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Les Merveilles de la Locomotion

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V. – SYSTÈMES DIVERS

À côté des locomotives dont nous venons d'esquisser l'histoire et de faire connaître les principaux types, se placent un certain nombre de machines diverses: les unes fonctionnent encore au moyen de la vapeur, les autres au moyen de l'air ou de l'eau comprimés, d'autres enfin au moyen de l'électricité: nous allons en faire connaître les dispositions principales.

A. – Multiplication du nombre des cylindres. – Système Verpilleux. – Machines du Nord, Meyer, Dupleix, Flachat

Nous parlerons d'abord de quelques locomotives remarquables par le nombre de leurs organes propulseurs.

La difficulté qu'éprouvent les constructeurs à conjuguer le mouvement de plusieurs paires de roues sur les lignes à courbes de petit rayon, les a conduits à transmettre d'une manière indépendante aux roues de la machine le mouvement de va-et-vient produit par l'action de la vapeur dans les cylindres et, par suite, à multiplier le nombre de ces derniers, – une paire de cylindres agissant, comme à l'ordinaire, sur les roues d'avant de la machine, une seconde paire agissant sur les roues d'arrière, sur celles du tender ou même sur celles des divers véhicules. Tel est le système, en principe.

Il a été appliqué pour la première fois sur le chemin de Saint-Étienne, par M. Verpilleux qui disposait deux cylindres sous le tender; puis, au chemin de fer du Nord, où de superbes locomotives ont été construites pour les services de petite et de grande vitesse.

La machine à marchandises du Nord est montée sur douze roues, groupées et accouplées par six. Chaque groupe est commandé par deux cylindres, les uns placés en tête, les autres en queue de la machine. Une longue chaudière, surmontée d'un dessiccateur, est couchée sur les six essieux. Autour de ses flancs se trouvent l'eau et le charbon nécessaires à son alimentation, et le tout pèse 59,7 tonnes et est capable de remorquer des charges de 655 tonnes brutes, en rampe de 0m,005, avec une vitesse moyenne de 25 kilomètres à l'heure, ou de 80 tonnes, en rampe de 0,05 par mètre. Ces grandes dimensions, cette grande puissance ont fait donner parfois à cette machine le nom de machine-chameau.

Une machine de même système (4 cylindres), mais avec une paire de roues de moins (5 au lieu de 6), a été construite pour le service des express du Nord, qui sont très-chargés. Les deux paires de roues motrices d'avant et d'arrière ont un diamètre de 1m,60, ce qui ne pourrait suffire à un service de grande vitesse, si l'on n'avait pris soin d'augmenter le nombre des coups de piston et par suite celui des tours de roues par unité de temps.

La locomotive de M. Meyer ne diffère de la locomotive à marchandises du Nord que par l'isolement des deux groupes de six roues, montés sur deux trucks indépendants et non plus sur un même châssis. La chaudière repose sur les deux trucks, comme la caisse des wagons américains sur les trains qui la portent; des tuyaux articulés servent à la distribution de la vapeur dans les quatre cylindres et à son échappement dans la cheminée. Cette disposition donne à la machine la souplesse nécessaire à son passage dans les courbes de petit rayon, sans lui ôter la rigidité et la solidité qui sont la condition vitale de ces grands corps métalliques.

La machine Queensland, du système Fairlie en usage aux colonies anglaises, résout le même problème d'une manière différente.

M. Haswell a construit une machine, à grande vitesse, dite Dupleix, dans laquelle les quatre cylindres, au lieu d'être isolés, comme dans les machines précédentes, sont superposés deux par deux et agissent sur une manivelle à deux bras, de manière à éviter l'emploi des contre-poids: disposition compliquée et insuffisamment justifiée.

