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La maison d'un artiste, Tome 2

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Madame Louise-Marie de France, «née à Versailles, le 13 juillet 1737, religieuse carmélite sous le nom de Ste-Thérèse de St-Augustin au couvent de St-Denis en 1770». – Dessinée par Queverdo, gravée par Le Beau. – C'est la cinquième fille de Louis XV, connue sous le nom de Madame Louise, et qui en 1772, du fond de son parloir, fut au moment de faire renvoyer Mme du Barry. Assise sur une chaise de bois, un livre de prières à la main, il sort de l'embéguinement de la carmélite, un gros nez et deux yeux très vivants.

Sophie le Couteulx du Moley. – Dessinée par Cochin, gravée par Augustin de Saint-Aubin en 1776. – La financière, aux lundis où l'on ne recevait que des hommes à dentelles, l'inspiratrice des Jardins de l'abbé Delille, dont une partie du poème a été écrite sur les patrons de broderie de la châtelaine, est encore séduisante en ce portrait qui n'est plus celui de sa première jeunesse. Un autre portrait beaucoup plus rare, dessiné également par Cochin et gravé par Nicolet, alors qu'elle n'était qu'une simple chanteuse, nous donne, en toute leur fraîcheur, ses petits et mignards traits, dans un médaillon entouré de muses et d'amours jouant d'instruments, au son desquels sa voix se faisait entendre: un charmant cul-de-lampe qui a été fait pour «six sonates», avec accompagnement de forte-piano.

Sophie (de Monnier). – Dessinée par Borel, gravée par Delignon. La maîtresse de Mirabeau sur une toile, dont un amour soulève la draperie, dans son voluptueux arrangement à l'antique, avec le bandeau qui court dans ses cheveux frisés, et avec ses petits traits charnus en sa figure rondelette, prend l'aspect d'un Cupidon joufflu.

«Docile enfant de la nature.» (Portrait de la Morency.) – Dessinée et gravée par Canu. – La femme galante de la Révolution, la romancière, est représentée en tête de son roman «d'Illyrine» avec une vraie figure d'oiseau, sous la broussaille de cheveux désordonnés, et vêtue, pour ainsi dire, d'un corset et d'un boa.

Un autre portrait de la Morency, qui décore les «Étrennes aux Dames, 1808», dessiné par Roy et gravé par Bonvallet, nous montre le costume, la coiffure, les traits mêmes de la bacchante, tranquillisés et apaisés: de petits traits à la sèche et nerveuse découpure.

Madame DE*** en habit de bal (Mme de Mouchy, d'après la liste générale et alphabétique des portraits gravés par le P. Lelong). – Peinte au pastel par Coypel, gravée par Surugue en 1746. – Assise de côté sur une chaise, la tête de face et un peu inclinée en avant, les bras mollement croisés, elle tient du bout des doigts d'une main, un masque du temps qui n'est pas un loup, mais un masque de tout le visage. De sa coiffure basse, où s'élève sur le côté un petit pouf de plume noire, descend, de derrière son épaule, une longue natte, qui lui tombe sur la poitrine, et dont les cheveux tordus sont entremêlés de grosses perles; à ses oreilles pendent d'énormes pendeloques; et le satin blanc de son habit de cour ouvert est garni d'un large soutachement brodé, se terminant par des glands floches.

Marie-Antoinette de Rosset de Fleury, vicomtesse de Narbonne-Pelet, née à Narbonne, le 6 avril 1721, morte au château de Fontanès en Languedoc, le 27 juillet 1754. – Peinte par Lattinville, gravée par Daullé en 1756. – La morte «charmante et accomplie, douée de toutes les vertus, ornée des plus rares qualités de l'esprit et du cœur, à qui Rome païenne et la Grèce savante eussent dressé des autels… que la Religion chrétienne et la voix des peuples canonisent», est représentée dans l'estampe, qui dit tant de bien d'elle, en vestale de la Régence, déposant une urne enflammée sur un autel.

Madame Necker. – Gravée par Lips. – De chastes épaules voilées d'un fichu de gaze, où court le zigzag d'un ruban de satin blanc, des yeux pleins d'une ingénuité charmante, de petits traits tiraillés, joliment souffreteux, presque angoisseux, et racontant l'état nerveux de la délicate agitée, qui avait perdu le sommeil, et qui, toujours debout, ne pouvait demeurer assise.

