moi, prêtres et religieux d'Agen? Ne sont-ils pas traités parfaitement bien, etc., etc.? Je vous témoigne ces choses devant les yeux, pour vous donner à entendre que cette crainte, qu'ils prétendent avoir, que je ne ruine la religion catholique si j'en avais les moyens, est trop éloignée de la raison de mes déportements passés, de l'âge florissant et du zèle du roi en sa religion, pour être vraie cause des émotions qu'ils font… – Les princes lorrains ont des liaisons avec l'Autriche… Ainsi cela vous regarde; votre secours ne servira que de planche à faire passer ambitions et convoitises de ceux qui ont toujours assailli votre liberté et qui ont toujours été tenus en bride par le contre-poids et la grandeur de la France.»

C'est surtout à partir de l'année 1585 que se multiplient les négociations du roi de Navarre avec les souverains étrangers.

Le 8 mai 1585, Henri écrit à Walsingham, premier secrétaire d'Angleterre, pour lui recommander M. de Ségur, chargé de solliciter des secours de la reine.

Le 9 juin, M. de Ségur écrivait à Walsingham: «Il est temps que la reine nous témoigne sa bonne volonté. Si par autre moyen nous pouvions retenir la rage des ligueurs, on ne l'eût importunée. Nous avons cru et croyons qu'elle a soin de la conservation de ce prince et de la nôtre, et pour ce, librement nous nous adressons à S. M., à laquelle, s'il vous plaît, vous ferez voir un mémoire que j'envoie. Il contient, par le menu, le nombre d'Allemands et Suisses desquels nous avons besoin, et l'argent qui nous est nécessaire pour les lever et amener en France… C'est peu que deux cent mille écus à S. M.: le roi de Navarre a moyen de lui rendre et de lui faire mille fois plus de services. Je vous supplie qu'on se résolve bientôt à nous aider et qu'on me donne moyen de passer bientôt en Allemagne publier la bonté de la reine et chercher moyen de nuire à nos ennemis. Je vous envoie le nombre des forces du roi et des Guises.» Le mémoire de la reine, dont parle Ségur, se terminait ainsi: «Les affaires de la chrétienté sont aujourd'hui en tel point qu'elles vont par heures et par minutes, au lieu qu'elles coulaient ci-devant par ans et par mois».

 

Le 13 octobre de cette même année, Walsingham écrivait à Ségur, alors en Allemagne, que, sans vouloir abandonner la cause du roi de Navarre et de ses amis, la reine Elisabeth, voyant les hésitations des princes allemands, avait résolu d'ajourner son intervention. Les princes agissant, elle agira. Elle promet, le cas échéant, «la somme de cent mille écus, qui est beaucoup pour elle, attendu les grands frais qu'elle fait et sera contrainte de faire ailleurs…»

M. de Ségur écrit d'Allemagne, le 4 novembre 1585, au roi de Navarre, qu'il a déjà vu le duc Casimir, très dévoué à la cause et prêt à agir; que le duc de Luxembourg s'offre avec 6,000 chevaux et 4 régiments de lansquenets; que beaucoup d'autres princes font des propositions analogues; mais l'argent anglais manquant, il faut temporiser. De son côté, M. de Clervaux s'ingénie auprès des Suisses. En somme, Ségur a bon espoir et ne doute pas du succès définitif. Mais toute cette grave affaire allait bien lentement. Elle n'était pas encore conclue, lorsque s'ouvrit la grande crise de 1587.

La correspondance politique et religieuse entre le roi de Navarre et les princes protestants se poursuivait même à travers les événements si tragiques et si compliqués des années 1587, 1588 et 1589.

Dès l'année 1585, les princes d'Allemagne lui avaient fait remettre, par M. de Ségur-Pardaillan, un livre portant le titre de Concorde (Concordiæ liber)… Il n'y répondit qu'au mois de février 1589, et donna à entendre, ce qui était vrai, que les calvinistes français ne pouvaient s'accommoder, sans de nombreuses restrictions, de ce symbole de foi, auquel la plupart des docteurs de la Réforme en France refusèrent finalement leur adhésion. (Pages 173-189-193.)

54Ce fut en ces circonstances que commença, entre le roi de Navarre – ou plutôt Du Plessis-Mornay – et les princes protestants, une très longue correspondance latine. On la trouve dans un livre publié à Utrecht en 1679 sous un titre dont voici les premiers mots: «Henrici, Navarrorum regis epistolæ».