Enfin, M. Eugène Flachat, qui a si puissamment, et pendant de si longues années, contribué à la construction et au perfectionnement de nos voies ferrées, a proposé non plus quatre paires de cylindres, mais autant de cylindres que de trucks porteurs de véhicules. La chaudière destinée à engendrer la vapeur nécessaire à tous ces cylindres est placée en avant du train sur deux trucks, et des tuyaux articulés la répartissent dans toute la longueur du train. Le poids et, par suite, les dimensions du véhicule peuvent être augmentés. M. Flachat proposait l'emploi des voitures du système américain à long couloir intérieur.

B. – Systèmes divers. – Locomotive de Jouffroy. – Système Séguier. – Locomotive Fell, du Mont-Cenis. – Machines rotatives. – Système Agudio, funiculaire et à rail central. – Systèmes Larmanjat, Saint-Pierre et Goudal

La locomotive de M. de Jouffroy diffère complétement des précédentes, et c'est d'une tout autre manière que cet inventeur a cherché à résoudre le même problème de la locomotion en pays de montagnes. Il place la chaudière sur un châssis porté par deux grandes roues à jante plate, et le mécanisme sur un autre châssis supporté en son milieu par une roue unique en fer, garnie d'une jante en bois destinée à se mouvoir sur un rail strié, qui occupe le milieu de la voie. Cette roue est la roue motrice. Elle est comme la roue d'avant d'un tricycle, portant sur ses deux roues de derrière la chaudière et ses accessoires. Les deux parties dont se compose le châssis de ce tricycle sont réunies au moyen d'une articulation verticale, qui augmente encore sa souplesse propre. On voit que l'inventeur a cherché à obtenir une grande adhérence, en même temps qu'une grande légèreté et une grande flexibilité de son matériel. D'ailleurs, son système de grandes roues à jante plate, mobiles sur des rails à rebords, n'est pas exclusif à sa machine. Ses voitures sont aussi montées sur un seul essieu porté par deux grandes roues et réunies les unes aux autres au moyen d'articulations à axe vertical qui permettent un facile déplacement dans le plan de la voie. C'est là assurément une conception ingénieuse, une solution du problème, mais elle emprunte des moyens dont la pratique a révélé les défauts et n'a pu consacrer l'usage. Aussi n'est-il pas appliqué.

Nous retrouvons encore le rail central dans une autre invention, mais non plus ce rail avec ses stries et ses dentelures, qui le font ressembler à une crémaillère, mais un rail semblable à ceux de la voie ordinaire, à la hauteur près à laquelle il se trouve placé au-dessus du ballast. Il ne sert plus au passage d'une roue verticale comme celle de M. de Jouffroy, mais au passage de deux couples de roues horizontales qui le pressent entre elles, comme feraient les extrémités de tenailles dont les mâchoires tranchantes, devenues circulaires, seraient animées d'un mouvement de rotation. Tel est le système de M. le baron Séguier, que différents inventeurs, MM. Duméry, Giraud et Fedit, et enfin M. Fell, ont cherché à rendre pratique.

Nous ne nous arrêterons pas à la description des machines proposées par les premiers, mais nous dirons quelques mots de celle de M. Fell, en raison de l'avenir que des essais heureux paraissent lui réserver.

«On se fera une idée sommaire, mais exacte de cette machine, dit M. Couche dans son rapport sur les locomotives exposées en 1867, en concevant une locomotive à huit roues couplées dont quatre verticales et porteuses et quatre horizontales commandées par les mêmes pistons, au moyen de bielles motrices distinctes et pinçant entre elles un rail central. On a donc, d'une part, l'adhérence ordinaire due au poids entier de l'appareil; et, de l'autre, l'adhérence facultative, en quelque sorte illimitée, due à la pression exercée par des ressorts, et que le mécanicien règle à volonté.»

La machine de M. Fell a fait le service de la ligne de 80 kilomètres établie sur la route du Mont-Cenis, en attendant le percement du souterrain. Elle mettait cinq heures à opérer ce trajet, franchissant des rampes de 0m,08 par mètre, et passant dans des courbes de 40 mètres de rayon, avec un train de trois wagons attelés à sa suite. Rien de plus pittoresque que ce voyage tantôt à ciel ouvert, tantôt sous les longs souterrains en charpente destines à garantir la voie des avalanches..