Marie Ange Bernd de Rasoir, barone de Noyelle, dame et vicomtesse héréditaire du pays de Langle, dame de Cherens, Briatre, le Hove Rasoir. – Peinte par de Pasche, peintre du roi de Danemarck, gravée par Gaucher en 1781. – Une femme d'un certain âge, à la figure cabossée, aux prunelles de velours noir dans des carnations blondes. Sous un encrier est une lettre portant pour souscription: «A mon fils l'abbé Carondelet, en Sorbonne

Élisabeth-Charlotte, Palatine du Rhin, duchesse d'Orléans. – Peinte par Rigaud, gravée par Marie Horthemels. – La mère du Régent, l'Allemande «à la figure et au rustre d'un Suisse», dit Saint-Simon, étale sa large face, son sourire scatologique, ses fanons mollasses, dans l'hermine d'un manteau brodé de fleurs de lis, une plantureuse main posée sur une couronne.

Louise-Henriette de Bourbon-Conty, duchesse d'Orléans, née à Paris le 20 juin 1726. – Peinte par Pottier, gravée par Petit. – La belle et galante princesse, mère de Philippe-Égalité, et à laquelle «le Palais-Royal», publié à Hambourg en 1806, donne pour premier amant le peintre Boucher, dans une séance où le modèle posait en déshabillé mythologique, n'a rien dans ce portrait des grands yeux vifs et du petit nez polisson du portrait de la suite de Desrochers, où en son décolletage, coupé par une guirlande de roses, elle ressemble à une humaine divinité d'Opéra.

La duchesse d'Orléans serait aussi anonymement peinte avec un nez busqué, qui n'existe en aucun de ses autres portraits, dans la composition de Nattier gravée par Hubert et qui a pour titre Mme la duchesse de *** en Hébé.

«Sous le riant aspect de Flore.» (Portrait de Mme de Parabère désignée seulement par des vers qui célèbrent la blancheur de son teint: «le beau morceau de chair fraîche» qu'elle était, selon l'expression de la princesse palatine). – Peinte par Rigaud, gravée par Vallée. – La maîtresse du Régent, son petit Corbeau noir ainsi qu'il l'appelait, est représentée cueillant une tige d'œillet, dans une campagne éclairée par un soleil levant, et où un négrillon lui tend une corbeille de fleurs. De la délicatesse ciselée de ses traits, de la nature frêle de la grande dame galante aux nerfs d'acier pour le plaisir et l'orgie, Vallée n'a rien conservé, ainsi que l'établit la comparaison de sa gravure avec la peinture originale de Rigaud, conservée au château de Boran chez Mme de Parabère-Sancy.

Portrait de feu madame la duchesse de Polignac. – Fait de mémoire par Mme Lebrun, gravé à Vienne par Fisher en 1794. – De grands yeux bleus profonds et expressifs, un petit nez terminé par un méplat moqueur, une bouche ravissamment découpée et entr'ouverte sur de petites dents blanches d'enfant: ainsi apparaît Mme de Polignac, coiffée de ses touffus cheveux bruns aux petites boucles folles, sous un bonnet de linge ruché, attaché sous le menton, les épaules et la poitrine couvertes d'un grand fichu menteur, noué à la petite fille derrière le dos.

La Belle Jardinière. Portrait de Mme la marquise de Pompadour. – Peint par Vanloo, gravé par Anselin. – Le portrait officiel de la vraie reine de France, de 1750 à 1764, de la femme «à la beauté sans traits», selon l'expression du temps, mais faite d'un sourire tout à elle, du blanc éblouissant de sa peau de lymphatique, du charme mystérieux de ses yeux qui n'étaient ni noirs, ni bleus, ni gris, et qui avaient la finesse des yeux gris, la langueur tendre des yeux bleus, l'éclat des yeux noirs. A ce portrait qui est chez moi avant la lettre, avec des travaux manquant sur la chemisette, à l'ovale grassouillet de Vanloo, je préfère le petit profil de Cochin, gravé par Augustin de Saint-Aubin en 1764, et reproduisant la favorite, le chignon lâche et les cheveux crêpés en accommodage du matin, et les ruches d'un manteau de lit jouant autour de sa gorge. C'est le portrait qui donne le mieux l'idée de la grâce spirituelle de la physionomie de Mme de Pompadour et du «sourire délicieux» dont parle Leroy, le lieutenant des chasses de Versailles.

