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Recherches nouvelles sur l'histoire ancienne, tome I

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§ XI.
Chronologie des Arabes homérites, favorable au plan d'Hérodote

Le lecteur se rappelle que Ktésias, dans son fragment sur les Assyriens, nous a parlé d'un roi de l'Arabie, nommé Ariœus ou Araïos, que Ninus s'associa, afin de pouvoir disposer des vaillants guerriers dont tout ce pays était alors rempli. Jusqu'à nos jours on n'a pas connu quel fut ce roi, ni même dans quelle Arabie il régna. En parcourant les fragments historiques que les Arabes nous ont conservés de leurs antiquités, et qui ont été traduits par les savants Richard Pocoke315 et Albert Schultens316, il nous a semblé reconnaître les actions et même le nom de ce personnage dans l'un des rois de l'ancienne Arabie heureuse, aujourd'hui Iémen, pays dont les écrivains grecs et romains parlent souvent comme du siège d'une nation puissante, mais dont ils n'ont jamais eu des notions bien claires, vu le grand éloignement. Nos modernes eux-mêmes n'étaient guère plus instruits sur le sujet qui nous occupe, avant que M. A. Schultens eût rassemblé et publié, dans son curieux livre de l'Ancien empire des Iectanides, tout ce qu'Aboulfeda, et quatre autres historiens arabes ont eux-mêmes recueilli de traditions et de documents sur l'antique royaume de Himiar, ou des Homérites dans l'Iémen. Malheureusement, après avoir lu les cinq fragments dont nous parlons, on s'aperçoit qu'ils ont subi de graves altérations de la part des musulmans, qui, les premiers, se donnèrent la peine d'extraire les chroniques de ces infidèles; et même l'on sent que ces chroniques ont été, en original, incomplètes et tronquées; mais l'on n'en est pas moins conduit à croire qu'elles ont existé, et que leurs débris, tels qu'ils nous sont parvenus, ont une authenticité égale à celle de la plupart des livres des Grecs et des Latins. Or, il résulte de ces débris:

1° Que sous le nom d'Arabes, enfants d'Himiar, il a existé dans l'Arabia felix, ou Iémen, bien au-delà de six cents ans avant le siècle de David et de Salomon, un peuple civilisé et puissant connu des Grecs à une époque déjà tardive, sous le nom d'Homérites ou de Sabéens;

2° Que ce peuple eut un gouvernement régulier, et une série de rois dont l'origine se perd dans la plus haute antiquité;

3° Que l'ordre de succession fut très-souvent interrompu, tantôt par des guerres civiles, dues au pernicieux usage des rois asiatiques, de partager leurs états entre leurs enfants; tantôt par des guerres avec les Éthiopiens-Abissins, qui avaient les mêmes mœurs et la même langue;

4° Que ces rois, habituellement maîtres de l'Iémen proprement dit, le furent souvent encore du pays de Hadramaut et d'autres cantons limitrophes, et qu'ils eurent un état au moins six fois plus considérable que celui des Hébreux, avant le schisme de Samarie;


5° Que la résidence première et habituelle de ces rois fut la ville de Mareb, appelée aussi Saba, c'est-à-dire la victorieuse, du nom d'un ancien roi appelé Abd-el-chems (serviteur du soleil), qui fut ensuite surnommé Saba, c'est-à-dire vainqueur, parce qu'il amena une foule de captifs317liés, dont il se servit pour exécuter de grands ouvrages, entre autres la chaussée ou digue du lac de Mareb;

6° Enfin, que long-temps avant les rois des Hébreux, ceux de l'Iémen avaient fait des expéditions lointaines, tantôt à l'ouest de la mer Rouge, par l'intérieur de l'Afrique, vers Tombout et jusqu'à Maroc; tantôt au nord, jusqu'aux portes Caspiennes, et d'autres fois jusqu'à l'Inde.

Malheureusement, dans leurs récits vagues et souvent contradictoires sur la succession de ces rois arabes, nos compilateurs musulmans ne nous donnent qu'une seule date connue, qui devient notre point d'appui unique pour tous les calculs précis ou probables que l'on peut dresser.

«Cette date est le règne de Balqis, fille de Had-had, fils d'Amrou, fils de Cherâhil, laquelle ayant succédé à son père, par un cas qui a d'autres exemples en ces contrées, devint, après 20 ans de règne, épouse de Salomon (selon Hamza), et le suivit en Palestine. Les Homérites prétendent qu'elle se bâtit un palais à Mareb, et qu'elle construisit la digue célèbre du lac de cette ville; mais le reste des Iémenais assure que depuis long-temps la digue était construite, et que Balqis ne fit que la réparer.»