Deux systèmes ont été proposés pour l'établissement des chemins de fer à bon marché, au moyen d'un seul rail: l'un est le système Larmanjat, l'autre le système uno-rail de MM. Saint-Pierre et Goudal. Tous deux s'établissent sur les accotements des routes, le premier en terrain plat, le second en pays de montagnes plus spécialement.

Les véhicules de M. Larmanjat sont à quatre roues, deux sur l'axe: l'une à l'avant, l'autre à l'arrière et portant sur le rail; deux latérales: une à droite, une à gauche, reposant sur le sol et fonctionnant comme roues d'équilibre. Les premières portent la plus grande partie de la charge et, placées sur le rail, elles réduisent le frottement et par suite l'effort de traction.

On voit que la chaussée parcourue par les trains de M. Larmanjat doit être parfaitement de niveau pour que les voyageurs ne soient pas soumis à des oscillations qui ne manqueraient pas de devenir fatigantes et désagréables. Un essai de ce système a été fait entre le Raincy et Montfermeil, sur une longueur de 5 kilomètres, et a paru donner d'assez bons résultats.

D'après M. Larmanjat, le kilomètre de rail placé sur le côté de la route macadamisée reviendrait à 7,000 francs; placé sur l'un des bas côtés, avec macadam à droite et à gauche, à 10,000, et enfin avec longrines en bois, à 14,000 francs.

Le matériel roulant est aussi à très-bas prix: les machines coûtent de 10,000 à 20,000 francs et les wagons de 2,500 à 3,500 francs. Ces prix peuvent donc rendre possibles un grand nombre de petites lignes à trafic restreint.

Les voitures et la locomotive de MM. Saint-Pierre et Goudal sont portées sur quatre roues à large jante qui se meuvent sur des bandes en asphalte comprimé; ces roues n'ont rien de particulier. En dessous des véhicules se trouvent deux paires de roues presque horizontales, étreignant entre elles le rail central, comme dans le système Fell. Ces roues ont même diamètre que les premières; leur pression sur le rail peut être graduée. Les huit roues reçoivent leur mouvement de deux cylindres placés à l'avant.

 

D'après les inventeurs, cette locomotive-tender, du poids de 10 tonnes, d'une force normale de 50 chevaux, peut traîner un poids utile de 20 à 22 tonnes, en rampe de 0m,05 par mètre, à une vitesse de 6 à 8 kilomètres.

Il ne nous est pas possible de nous prononcer sur la valeur de ce système. Nous n'avons pas ouï dire qu'il ait encore reçu d'application. Quelle sera la durée des bandes asphaltées? Quelle sera la durée des machines elles-mêmes, dont le mécanisme est compliqué? Comment résisteront-elles aux secousses produites par les imperfections de la voie, si difficile à réparer. Il est impossible de répondre à toutes ces questions.

Les inventeurs et les ingénieurs ne se sont pas seulement préoccupés des améliorations à apporter au mécanisme locomoteur, ils ont cherché aussi à simplifier le mode d'action de la vapeur. C'est ainsi qu'on a essayé d'appliquer des machines rotatives à la mise en mouvement des roues des locomotives. Ces tentatives n'ont pas réussi jusqu'à présent, et on a renoncé à cette application, malgré la simplicité et l'attrait qu'elle présentait. Peut-être faut-il attendre que les machines rotatives se soient perfectionnées; la science, de ce côté, n'a pas dit son dernier mot.

Nous avons parlé déjà des plans inclinés et des machines fixes placées à leur sommet qui opèrent à l'aide d'un câble le remorquage des wagons sur ces plans. De grands inconvénients existent dans l'emploi de ce système. C'est par des modifications profondes que M. Agudio les a surmontés.