On veut encore voir une Mme de Pompadour dans «la Jardinière» gravée en manière de pastel par Bonnet. Ce n'est pas impossible, mais c'est une Pompadour bien peu déniaisée. Disons toutefois que cette planche est une merveille d'exécution et d'un art tout à fait perdu, et que le velouté, le plucheux des crayons de pastel, y est imité à passer le doigt dessus pour s'assurer si c'est vraiment de la gravure. Le malheur, qu'avec un procédé pareil, Bonnet n'ait pas choisi, pour ses reproductions, des peintures plus sérieuses! Songe-t-on ce que serait une collection des préparations de La Tour ainsi exécutées?

Je ne veux pas abandonner Mme de Pompadour sans parler d'une petite estampe qu'il faut joindre à ses portraits: l'estampe dessinée et gravée par Cochin sur un bruit de la convalescence de la favorite pendant sa dernière maladie, et abandonnée sur la nouvelle de sa mort. C'est un cartel représentant, sous un soleil voilé, les Muses de la peinture et de la Musique suppliantes, pendant que la Médecine arrête la Parque, au moment où elle va couper le fil de vie de la marquise, cartel que devait remplir cette chanson de Favart, faisant allusion à une éclipse de soleil, qui avait concordé avec la maladie de la Pompadour:

 
Le soleil est malade
Et Pompadour aussi.
Ce n'est qu'une passade,
L'un et l'autre est guéri.
 

«Sur votre belle main ce captif enchanté.» Portrait d'Agnès Berthelot de Pleneuf, marquise de Prie, d'après la liste générale et alphabétique des portraits gravés par le P. Lelong. – Peint par Vanloo, gravé par Chereau le jeune. – La maîtresse du duc de Bourbon, celle que d'Argenson appelait «la fleur des pois du siècle», est représentée, une perruche sur un doigt, avec ses yeux un peu chinois, mais vifs et gais, avec ce qu'on appelait alors «tous les je ne sais quoi qui enlèvent», avec ses cheveux cendrés, avec son air de nymphe éclairée par un clair de lune.

 

Marie-Joséphine-Louise de Savoie, comtesse de Provence, mariée à Versailles, le 14 mai 1771. – Peinte par Drouais, gravée par Cathelin. – Altière figure de Junon auvergnate aussi bien dans ce portrait que dans celui qui porte le nom de Madame, gravé par Marie Boizot d'après un dessin de Boizot.

Marie-Élisabeth Denis, femme de M. Radix. – Dessinée par Cochin, gravée par Augustin de Saint-Aubin en 1765. – Une belle vieille femme à l'œil noir, au nez aquilin, à la noble ligne d'un profil qui sort des barbes d'un bonnet de dentelles, serré dans une marmotte de soie noire.

«Dernière heure de la baronne de Rebecque, morte à trente-six ans.» – Gravée par Augustin de Saint-Aubin. – L'ardente et maladive ennemie des encyclopédistes, celle qui, mourante, dictait à Palissot sa comédie des «Philosophes», lui donnait l'idée de la scène capitale, est représentée sur son lit de mort, la tête posée sur un oreiller de dentelles, d'où sortent d'un bonnet de linon, enveloppé d'une calèche, la maigre figure de la femme, et ses grands yeux mystiques à la pupille rétractée.

Madame Récamier. – Gravée en manière de crayon par Charles Silesien. – La beauté du Directoire est habillée d'une de ces robes flottantes et collantes sur les formes, à la ceinture remontée sous les seins. Elle a la tête à demi cachée dans un voile transparent qu'elle relève, laissant voir un de ces longs et purs ovales à la Gérard: un portrait qui pourrait être aussi bien celui de Mlle Georges ou de Mme la baronne Regnault Saint-Jean d'Angely.

M. J. Phlipon, Fme Roland. – Dessinée et gravée par Bonneville. – Un grand œil noir au regard hardi, un long nez de soubrette, une bouche aux coins remontants, un menton de volonté, telle est sous une coiffure aplatie et mangeant le front, et qui a l'air d'une perruque d'homme, le portrait que Bonneville nous donne de l'Égérie de la Gironde.