En partant de cette époque connue, nous pouvons dire que Balqis commença de régner vers l'an 1030 (puisque Salomon commença de régner l'an 1018): son père Had-had avait régné, avant elle, 20 ans selon les uns, 75 ans selon les autres.

A cette occasion nous ferons deux remarques indispensables; l'une, que les auteurs de M. Schultens varient tellement sur la durée des règnes, quand ils la donnent, que l'on ne peut en tenir aucun compte.

L'autre, qu'à plusieurs rois antérieurs à Belqis ils donnent des règnes de 120 et 125, des âges de 300 et de 400 ans, qui ont de l'analogie avec les récits des Hébreux au temps de Moïse et des Juges, et qui autorisent et confirment les idées que nous avons développées sur la valeur des années au-dessous de douze mois, (Voyez 1re partie).

Nos auteurs ne s'accordent pas sur la généalogie de Had-had. L'un le fait fils immédiat de Cherâhil; d'autres, son petit-fils, par Amrou. Ces confusions sont faciles chez les Arabes, vu la répétition des mêmes noms dans les familles. Aboul-feda fait observer que Cherâhil n'était point fils de roi, mais qu'il fut élu par le peuple, las des guerres que ces rois ne cessaient de faire en Afrique. L'on cite deux circonstances de ces guerres qui deviennent un garant de leur réalité.

La première est que le prince homérite, prédécesseur de Cherâhil, fut surnommé le seigneur des monstres ou des terreurs (Zou-l-Azâar), parce qu'il amena de la Libye des prisonniers d'une race d'hommes petits et hideux, ayant la tête comme enfoncée dans la poitrine. Or, cette même, race d'hommes reparaît dans l'histoire des Grecs et des Romains, qui les appellent Blemmyes, et leur aspect causa la même impression d'horreur dans Rome, lorsqu'ils y furent traînés en triomphe.

La seconde est qu'un autre prince antérieur fut surnommé Zou-l-Minar, seigneur des phares, parce que dans une expédition au pays des Nègres, il fit dresser des tours garnies de lanternes, afin de retrouver sa route à travers l'océan des Sables.

Un troisième prince, après avoir envoyé dans ce désert plusieurs détachements, qui périrent tous, fit élever sur la frontière des Sables une colonne munie d'une inscription explicative.

Ces expéditions répétées de plusieurs rois successifs, indiquent des motifs puissants de curiosité ou d'ambition, soit pour arriver à quelque pays riche, tel que Tombouctou, soit pour pénétrer jusqu'à l'Océan, dont ils auraient eu connaissance par les caravanes, ou jusqu'à la Méditerranée, vers les lieux où bientôt après s'éleva Carthage, et où déjà florissaient peut-être plusieurs colonies phéniciennes: ce sont autant d'indications d'un commerce déjà ancien, sur l'histoire duquel le savant professeur Heeren318 nous a donné des idées neuves et lumineuses, qui nous expliquent la prospérité de ces contrées à des époques inconnues.

Quant à la série ascendante de ces rois, elle continue d'être confuse; car au-dessus de Cherâhil, Aboul-feda compte en remontant,

1° Amrou Dou-l-Azaâr; 2° son frère Afriqos, fils 3° d'Abraha-zou-el-Minar, fils 4° d'El-Sab-Zoul-Qarnain, fils 5° de Haret Arraïés.

 

Hamza, au contraire, supprime el Sâb; prétend qu'Abraha régna 183 ans, Afriqos 164, et Zoûl-Azaâr 25; tandis que, selon Nouèïri, le successeur de Haret fut Hàïar, fils de Galeb, fils de Zeid, lequel Hàïar régna 120 ans: selon Ebn Hamdoun, le successeur d'Afriqos aurait été son fils El-Faï-der Zou-Chanâtir, qui alla en Irâq (Babylonie), et y périt.

Mais tous ces auteurs s'accordent sur Haret-Arraïès, comme ayant été le prince le plus remarquable par ses grandes actions.

«A son avènement (dit Hamza), l'Iémen était partagé en deux états, celui de Saba et celui de Hadramaut. Haret les réunit par conquête. Avant lui, les Iémenais n'avaient point été rassemblés en un seul corps de nation (excepté au temps de Homeir). Ce fut à Haret qu'ils se réunirent tous; ce fut lui qu'ils suivirent tous; d'où lui vint le surnom de Tobba (celui qui se fait suivre), surnom qui ensuite devint le titre spécial de tous ses successeurs. Après avoir soumis l'Iémen, il entreprit de grandes expéditions qui s'étendirent jusqu'au Hend (l'Indus): il vainquit les Turks dans l'Aderbidjan, en une bataille très meurtrière; il en amena une quantité d'enfants en esclavage, et rapporta en Iémen un butin d'une richesse immense; de là lui fut donné le surnom d'Arraïés, celui qui enrichit (mot à mot, qui couvre de plumes, sans doute parce que la plume d'autruche fut chez ces peuples le signe de l'opulence).»