Chacun connaît le touage en usage sur les rivières et les canaux: une chaîne couchée dans le fond de la rivière sert d'amarre à un bateau sur le pont duquel de gros tambours sont disposés. Une machine à vapeur fait tourner ces tambours, sur lesquels la chaîne s'enroule deux ou trois fois, pour retomber ensuite dans l'eau à l'arrière du bateau. Cette chaîne, comme on le voit, présente une grande analogie avec le rail central Séguier. M. Agudio a remplacé la chaîne de touage par un câble métallique fixé à ses deux extrémités; ce câble s'enroule deux fois sur les gorges de deux tambours disposés sur le train du locomoteur. La machine à vapeur du bateau-toueur est remplacée par deux machines fixes, l'une en haut, l'autre en bas du plan incliné. Chacune de ces machines tire un des brins du second câble, dont les extrémités ont été réunies après avoir été passées sur deux nouveaux tambours du locomoteur. On comprend le jeu de l'appareil: le câble sans fin transmet, par ses deux brins, aux tambours qui le portent, le mouvement qu'il a reçu des machines. Ces tambours le transmettent à leur tour au tambour qui porte le câble toueur, immobile sur le sol et le long duquel il s'avance, entraînant à sa suite le train tout entier.

Le locomoteur est porté sur deux trucks munis de freins puissants.

Ce système, tel que nous venons de le décrire, présente déjà de sérieux avantages: flexibilité et légèreté de la machine, simplicité des organes de transmission, sécurité à la montée comme à la descente. Mais M. Agudio l'a encore perfectionné en remplaçant son câble toueur fixe par le rail central du système Séguier ou Fell. Les poulies du locomoteur, dans le nouvel appareil, sont disposées horizontalement et étreignent fortement le rail. Enfin, le poids du locomoteur, qui est de 12 tonnes et qui se répartit sur les roues porteuses, donne lieu à une certaine adhérence dont il a aussi tiré parti.

On étudie, en ce moment, l'application du système Agudio-Fell à la traversée du Simplon. Sur le versant nord, où se trouvent des rampes de 0m,10 par mètre, on se propose d'employer le locomoteur Agudio, et sur le versant sud, beaucoup moins abrupt, la locomotive Fell.

C. – L'eau et l'air comprimé. L'électricité. – Locomotives Andraud, Pecqueur. – Chemins éoliques Andraud. – L'air comprimé et raréfié: le chemin de Sydenham. Tunnel sous la Manche. – L'air chaud. – L'eau comprimée: système Girard. – Machines électro-magnétiques

Jusqu'à présent, la vapeur d'eau a été le seul agent employé dans les machines fixes ou locomotives dont nous avons parlé, mais elle n'a pas été le seul agent essayé.

Nous vivons dans une atmosphère gazeuse, compressible, élastique, que nous pouvons utiliser comme moyen de propulsion. Nous pouvons profiter des chutes ou des cours d'eau improductifs pour comprimer l'air, faire provision de la masse, ainsi réduite à un faible volume, et la faire agir dans les cylindres de la locomotive, au lieu de la vapeur d'eau. C'est le système proposé par M. Andraud.

Deux chiffres font saisir immédiatement les difficultés qui s'opposent à l'emploi de l'air comprimé dans les locomotives: 1 mètre cube d'air et 1 mètre cube de vapeur, à même pression, produisent le même effet dans le cylindre de la machine, mais cette vapeur, à l'état d'eau, n'occupe dans le tender qu'un volume de 3 litres 50, qui est les 0,0035 de celui qu'occuperait l'air; – d'où jaillit l'impossibilité.

M. Andraud propose de comprimer l'air à 30 atmosphères, mais il faut alors un réservoir très-résistant et, par conséquent, très-lourd: nouvelle impossibilité.

L'addition d'un foyer et l'emploi de l'air chaud ne conduisent pas à de meilleurs résultats. On a constaté sur les machines fixes qu'on ne peut guère dépasser la force de quatre chevaux sans augmenter démesurément la masse.

M. Pecqueur, reprenant les idées de M. Andraud, a eu l'idée de disposer, le long de la voie, un long tube servant de réservoir où la machine en marche puiserait l'air comprimé. Mais il suffit d'énoncer un semblable projet pour faire entrevoir toutes les difficultés attachées à sa réalisation. M. Pecqueur, indépendamment de cette locomotive à air comprimé, a inventé aussi un piston locomoteur comme celui que nous avons décrit en parlant du système atmosphérique, mais qu'il fait mouvoir au moyen de l'air comprimé, au lieu de l'air raréfié.