Qu'un timide artisan élève du scrupule. (Portrait de Mme de Sabran, d'après la liste générale et alphabétique des portraits gravés du P. Lelong et d'après l'indication du second état qui porte au lieu des vers: Louise-Charlotte de Foix-Rabat, marquise de Sabran.) – Peinte par Vanloo, gravée par Chereau le jeune. – Cette maîtresse du Régent qui se permettait de dire à son amant «que l'âme des princes lui paraissait faite d'une boue à part, de celle qui sert pour l'âme des laquais», est représentée en chemise tombante, d'où sortent une épaule et un sein, et tenant des deux mains, avec toutes sortes de tendresses, une colombe posée sur un coussin, pendant que, la tête détournée, elle regarde à la cantonade avec des yeux immenses et qui attendent.

Madame la marquise de Sabran, tirée du cabinet de Son Altesse royale Monseigneur le prince Henri de Prusse. – Peinte par Mme Vigée-Lebrun, gravée par Berger en 1787. – L'épistolaire dont on vient de publier de si adorables lettres, est assise sur un sofa, les bras croisés, les cheveux ébouriffés et frisés autour d'une tête à la physionomie toute pétillante d'intelligence et d'esprit. Elle est vêtue d'une robe de linon à la grande pèlerine enveloppant sa poitrine de son tuyautement lâche et de flots de linge, au milieu desquels sa taille se dessine avec les souplesses nonchalantes d'une taille de créole. La marquise de Sabran tenait au dix-huitième siècle un salon mi-politique, mi-littéraire, où M. de Ségur lisait son «Art de plaire», où M. de Boufflers cousait des scènes d'à-propos au «Bourgeois gentilhomme», quand la marquise donnait la comédie au prince Henri de Prusse, chez lequel elle se retira pendant la Révolution26.

L'Hommage réciproque. (Portrait de Mme Augustin de Saint-Aubin.) – Dessinée par Augustin de Saint-Aubin, gravée en noir et en couleur par Gaultier. – La belle et jolie femme qui a servi si souvent de modèle aux compositions amoureuses d'Augustin, l'adorable créature au moelleux profil, à l'œil noir et velouté par de longs cils, aux cheveux blonds frisotés, dont le chignon lâche à la Daphné tombe sur les épaules en grosses torsades, la femme à la voluptueuse gorge, apparaît dans la douce impression en couleur, ainsi que dans le rien rose de chair pâmée, que son mari met dans ses crayonnages. On la voit assise, le fichu tombé, et tenant dans une de ses mains un porte-crayon avec lequel elle dessine un portrait d'homme posé sur un chevalet. Et c'est sans doute un portrait d'elle encore, cette séduisante «Louisemilie, baronne de ***», et un portrait d'elle encore, cette coquette «Adrienne-Sophie marquise de ***» coiffée d'un chapeau noir à la mode, deux portraits qu'on donne généralement pour des portraits de Mme de Boufflers et de Luxembourg. Et ici mon opinion est confirmée par le souvenir d'avoir vu sur le dessin original d'un des deux portraits, vendus chez Renouard, et achetés, je crois, par M. de Janzé, le nom de Mme Augustin de Saint-Aubin écrit en bas. Disons que ces deux portraits, quels qu'ils soient, sont des bijoux, surtout lorsqu'ils sont avant l'adresse et avec le nom du graveur à la pointe; et ajoutons que les deux eaux-fortes de ces portraits, que j'ai eu la bonne fortune de trouver dans le temps chez Sieurin, sont rarissimes, et n'existent pas dans l'œuvre d'Augustin de Saint-Aubin du Cabinet des estampes27.

«L'innocence reconnue de Marie-Françoise-Victoire Salmon.» Portrait en couleur chez les Campions frères.

DÉDIÉ AUX AMES SENSIBLES ET BIENFAISANTES
 
Un cœur généreux fut touché de mes peines,
Aux pieds du trône il porta la voix;
Un monarque juste brisa mes chaînes,
Et mon innocence triompha par le Cauchois.
 

Claudine-Alexandrine Guérin de Tencin, née en 1681, morte en 1749. – Peinte par de Troy, gravée par de Launay. – La meilleure connaisseuse de l'humanité de son temps a des traits fins, finauds, des yeux à l'interrogation perçante, et avec cela une longue physionomie, pâle, étrange, nébuleuse.

Mademoiselle Térouene. – Estampe en manière noire, sans nom de dessinateur et de graveur. – Dans ce portrait, qui pourrait bien être un portrait de pure imagination, Théroigne de Méricourt, les cheveux épars sous une espèce de grand bonnet rouge, la poitrine sortant d'un pierrot débraillé, apparaît avec la robuste et rude beauté d'une harangère-Gorgone.