Maintenant comparons ces détails à ceux de Ktésias.

Ninus s'associe au roi d'Arabie. Les historiens de cette contrée assurent qu'il n'y eut point d'autres rois des Arabes que ceux de l'Iémen. Ce roi d'Arabie s'appelait Ariaios ou Araios. Haret a le surnom d'ArraïésAriaïos accompagna Ninus contre Pharnus, roi des Mèdes. Arraïés livra une bataille terrible dans l'Aderbidjan, qui est la Médie propre et originelle; il la livra aux Turks, c'est-à-dire à des hommes de teint blanc, tels que sont les montagnards de cette contrée, que les auteurs arabes et persans ont appelés Turks, parce que n'ayant aucune idée des anciens Mèdes, ils ont cru que le pays avait toujours été habité par des Turkmans, comme de leur temps. Arraïés poussa jusqu'à l'Indus.—Selon Ktésias, Ninus y alla aussi. Arraïés importa un butin immense. Ninus combla Ariaïos des plus riches dépouilles. Avec tant de traits d'une si parfaite ressemblance, l'on ne saurait douter que l'Arabe Haret-Arraïés ne soit l'Ariaïos de Ktésias et de Ninus, et nous en verrons une dernière preuve complémentaire dans les traditions perses sur la dynastie Pichedâd. Objectera-t-on que l'intervalle entre Haret et Balqis n'est point rempli d'un nombre suffisant de générations? En effet, les auteurs ne comptent que cinq ou six princes pour 200 ans: mais de Balqis à Alexandre ils n'en comptent que sept, dans environ 670 ans. Il est évident (eux-mêmes s'en plaignent et nous en avertissent) que toutes ces successions sont fracturées et incomplètes, comme le sont aussi les dynasties perses de Kéïan et de Pichedâd, ainsi que nous le verrons. Peut-être est-ce pour combler leurs lacunes, que quelque ancien chronologiste a porté le règne d'Arraïés à 125 ans, selon Nouèïri; à 150 selon Hamza; et les règnes d'Abraha et d'Afriqos, ses successeurs, l'un à 164, l'autre à 183, etc.; nombres absurdes, dont les véritables causes d'erreur sont désormais ignorées. Nous n'avons que des fragments, et il doit nous suffire d'y trouver les principales convenances observées. C'en est une de voir Haret placé au moins cinq ou six règnes avant Balqis, surtout lorsque les récits décousus et mutilés des auteurs nous laissent apercevoir qu'il y eut des troubles civils et des changements de dynastie. Par inverse de l'objection citée, nous devons dire qu'ayant reconnu l'identité de personnage, nous avons en main les moyens de rectifier ces monuments, et d'apprécier leurs erreurs. Enfin nous verrons dans les traditions perses, qu'en comparant les époques respectives des trois Tobbas, surnommés premier, dernier et du milieu, l'identité de Haret et de Ariaïos se trouve encore confirmée.

Alors que Haret fut contemporain de Ninus, son règne en Arabie dut commencer vers 1240; parce qu'avant d'être appelé par Ninus, il lui fallut un laps de temps pour subjuguer l'Iémen, et en joindre les diverses principautés à celle de Hadramaut, qui fut son premier domaine. Ici nous obtenons un moyen de classer un autre événement remarquable, qui nous est cité par les auteurs de M. Schultens:

«Ils nous disent que quinze pères, c'est-à-dire quinze générations avant Haret, avait vécu et régné Homeir, fils de Saba, qui, le premier de la race de Qahtan (Ieqtan), régna sur tout l'Iémen (Hamza). Il était fils de Saba-abd-el-chems, et il chassa les Arabes Temoûd de l'Iémen dans l'Hedjaz (Aboulfeda).

«Ce fut le plus habile cavalier et le plus bel homme de son temps: son nom de Homeir (rouge) lui vint de ce qu'il était toujours vêtu de cette couleur. Il fut le premier qui posa sur sa tête une couronne d'or; il régna 50 ans (Nouèïri).»