M. Andraud, à qui revient l'idée de la locomotive à air comprimé, a proposé des chemins éoliques, dont le succès nous paraît encore plus problématique. Voici la disposition qu'il propose: Entre les deux files de rails se trouve un madrier et, de chaque côté de ce madrier, un tube en étoffe flexible et imperméable à l'air, une sorte de gros boyau. Ces deux boyaux sont accompagnés d'un gros tube latéral résistant, qui sert de réservoir d'air comprimé.

Que l'on suppose vides, un moment, les deux tubes placés au milieu de la voie, et qu'après les avoir saisis à l'aide de deux rouleaux opposés, faisant mâchoires, on introduise l'air, celui-ci gonflera les tubes flexibles, pressera les rouleaux et les fera avancer. On n'a plus qu'à disposer sur les tubes autant de paires de rouleaux ou de mâchoires qu'on voudra, au-dessus de ces rouleaux des wagons reliés, et le système progressera. Théoriquement, il n'y a rien à dire; mais pratiquement, c'est autre chose. Que coûtera l'ensemble? Et, sans même aborder la question de prix, que dureront ces tubes? Voyez-vous les fuites se produire et les cantonniers, transformés en couturières, chargés de mettre des pièces. Tout cela nous paraît inabordable.

Aussi préférons-nous l'obscurité du tunnel de Sydenham à l'insécurité de semblables systèmes.

Nous résumons un article du Railway News, du 3 septembre 1864, qui rend compte de l'expérience, nouvelle application de l'idée de Vallance, faite entre Londres et Sydenham.

La voie est établie dans un tunnel circulaire en briques de 3m,20 de diamètre, capable de recevoir les grandes voitures du Great-Western. Le véhicule ressemble à un long omnibus et porte un disque au milieu duquel il se trouve placé, comme le serait l'acrobate retenu au centre du cerceau garni de papier qu'il traverse dans les jeux du cirque. Ce disque forme la section du tunnel et fonctionne comme piston. La force qui le fait mouvoir est produite par un grand ventilateur ou éjecteur, à surface concave, de 6m,70 de diamètre, mis en mouvement par une petite machine à vapeur.

La voiture doit-elle descendre. Ses freins sont desserrés, elle s'engage dans le tunnel en passant sur une longue ouverture grillée par laquelle l'air arrive. Le ventilateur tourne. Une porte en tôle ferme l'entrée du tunnel, et la voiture descend, poussée par l'air introduit. Le ventilateur s'arrête avant l'arrivée du wagon, la vitesse acquise suffit à le conduire à la fin de sa course; les freins sont serrés, il s'arrête. – Doit-il remonter? C'est alors par aspiration que fonctionne l'appareil, et le véhicule s'avance dans le souterrain, comme l'eau s'élève aspirée dans un chalumeau.

On voit l'avantage que présente ce système sur le système atmosphérique que nous avons décrit précédemment. Au lieu d'un petit piston, dont la faible surface réclame, pour produire un effet voulu, une pression élevée en chacun de ses points, on n'a plus besoin que d'une faible pression répartie sur la grande surface du nouveau piston. Par suite, les fuites si redoutées dans le premier cas sont bien moindres et bien moins à craindre dans celui-ci. Enfin, – et cet avantage ne sera pas sans intérêt pour certains voyageurs délicats, – l'air circule et se renouvelle dans l'intérieur du souterrain, de manière à dissiper les craintes de ceux qui, comme le grand Arago, redouteraient encore les maladies causées par l'air humide des souterrains.