Anne Vallayer-Coster, de l'Académie royale de peinture et de sculpture, en 1770. – Dessinée par elle-même, gravée par Letellier. – Elle s'est exposée au public avec sa figure maigre, son mince nez courbe, le petit air altier de sa tête, fièrement rejetée en arrière.

Mademoiselle Vanloo. – Dessinée par Carle Vanloo, gravée par Basan. – Une fillette au visage éveillé, le chignon retenu par une grande épingle, tenant dans sa chemise retroussée et découvrant son petit ventre, une grosse grappe de raisins.

Dame Julie de Villeneuve, Vence de St-Vincent. – Peinte par Berthelemy, gravée par Romanet. – Des yeux aux paupières lourdes, un nez tourné à la friandise, une bouche sensuelle; ainsi se montre la petite fille de Mme de Sévigné, avec une chevelure dépeignée, et l'outrageant décolletage d'une robe qui laisse voir et l'ombre de son aisselle et plus que la moitié de ses deux seins.

Marie-Élisabeth-Jean-Baptiste Guyard, épouse de messire Charles-Paul de Bourgevin, de Moligny, de Vialart. – Peinte par Martin, gravée par Fessard. – Un rare portrait d'une brune aux noirs sourcils, à la coiffure en langues de flammes, couverte d'un voile de veuve.

Madame Marie-Louise-Thérèse Victoire de France. – Peinte par Nattier en 1755, gravée par Gaillard, sous l'allégorie de l'Eau. – La quatrième fille de Louis XV, la grasse princesse que le Roi appelait Coche, la bonne et paresseuse personne qui disait en montrant sa bergère: «Voilà un fauteuil qui me perd», Nattier l'a montrée avec sa douce, sereine et pleine figure, en naïade, accoudée sur une urne qui s'épanche, les roseaux d'une rivière derrière elle. Remarquons que c'est presque l'arrangement de la figure mythologique de Nattier, gravée par Melliny et qui a pour titre: «la Belle Source.»

Madame la marqse de V*** (la marquise de Villette). – Dessinée par Pujos, gravée par Lingée. – La femme nommée «Belle et Bonne» par Voltaire, donne à voir une assez laide et brune figure de petite Savoyarde.

Cette étude des portraits de femmes françaises du dix-huitième siècle que je fais aujourd'hui, je voudrais la voir refaire un jour par un jeune érudit, qui, consacrant des années à cette monographie, et lisant tous les livres, et regardant toutes les gravures, et consultant tous les portraits conservés dans les familles historiques, apporterait la certitude à tant d'attributions douteuses, baptiserait d'une manière incontestable les portraits allégoriques de Nattier; dévoilerait peut-être le mystère des deux charmants portraits de Saint-Aubin, désignés par des étoiles; donnerait de vrais noms aux centaines de portraits de Chrétien et de Quenedey dont les répertoires doivent exister quelque part28; ferait la lumière dans ces anonymes, comme la petite femme de Boucher qui lit les lettres d'Héloïse et d'Abailard, la femme de Carmontelle qui brode au tambour, et cette autre du même qui est enfoncée dans les aphorismes d'Hippocrate, comme la femme de Cochin qui fait un médiateur; retrouverait enfin, avec la connaissance de toutes les pièces de vers du temps dédiées au «Beau Sexe», le nom de telle ou telle femme, ainsi que pour tel portrait de Houel et de tant d'autres.

Complétons cette étude des portraits des femmes du temps par un travail sur les portraits d'actrices, et commençons par l'Opéra, en faisant suivre le Chant par la Danse.

Sophie Arnould, actrice de l'Académie royale de Musique dans le rôle Zyrphé du ballet de Zélindor. – Peinte par La Tour, gravée par la Richardière. – La spirituelle chanteuse est représentée avec l'éclair de ses beaux yeux implorants, dirigés vers le ciel, avec cette bouche entr'ouverte et douloureuse sur laquelle meurt une dernière prière.

Hte-Aïde Beaumenil, de l'Académie royale de Musique, pensionnaire du Roi. – Dessinée ad vivum par Pujos, gravée par Vidal en manière noire. – Elle a de jolis yeux étonnés, un petit nez pointu, une bouche aux coins relevés, une physionomie futée où rit une gaieté maligne, sous une haute coiffure aux coques crêpelées et couronnée d'une guirlande de roses. Et Mlle Beaumenil se voit ainsi dans un médaillon entouré du serpentement de brindilles de lierre, avec au bas de son portrait la partition ouverte de l'opéra de «Tibulle et Délie», et ces vers:

 
 
Est-ce une Muse, est-ce une Grâce,
Qui tient la lyre d'Appollon?
C'est toutes deux. Tibulle en instruit le Parnasse
Et Beaumesnil leur a prêté son nom.
 

