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La Pensée de l'Humanité

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2

Si tu peux voir toutes les conséquences de ton activité, sache que cette activité est nulle.

3

Nos actes de l'instant, du moment, sont à nous; ce qu'il en résultera, c'est l'affaire de Dieu.

FRANÇOIS d'ASSISE.
4

En vivant d'une vie spirituelle, c'est-à-dire en communion avec Dieu, l'homme, bien qu'il ne puisse pas connaître les conséquences de ses actes, sait sûrement que ces conséquences seront heureuses.

5

L'acte accompli sans la moindre réflexion aux conséquences possibles, uniquement en vue d'accomplir la volonté de Dieu, est la meilleure action que l'homme peut accomplir.

6

La récompense d'une vie juste n'est jamais dans l'avenir, mais dans le présent. Si tu fais bien à l'instant, tu te sens bien à l'instant. Et si tu agis bien, les conséquences ne peuvent ne pas être bonnes.

VII. —Ceux qui croient que le sens de la vie est dans le présent ne se préoccupent pas de la vie d'outre-tombe
1

Nous nous embrouillons dans nos idées sur la vie future; nous nous demandons ce qu'il y aura après la mort. Mais on ne peut le demander, parce que la vie et l'avenir sont deux termes contradictoires: la vie est seulement dans le présent. Il nous semble qu'elles a été et qu'elle sera, tandis qu'elle est seulement. Il ne faut pas chercher une solution à la question de l'avenir, mais penser comment nous devons vivre dans le présent, à l'instant même.

2

Nous ignorons toujours tout ce qui a trait à la vie corporelle, parce que cette vie est réglée par le temps et que nous ne pouvons pas connaître l'avenir.

Mais dans le domaine de la vie spirituelle, il n'y a pas de futur. C'est pourquoi l'inconnu de notre vie diminue à mesure qu'elle se transforme de charnelle en spirituelle, à mesure que nous vivons dans le présent.

3

Nous devons accomplir honnêtement et d'une manière impeccable le travail qui nous est confié, indépendamment de notre espoir de devenir un jour des anges, ou de notre croyance d'avoir été jadis des mollusques.

JOHN RUSKIN.
4

A mesure que la vie se prolonge, surtout la vie en bonnes actions, l'importance du temps et l'intérêt de la question de ce qui sera tombent. Plus nous sommes vieux, plus le temps passe vite; ce qui «sera» a de moins en moins d'importance et ce qui «est» en gagne de plus en plus.

Si tu peux élever ton esprit au-dessus de l'espace et du temps, tu te trouves à tout instant dans l'éternité.

ANGÉLUS.

CHAPITRE XXI
LE NON-AGIR

Les hommes gâtent moins leur vie en ne faisant pas ce qu'ils doivent faire, qu'en faisant ce qu'ils ne doivent pas faire. C'est pourquoi le plus grand effort que l'homme doit faire sur lui-même pour avoir une vie heureuse – est de s'abstenir de faire ce qu'il ne faut pas faire.

I. —L'abstention est le meilleur moyen de mener une bonne vie
1

Ce qui importe le plus à tous les hommes, c'est de vivre bien. Vivre bien, c'est moins de faire tout le bien que nous pouvons, que de ne pas faire le mal que nous pouvons éviter de commettre. L'essentiel, c'est de ne pas faire de mal.

2

Tous les hommes de notre époque savent que notre vie est mauvaise, et ils ne se bornent pas à critiquer son organisation, mais travaillent à ce qui, à leur avis, doit améliorer notre vie. Pourtant, loin de s'améliorer, l'organisation de notre vie empire chaque jour. Pourquoi? Parce que les hommes accomplissent les travaux les plus compliqués et les plus difficiles pour améliorer la vie, mais ne font pas la chose la plus simple et la plus facile: ils ne s'abstiennent pas de prendre part aux œuvres qui rendent notre vie mauvaise.

3

L'homme apprend ce qu'il doit faire seulement après avoir compris ce qu'il ne doit pas faire. Et, en en faisant pas ce qu'il ne doit pas faire, il fera inévitablement ce qu'il doit faire, bien qu'il ne saura pas pourquoi il fait ce qu'il fait.

4

Question: Qu'est-ce qu'il y a de mieux à faire quand on est pressé? Réponse: Rien.