Quel sera le sort de cette nouvelle application de l'air à la locomotion? Construira-t-on des souterrains sur le versant des montagnes pour les franchir plus aisément? Fera-t-on un tunnel sous la Manche, et l'air comprimé sera-t-il le moteur adopté? On ne peut rien affirmer, mais il résulte évidemment de l'expérience que nous venons de rapporter qu'un nouveau moyen, aussi puissant que simple, a été mis à la disposition des ingénieurs, qui sauront l'utiliser dans les circonstances les plus avantageuses.

Un système, qui a fait beaucoup de bruit dans ces dernières années, est le système hydraulique de M. Girard.

Un sentiment inné porte l'ingénieur à imiter ce qu'il voit dans la nature, et à tirer parti des forces improductives qu'il ne faut que dompter pour les rendre utiles et en faire des sources de profits. C'est à un sentiment de ce genre qu'a obéi M. Girard en imaginant son chemin de fer hydraulique.

Le frottement des véhicules sur les rails est déjà bien faible dans les chemins de fer: M. Girard a cherché à le réduire encore et à le rapprocher de ce qu'il est entre le bateau et l'eau qui le porte. Des chutes d'eau, d'une puissance considérable, se précipitent des montagnes dans les vallées sans que, le plus souvent, on en tire le moindre parti. M. Girard a voulu les utiliser. Pour cela, il dispose, le long de la voie, une conduite d'eau qui, au passage des wagons, fournit le liquide nécessaire à la mise en mouvement. Deux systèmes de turbines agissent sur les roues. Selon que l'eau frappe les turbines de l'un ou de l'autre système, la progression a lieu dans un sens ou en sens contraire. Tel est le premier système proposé par M. Girard. Plus tard, il est revenu sur cette première conception et a remplacé les roues par des patins cannelés portant sur un rail plat. C'est alors, entre le patin et le rail, qu'il introduit de l'eau comprimée, de manière à adoucir le frottement des deux surfaces, et à le réduire, a-t-il prétendu, au millième de la charge.

Mais pourquoi faut-il que la pratique se trouve si souvent en désaccord avec la théorie, et que les faits les plus simples en apparence rencontrent dans l'application de si grandes difficultés? Le système de M. Girard a été essayé à la Jonchère, près de Rueil; une commission a été nommée pour constater les résultats obtenus, et son rapport n'a pas été favorable à cette nouvelle invention. Aux chances de fuites que les moindres mouvements de la voie peuvent produire, et qu'une forte pression, donnée à l'eau pour obtenir de grandes vitesses, peut aggraver, s'ajoute la difficulté d'avoir toujours une grande quantité d'eau et de la conserver liquide dans les conduites en dépit des grands froids. Nous ne croyons donc pas que le système Girard soit appelé à renverser les locomotives.

Nous en dirons autant des machines électro-magnétiques qui, en l'état de la science, doivent être exclues du domaine de la pratique. Les savants sont, à cet égard, d'un avis unanime. Un cheval de force, obtenu au moyen de la vapeur, coûte environ 10 centimes par heure; obtenu par un courant électrique, il coûte 20 francs, disait M. Aristide Dumont à l'Académie des sciences, en 1851. Depuis cette époque, la construction des machines électro-motrices a fait des progrès, mais ils ne sont pas tels qu'on puisse, d'ores et déjà, prévoir leur application prochaine à l'industrie des transports.

 

Tel est, à cette heure, l'état des découvertes relatives à la locomotion sur les voies ferrées. D'immenses efforts, on le voit, ont été faits depuis l'origine, de la part de tous les hommes et de tous les peuples qui marchent à l'avant-garde de la science. Tous y ont contribué dans la mesure de leur génie et de leurs intérêts; nous ne chercherons pas à qui revient la plus large part de gloire: devant la grandeur du résultat s'efface la petitesse des amours-propres. Et nous ne touchons pas certainement au terme des progrès qui doivent s'accomplir: les grandes voies sont faites, les petites restent à faire, à chacune leur moteur; celui des premières continuera à se perfectionner, celui des secondes est presque à créer. Enfin, il faudra trouver un moteur spécial pour nos routes ordinaires, qui nous permette de tirer de celles-ci le meilleur parti possible.