Rosalie Duplant, de l'Académie royale de Musique, reçue en 1762. – Dessinée par Leclerc, gravée par Elluin. – Un long cou, un long nez busqué, une longue figure qui a quelque chose d'une tête de cheval, telle apparaît, malgré sa réputation de beauté, le premier sujet à baguette de l'Opéra, en l'estampe qui la montre sous le costume qu'elle portait dans l'opéra de «Pyrame et de Thisbé», vêtue d'un vestinquin bordé de fourrure, dans un médaillon, où un masque tragique est posé sur une torche enflammée.

La Dlle Lemaure29. Problème d'opéra, 1740. C'est une rare estampe satirique, inspirée par les accès de religiosité de la libertine chanteuse. Elle est dessinée à moitié vêtue en reine d'opéra, à moitié vêtue en religieuse, et d'un côté un homme d'église la déshabille de sa robe de théâtre, et de l'autre Thuret, le directeur de l'Académie lyrique, et un galant, sa bourse à la main, la déshabillent de sa robe de nonne. Et dans l'appartement, sont mêlés et confondus les opéras de Pancrace Pèlerin et les Hymnes de l'abbé Bizot, et en dépit d'un grand tableau qui montre un diable perçant de sa fourche la Luxure terrassée, sur la toilette dont le tapis est relevé par un bidet, s'étalent les «Poésies gaillardes» de l'abbé de la Garde. A cette imagerie est jointe une lettre «écrite à Mlle Lemaure par un abbé de ses amis», qui, lue, pliée en deux, au moyen de la dernière syllabe de la demi-page et de la première syllabe de la ligne suivante, prend le sens le plus obscène.

Mademoiselle Rosalie Levasseur, de l'Académie royale de Musique, pensionnaire du Roi, née à Valenciennes. – Dessinée et gravée par Pruneau d'après le buste de Dumont de Valenciennes. – Un front extraordinairement bombé, un œil impudent, un rictus dédaigneux de la bouche, un ensemble de traits populaciers à l'image de sa voix, ainsi caractérisée par la méchante langue de Sophie Arnould: c'est le portrait de la toute-puissante maîtresse de Mercy-Argenteau, devenue baronne du Saint-Empire, puis femme de l'ambassadeur.

Mademoiselle Maillard, de l'Académie royale de Musique. – Dessinée et gravée en couleur par Coutellier. – La jolie femme dont un état de l'Opéra dit: «sujet très utile, mais qui malheureusement se laisse faire des enfants; ce qui prive le public d'un grand nombre d'opéras»; la future déesse de la Liberté est représentée avec son petit profil fardé, les belles lignes de sa gorge, dans une robe rose, sous l'échevellement blanc de son abondante coiffure poudrée à frimas.

Mademoiselle Pélissier. – Peinte par Drouais, gravée par Daullé, avec l'adresse de Drouais. – La rivale de Lemaure, la chanteuse de laquelle on a dit que les opéras sans elle n'étaient plus que des concerts, figure dans une grande composition à la Nattier, habillée plutôt d'une draperie que d'une robe. Elle a des yeux noirs en coulisse, des joues trouées de fossettes, une bouche sensuelle qui retrousse aux coins, une mignonne chair toute pleine de délicatesses finement sculptées.

Madame de St-Huberti, de l'Académie royale de Musique. – Dessinée par Le Moine, gravée en couleur par Janinet. – La sublime chanteuse, qui, un jour, fit un poète du lieutenant d'artillerie devenu Napoléon Ier, est peinte sous la blondasserie de ses cheveux alsaciens, avec sa grande bouche, son nez de soubrette, un ensemble de petits traits bas et bourgeois. A ce portrait réel de Le Moine, qui fut répété de toutes les sortes, il faut joindre un portrait idéalisé, le portrait de la chanteuse telle que le public la voyait au théâtre, un portrait d'après une peinture de Reynolds, et qui a pour titre: «La Musique, ou Mlle Saint-Huberty inspirée par Apollon.»