5

Dans les moments d'abattement moral, on doit se comporter envers soi-même comme envers un malade: ne rien entreprendre.

6

Si tu ne sais pas quel parti prendre: agir ou ne pas agir, sache qu'il est toujours préférable de s'abstenir que d'agir. Si tu n'avais pas la force de t'abstenir, et si tu savais sûrement que l'affaire est bonne, tu ne te serais pas demandé si tu dois la réaliser ou non; si tu te le demandes, c'est que tu sais que tu peux te contenir et, ensuite, tu es sûr que l'affaire n'est pas tout à fait bonne. Si elle était absolument bonne, tu ne te serais pas interrogé.

7

Si tu as grande envie de quelque chose et s'il te semble que tu ne pourrais pas résister à l'envie, défie-toi. Ce n'est pas vrai que l'homme ne puisse se contenir dans n'importe quel cas. Seul celui qui s'est assuré à l'avance qu'il ne peut se contenir, n'est pas en état de le faire.

8

Que chacun, même un tout jeune homme, se rappelle sa vie. Et si tu regrettes une seule fois de n'avoir pas fait ce que tu devais et ce qui serait bien, tu regretteras des centaines de fois d'avoir fait ce qui était mal et que tu n'aurais pas du faire,

II. —Conséquences de l'incontinence
1

Il y a moins de mal à ce que nous faisons autre chose que nous aurions dû faire, qu'à ce que nous ne nous abstenons pas de ce que nous n'aurions pas dû faire.

2

Le laisser-aller dans une seule occasion affaiblit la force de la continence dans toute autre. L'habitude prise de ne pas se contenir est comme un torrent invisible sous une maison. Une telle maison ne résiste pas à la poussée.

3

Il est plus mauvais de faire trop que de ne pas faire assez; il est plus mauvais de se presser que de venir en retard.

Les reproches de la conscience sont toujours plus douloureux pour ce que l'on a fait que pour ce que l'on n'a pas fait.

4

Plus la situation semble difficile, moins on doit agir. C'est précisément par l'action que nous gâtons ordinairement ce qui commençait déjà à s'arranger.

5

La plupart des gens qu'on appelle méchants sont devenus tels parce qu'ils prenaient leur mauvaise humeur pour leur état d'âme normal et s'abandonnaient sans faire d'efforts pour y résister.

6

Si tu ne te sens pas la force de te contenir d'un désir charnel, la cause est sûrement en ce que tu ne t'es pas contenu lorsque tu étais encore en état de le faire; puis, le désir est devenu une habitude.

III. —Toute activité n'est pas digne d'estime
1

On a tort de croire que toute activité, sans se préoccuper de son caractère, est, en elle-même, une occupation honorable, digne de considération. Il s'agit de savoir quelle est cette activité et dans quelles conditions l'homme s'abstient d'agir.

2

Souvent les hommes refusent fièrement de prendre part à des plaisirs innocents en le motivant par des occupations plus sérieuses. Cependant, sans compter que le jeu simple et joyeux est plus utile et important que bien des affaires, le travail même pour lequel les gens occupés renoncent au plaisir, est souvent tel qu'il serait préférable de ne pas le faire.

3

Pour la marche réelle de la vie, une activité extérieure et turbulente est non seulement inutile, mais encore nuisible. L'inaction, sans les plaisirs procurés par le travail des autres, est la situation la plus pénible, si elle n'est pas comblée par un travail intérieur; c'est pourquoi, si l'homme vit en dehors du luxe assuré par le travail d'autrui, cet homme ne restera pas oisif. Le plus grand tort est causé à l'humanité, non par l'oisiveté, mais par des actions nuisibles et inutiles.

IV. —L'homme peut éviter de mauvaises habitudes s'il a conscience d'être non une créature charnelle, mais spirituelle
1

Pour apprendre à se contenir, il faut apprendre à se dédoubler en un homme charnel et en un homme spirituel, et à habituer l'homme charnel à faire ce que veut l'homme spirituel.

2

Lorsque l'âme dort, lorsqu'elle n'agit pas, le corps est irrésistiblement soumis aux manifestations des sens que provoquent en lui les actes de ceux qui entourent l'homme. Ils bâillent, il bâille également; ils s'emportent, il s'emporte aussi; ils se fâchent, il se fâche; ils s'attendrissent, pleurent, et il a les larmes aux yeux.