Si nous appliquons à ces quinze pères ou générations notre terme moyen de 27 ans, nous avons 405 ans plus 1240, égale 1645 ans: c'est-à-dire que Homeir aurait vécu vers 1650 ans avant notre ère. Notre auteur (Nouèïri) ajoute qu'il fut contemporain de Qaïder, fils d'Ismaël, fils d'Abraham, ce qui dans le système juif, veut dire le 19e siècle avant notre ère. Voilà donc les Arabes de l'Iémen ayant des rois et un état social déjà ancien, plus de 600 ans avant le petit peuple hébreu; et cependant ce n'est pas à beaucoup près l'époque de leur origine.

Mais, pour revenir à Ninus, comment se fait-il que ce roi des Assyriens, vivant à Kélané ou Télané319, au pays de Sennar en Mésopotamie, par le 36 ½ degré, ait eu l'idée de rechercher l'alliance d'un roi des Arabes vivant à Mareb-Saba, dans l'Arabia felix par le 12° de latitude, à la distance de près de 500 lieues, à travers les déserts du Nadjd?

Au premier coup d'œil ce fait semble élever une grande difficulté; mais elle se résout très-plausiblement par diverses circonstances que nous fournissent les monuments des anciens Arabes.

Ces monuments nous ont déjà dit (Voyez ci-devant, article des Juifs), «que les plus anciens habitants de l'Arabie furent les tribus d'Aâd, de Tamoud, de Tasm et de Djodaï; qu'Aád habita Hadramaut; Tamoud le Hedjaz et le Téhama; Tasm le Haouas à l'est du Tigre et le midi de la Perse; Djoudaï le pays de Hou, qui est le Iémama et que ces anciennes nations avaient soumis et possédé l'Iraq (qui est la Babylonie).»

Ce serait donc celles-là même que Ninus y aurait trouvées; soit qu'elles s'y fussent réfugiées 400 ans auparavant, à l'époque des guerres de Saba, soit qu'elles s'y fussent établies dès avant cette époque, comme il est probable.

Maintenant si, selon ces mêmes traditions, Haret fut un descendant de Saba le Homérite, il fut un Arabe de race ieqtanide, et par conséquent l'ennemi de sang des quatre anciennes tribus kushites, et nous voyons à la fois pourquoi il chassa de l'Iémen celle de Tamoud, et pourquoi il se lia d'amitié avec l'Assyrien Ninus, ennemi politique des quatre tribus.

Il est vrai que selon Aboulfeda, Haret comptait au nombre de ses ancêtres un prince aâdite appelé Shedâd; mais outre qu'Aboulfeda ou ses auteurs peuvent être en erreur, cette circonstance ne changerait rien au fond des faits, parce que des pacifications ont pu occasioner de telles alliances, comme il se pratique même encore chez les Arabes.

D'ailleurs n'oublions pas que, selon les traditions conservées par Helqiah, les Assyriens et les peuples de l'Iémen durent se considérer comme parents, puisqu'ils reportaient également leur origine à Sem, fils de Nouh; et cette parenté semble trouver son appui dans les faits suivants:

1° Leur langage était construit sur les mêmes principes de grammaire et de syntaxe.

2° Le mot ashour (assyrien) se traduit littéralement par les mots latins felix, dives, heureux et riche… Or, l'Iémen n'a pas d'autre nom que celui d'Arabie heureuse chez les anciens Latins et Grecs qui n'ont dû être que les traducteurs des Orientaux: l'Iémen était une Assyrie.

3° Enfin il semble que les lettres alphabétiques furent les mêmes chez les Assyriens et chez les anciens Arabes de l'Iémen: les Arabes modernes, qui depuis le siècle de Mahomet seulement ont adopté l'alphabet syrien, nous apprennent qu'avant cette époque, les autres Arabes, et spécialement ceux de l'Iémen, avaient un système alphabétique totalement différent.

«Nos lettres arabes (disent-ils) s'écrivent de droite à gauche. Celles des Hémiarites (Homérites) s'écrivent de gauche à droite (comme le grec et l'éthiopien): elles sont liées (entre elles) comme les lettres éthiopiennes. On les appelle Mosnad, ou appuyées, ce qui se dit aussi de plusieurs autres lettres anciennes, inconnues320.

«Il y a douze espèces d'écritures, dit Maula-ebn-Kair; savoir: l'arabique, l'hémiarite, la grecque, la persane, la syrienne, l'hébraïque, la romaine, la copte, la berbère, l'andalouse, l'indienne et la chinoise.»