Pas de deux tiré du second acte de Silvie, exécuté par M. Dauberval et Mlle Allard. – Dessinée par de Carmontelle, gravée par Tilliard. – La danseuse, la seule danseuse qui eût le privilège de composer ses entrées, danse aux côtés de Dauberval, dans son étrange robe, traversée de barrières de perles, au retroussis de peau de bête sauvage, son profil à la fois voluptueux et moqueur penché en arrière dans un coquet mouvement de retraite.

Mademoiselle Camargo. – Peinte par Lancret; réduction de la grande planche gravée par Cars. – La déesse des tambourins, celle dont la jambe était, avec la voix de Lemaure, le jarret de Dupré, les trois merveilles de l'Opéra, celle dont le pied fit la fortune du cordonnier Choisy, est représentée, se déployant au milieu d'un orchestre caché dans la feuillée, avec dans le corps quelque chose de l'envolée d'une sylphide, avec sur la figure quelque chose de l'animation chaude et brune d'une Méridionale.

«La Flore de l'Opéra.» (Portrait présumé de la Guimard.) – Peinte par Roslin, gravée par Basan. La danseuse sans égale dans les ballets anacréontiques est montrée par le peintre, avec son visage parlant, le coude appuyé sur un nuage, la gorge sortant d'une chemisette, en train d'assembler de ses longs doigts une guirlande de fleurs.

La maigreur de la sèche danseuse, aux membres d'araignée, et qu'on appelait le Squelette des Grâces30, a été caricaturée en 1789, dans une rare estampe publiée à Londres et qui a pour titre: The Celebrated G…rd or Grimhard from Paris. Sous l'empanachement de grandes plumes, et dans le rose et le bleu tendres d'une robe de danseuse, on voit la Guimard avec un visage qui a le décharnement d'une tête de mort, agiter des bras et des mains, qui sont les bras et les mains d'une ostéologie.

Mlle Héligsberg dans le ballet du Jaloux puni. – Dessinée par de Janvry, gravée par Condé. – Cette danseuse qu'on trouve, sur les états de l'Opéra, attachée aux chœurs de la Danse pendant les années 1783 et 1784, est représentée en habit d'homme, glissant sur la pointe d'un pied, ses gracieuses et sveltes formes modelées avec amour dans un collant, et ses beaux grands yeux en son petit minois chiffonné, ressortant de dessous les bords relevés d'un grand chapeau de montagnard.

Mademoiselle La Chanterie, de l'Opéra. – Dessinée par Pierre, gravée en manière de sanguine par Gilsberg. – Cette danseuse très inconnue, dont un rapport de police nous raconte les amours scandaleuses, avait les traits purs d'une belle statue, des traits qui ont valu à la femme cette grande étude qui a le caractère d'une tête d'expression. C'est à propos de Mlle La Chanterie qu'un Anglais fort maltraité dans sa santé par ses faveurs, retrouvant son portrait dans une Immaculée Conception d'une église de Paris, s'écria: «Voilà la vierge qui m'a donné la ch… p…»

Théodore Dauberval. – Dessinée par Lefèvre, gravée par Legoux. – La tête de la danseuse philosophe, qui demandait à Rousseau un cours d'instruction pour se conduire à l'Opéra, apparaît dans un médaillon grand comme un dessus de bonbonnière, semblable à un camée mutin de l'antiquité.

Louise-Magdeleine Lany, pensionnaire du Roi, née à Paris le 19 novembre 1733, reçue à l'Académie royale de Musique en novembre 1748 et retirée en avril 1767. – Dessinée par de Carmontelle. – Une nerveuse femme au grand nez aquilin, aux traits marqués, faisant des élévations dans des souliers de satin blanc, au haut talon.

Mademoiselle Marie Sallé, la Terpsichore françoise. – Peinte par Fénouil, gravée par Petit. – Sallé, la Grâce et la Décence du ballet, est représentée tenant une colombe dans ses mains. Une figure plate, un long nez droit, une grande bouche sardonique, des traits où il y a comme la masculinité fade d'un abbé blondin.

Passons à la Comédie-Française en donnant le pas à la Tragédie.

Hippolyte de la Tude Clairon, comédienne françoise, pensionnaire du Roi, a débuté le 19 septembre 1743 dans le rôle de Phèdre, reçue le 22 octobre suivant. – La tragédienne d'art, à la tête de grisette, au mouvement lascif de la bouche, est représentée dans la Médée de Longepierre en sa jolie dramatisation, les narines dilatées, les yeux écarquillés.