Cette subordination involontaire aux influences extérieures est souvent la cause des mauvaises actions qui sont en désaccord avec les exigences de la conscience. Mets-toi en garde contre ces influences extérieures et ne te soumets pas à elles.

3

Si tu habitues ton côté charnel, depuis ton jeune âge, à obéir à la partie spirituelle, il te sera facile de contenir tes désirs. Celui qui s'est habitué à contenir ses désirs a toujours une vie joyeuse et facile.

V. —Plus on lutte contre l'incontinence, plus la lutte devient facile
1

Une guerre intestine se déroule en l'homme entre sa raison et ses passions. L'homme aurait pu jouir d'un certain calme s'il ne possédait que la raison sans les passions, ou les passions sans la raison. Mais comme il possède l'un et les autres, il ne peut éviter le combat, il ne peut être en paix avec l'un que s'il est en guerre avec l'autre. Il lutte toujours en lui-même. Et cette lutte est indispensable; c'est là toute la vie.

 
PASCAL.
2

Pour respecter les autres comme soi-même, il faut agir envers eux comme nous voulons que l'on agisse envers nous; là est l'œuvre principale de la vie. Il faut se maîtriser, et, pour se maîtriser, il faut s'y habituer.

3

Chaque fois que tu as grande envie de faire quelque chose, arrête-toi et réfléchis afin de savoir si ce dont tu as tellement envie est bien.

4

Pour ne pas commettre de mauvaises actions, il ne suffit pas de s'en abstenir; il faut apprendre à se contenir des mauvaises conversations et, surtout, des mauvaises pensées. Dès que tu te rends compte que tes paroles sont mauvaises, que tu te moques, blâmes, injuries, arrête-toi, tais-toi et n'écoute pas les autres. Agis de même lorsque tu as de mauvaises idées, lorsque tu penses mal de ton prochain; qu'il soit digne de blâme ou non, arrête-toi et tâche de penser à autre chose. C'est seulement lorsque tu apprendras à te contenir des mauvaises paroles et des mauvaises pensées, que tu seras en état de te contenir des mauvaises actions.

5

Indépendamment du nombre de fois qu'il t'arrivera de tomber sans pouvoir vaincre tes passions, ne te laisse pas abattre. Tout effort de lutte diminue la force de la passion et facilite la victoire.

6

Chaque passion dans le cœur de l'homme est d'abord comme un solliciteur, ensuite comme un hôte, et enfin comme le maître de la maison. N'ouvre pas la porte de la maison de ton cœur à ce solliciteur.

VI. —La portée de la continence pour chaque homme et pour l'humanité entière
1

Si tu veux être libre, habitue-toi à contenir tes désirs.

2

Qui est sage? Celui qui apprend toujours quelque chose chez quelqu'un. Qui est riche? Celui qui se contente de son sort. Qui est fort? Celui qui sait se maîtriser.

Le Talmud.
3

On dit que le christianisme est une doctrine de faiblesse parce qu'il ne recommande pas d'agir, mais plutôt de s'abstenir de l'action. Le christianisme, doctrine de faiblesse! Une doctrine de faiblesse dont le Fondateur a péri en martyr sur la croix, toujours fidèle à Lui-même, et dont les fidèles comptent des milliers de martyrs, les seuls hommes qui regardaient bravement le mal en face et qui se révoltaient contre lui! Et les violents d'alors qui ont exécuté le Christ, de même que les violents d'à présent savent quelle est cette doctrine de faiblesse et la craignent plus que tout. Leur flair leur montre que seule cette doctrine détruit sûrement et jusqu'à la base tout le régime qui les soutient. Il faut bien plus de force pour se contenir du mal que pour accomplir la chose la plus difficile que nous considérons comme bien.

4

Toutes les diversités de nos situations dans le monde ne sont rien en comparaison de la maîtrise de l'homme sur lui-même. Si un homme est tombé à la mer, il est absolument indifférent d'où il est tombé et quelle est cette mer. La seule chose qui importe, c'est de savoir s'il sait nager ou non. La force n'est pas dans les conditions extérieures, mais dans le savoir de se dominer.