Dans cette énumération nous pouvons désigner toutes les espèces, excepté l'hémiarite: par berbère il faut entendre l'éthiopien dont Ludolf nous a donné le dictionnaire. L'écriture persane est le zend, que nous ont fait connaître Hyde et Anquetil; l'indienne est le sanscrit; l'andalouse est l'écriture appelée par Velazquez caractères inconnus des anciens espagnols. L'hémiarite reste donc la seule qui n'aurait pas de type connu; mais puisque dans ce tableau nous ne voyons pas l'écriture à clous tracée sur les ruines de Persépolis et sur les briques des murs de fondation de l'ancienne Babylone, n'est-ce pas une raison de penser que cette écriture à clous doit être l'hémiarite? On convient que ces murs et ces briques doivent leur origine à l'Assyrienne Sémiramis; par conséquent ils sont les caractères dont usaient les Assyriens, ces lettres qu'Hérodote appelle lettres assyriennes, analogues aux caractères de Persépolis, mais plus compliqués: or, si à l'époque de Nabukodonosor et de Nabonasar, c'est-à-dire lorsque la race indigène des Chaldéens eut recouvré son indépendance nationale, l'écriture alphabétique des Babyloniens était ce que nous appelons la chaldaïque, analogue à celle des Syriens et des Phéniciens, n'avons-nous pas droit de conclure que les Assyriens et les Homérites, à titre d'enfants de Sem, eurent un système de lettres commun et identique, de même que les Phéniciens et les Arabes Chaldéens, à titre d'enfants de Kush, en eurent aussi un commun, mais différent des précédents, dont ils étaient les ennemis? Pour obtenir la démonstration de cette hypothèse, il nous faudrait la découverte de quelque ancien monument arabe à Mareb, ou en d'autres villes de l'Arabie heureuse321.

 

Quant à l'écriture à clous considérée en elle-même, c'est une autre énigme qui n'a pas encore trouvé son Œdipe322. Voyons si en prenant toujours Hérodote pour guide, nous serons plus heureux vis-à-vis de deux sphinx chronologiques, qui jusqu'à ce jour ont fait le désespoir de nos devanciers.

315Specimen Historiæ Arabum
316Historia imperii vetustissimi Iectanidarum in Arabia felice. In-4°, Harderovici Gueldrorum, 1786.
317Le latin observe la même analogie de mots et d'idées car vincere (vaincre) n'est qu'une modification de vincire, lier, vinctus, victus, vinctor, victor. L'historien Hamza déclare que l'étymologie de Saba l'embarrasse; mais, elle est exacte dans l'hébreu, ou sabah (shabah) signifie emmener captif. Ainsi l'antique homérite était analogue à l'hébreu, et nous en verrons un autre exemple dans les noms de Zohák.
318Idées sur les relations politiques et commerciales des anciens peuples de l'Afrique, en allemand; par A. H. L. Heeren, professeur de philosophie à Gœttingue, etc., l'un des meilleurs livres historiques publiés de nos jours, dont nous n'avons qu'une traduction bien incomplète publiée en l'an VIII (1800).
319Voyez Étienne de Byzance, qui écrit Télané, probablement par l'altération de K en T, ou parce que les Syriens ont prononcé le ké, tché, comme les Arabes.
320Voyez un Mémoire très-approfondi de M. de Sacy, sur la littérature des Arabes et sur les monuments, tome XLVIII des Mémoires de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, pages 247 et suivantes.
321Une maladie grave empêcha l'estimable Niebuhr d'avoir une copie qu'on lui disait prise sur une ancienne inscription; mais la main de qui il l'eût tenue, nous eût laissé des doutes légitimes.
322On a cru un instant que M. Grotefend avait eu ce bonheur; mais son explication n'a pas eu de suites, et elle ne devait pas en avoir, car elle est fondée sur deux mots dont nous croyons l'orthographe très-vicieuse. M. Grotefend dit que Darios devait être écrit Darheusch, et Xerces, Khsch-h-er-Sché: il est très-probable que le Xerces des Grecs n'a point eu pour type un mot si compliqué, et qu'il est seulement la double syllabe shir shah qui, en persan moderne, signifie le lion-roi; et tout l'édifice s'écroule. Espérons que les planches d'airain trouvées à Cochin par les missionnaires anglais, et sur lesquelles ont été gravés au 3e ou 4e siècle, en lettres à clous, des privilèges accordés aux juifs ou aux chrétiens, nous donneront une clef plus heureuse. Voyez sur cette matière une savante et judicieuse lettre de M. de Sacy, dans le Magasin encyclopédique, année 8, page 438; et pour les lettres hémiarites, voyez le mémoire du même savant, tome XLVIII de l'Académie des Inscriptions.