On retrouve la Clairon-Médée dans une autre estampe non terminée31, en son char aux enroulements de serpents, la tête de Méduse sur la poitrine, échevelée, et brandissant d'une main une torche, d'une autre main un poignard, et déclamant:

 
A tes deux fils, j'ai sçu percer le flanc,
Regarde ce poignard et cette main sanglante.
 

Charlotte Desmares. – Peinte par C… gravée par Lépicié en 1733. – La nièce de la Champmeslé, une grosse et grasse femme, à la figure joufflue, à la petite bouche en cul de poule, aux yeux pleins d'une gaieté, la faisant quelquefois éclater de rire en scène; qui, «touchante dans les pleurs, piquante dans les ris», tient d'une main un masque comique passé dans un poignard: allusion à son double talent de tragédienne et de comédienne.

«Qui mieux que toy, Duclos, actrice inimitable.» – Peinte par de Largillière, gravée par Desplaces. – Dans cette immense et somptueuse estampe, la Duclos apparaît en la majesté, la pompe, le grandiose des reines de théâtre d'autrefois, sous l'aspect imposant que seul peut rendre le mot latin portentosa. L'Ariane abandonnée, sous sa coiffure en diadème, avec l'ample nudité de sa poitrine, parmi les lambrequins de brocart se cassant en lourds plis autour de son corps, au milieu de l'éclairage d'apothéose du fond, où se voient vaguement une cohorte de faunes brandissant des thyrses, et un puissant amour qui tient une couronne d'étoiles au-dessus de la tête de la tragédienne; – l'Ariane du Théâtre-Français prend des proportions extra-humaines, une espèce de matérialité épique. Non, jamais actrice n'a eu un si grand et si triomphant ouvrage de burin consacré à conserver ses traits aux siècles futurs, et ce portrait vous fait prendre en mépris la pauvreté de nos portraits modernes de célébrités dramatiques.

Marie Dumesnil, de la Comédie-Française, reçue en 1737. – A Paris, chez Elluin, graveur. – Voici la tragédienne de tempérament, qui a peut-être poussé le plus loin les effets des rôles de fureur et de terreur, la voici dans sa laideur, avec sa figure plate et osseuse, son grand nez décharné, ses yeux d'aigle qui devenaient effrayants à certains moments. Elle est représentée dans le rôle d'Athalie, le corps habillé d'une robe à glands et à pompons, la tête coiffée d'un repentir, se déroulant à la dix-huitième siècle sur son épaule.

26Dans la galerie des Dames françaises, où la comtesse de Sabran figure sous le nom de Sapho, le pamphlétaire dit d'elle: «Sapho ferait aimer l'indifférence, tant elle imite bien son attitude, ses regards, son langage». Et il ajoute plus loin: «Sapho ne néglige aucune des ressources de la parure. Son art consiste à rejeter tout ce qui brille, et à employer avec une adresse infinie les ornements les plus simples; elle a l'air de ne rien ajuster et de tout jeter au hasard; mais quand on l'examine, on voit que rien n'a été oublié.»
27Le catalogue de Saint-Aubin, rédigé avec beaucoup de soin et qui donne les anonymes, se contente, pour ces deux portraits, de dire qu'ils ont été gravés en 1779, sur un dessin fait d'après nature.
28Me trouvant aux Riceys, j'ai essayé, mais inutilement, de retrouver, chez un descendant de Quenedey, le répertoire du portraitiste au physionotrace. M. Richard, l'ancien conservateur de la Bibliothèque, et le gendre de Quenedey, possédait une copie de ce répertoire, mais il n'a pas été publié, et je ne sais ce qu'il est devenu après sa mort.
29«Teint noir, grosses lèvres, dents blanches», dit de la Lemaure son logogriphe de 1745.
30Dans un duel à coups de rimes satiriques, dont les traits ont été fournis par les tenants des danseuses Dervieux et Guimard, voici le portrait physique de Guimard: Elle a la taille de fuseau,Le teint couleur de noisetteEt l'œil percé comme un poureau.Ventre à plis, cœur de macreuse,Gorge dont nature est honteuse:Sa peau n'est qu'un sec parcheminPlus raboteux que le chagrin;Sa cuisse est flasque et héronnière,Jambe taillée en échalas,Le genou gros sans être gras;Tout son corps n'est qu'une salière.
31C'est l'estampe d'après Vanloo, où la tête est gravée par Beauvarlet et le fond par Cars.