5

La vraie force n'est pas dans celui qui ne vainc pas les autres; mais dans celui qui se vainc lui-même qui ne permet pas à la bête de dominer son âme.

6

Celui qui s'abandonne aux désirs de la passion, qui cherche les jouissances, sent ses passions se développer de plus en plus et se trouve enchaîné par les passions.

Celui qui a pu vaincre la passion a brisé les chaînes.

Sagesse bouddhiste.
7

Jeune homme, refuse de satisfaire tes désirs (plaisirs, luxe, etc.), si ce n'est dans l'intention de renoncer absolument à tout cela, du moins dans le but d'avoir devant soi une possibilité continuelle de jouissance. Cette économie à l'égard de ton sentiment de vitalité te rendra, en effet, plus riche parce que tu diffères tes jouissances.

La conscience que la jouissance est dans ton pouvoir est plus féconde et plus vaste, comme tout ce qui est idéal, que le désir satisfait par cette jouissance, parce que la satisfaction détruit le sentiment de jouissance même.

KANT.
8

On doit moins chercher à faire le bien qu'à être bon; moins chercher à luire qu'à être pur. L'âme semble vivre dans un vase en verre, et l'homme peut le salir ou le tenir propre. Dans la mesure où le verre est pur, lumière de la vérité luit à travers, pour l'homme lui-même et pour les autres. C'est pourquoi l'œuvre principale de l'homme est interne; elle consiste à entretenir son vase dans la propreté. Garde-toi seulement de te souiller, et la lumière luira pour toi comme pour les autres.

9

Souvent, pour arriver à ce que nous désirons, il suffît de cesser de faire ce que nous faisons.

10

Il suffît de contempler la vie que les hommes mènent dans notre monde, voir Chicago, Paris, Londres, toutes, les villes, les usines, les chemins de fer, les machines, les armements, les canons, les forteresses, les imprimeries, les musées, les maisons à 30 étages, etc., et à se poser la question de ce que l'on doit faire avant tout afin que les hommes puissent vivre bien, pour que cette réponse vienne d'elle-même: cesser avant tout d'accomplir les choses inutiles; et l'inutile dans notre monde européen constitue les 0,99 de toute l'activité humaine.

11

Si tenu et transparent que soit devenu le mensonge résultant de la contradiction entre notre vie et notre conscience, il s'amincit et s'étire encore, mais ne se rompt pas. Et tout en devenant toujours plus mince en s'étirant de plus en plus, ce mensonge lie l'ordre existant des choses et entrave l'avènement d'un nouveau.

La plupart des hommes du monde chrétien ne croient plus aux règlements païens qui gouvernent leur vie, et croient aux principes chrétiens qu'ils reconnaissent dans leur conscience; mais la vie continue comme par le passé. Pour supprimer tous les malheurs et les contradictions qui tourmentent actuellement les hommes afin que le Règne de Dieu annoncé à l'humanité depuis 1900 ans arrive, les hommes de notre temps n'ont besoin que d'une seule chose: d'un effort moral. De même que pour faire reprendre à un liquide refroidi au-dessous de son point de congélation la forme de cristaux qui lui est propre, il faut une impulsion, – pour faire passer l'humanité à la forme de vie qui lui est naturelle, il faut un effort moral, l'effort par lequel est conquis le Royaume de Dieu.

Cet effort n'est pas un effort de mouvement, ni l'effort de révélation d'une philosophie nouvelle, de nouvelles idées, ni l'effort exigé pour des exploits nouveaux et extraordinaires; l'effort nécessaire pour pénétrer dans le royaume de Dieu, ou pour entrer dans une nouvelle forme de vie, est un effort négatif, l'effort de ne pas suivre le courant, l'effort de ne pas accomplir des actes incompatibles avec la conscience intérieure.

Et c'est à la nécessité de faire cet effort que les hommes sont amenés maintenant par la cruauté de la vie et la clarté et la propagation de la doctrine chrétienne.

12

Le moindre mouvement de la matière est important pour la nature. Toute la mer se modifie à cause d'une pierre. De même, dans la vie spirituelle, le moindre mouvement provoque des conséquences sans fin. Tout est grave.

PASCAL.

CHAPITRE XXII
LA PAROLE

La parole exprime la pensée et peut servir à unir ou à désunir les hommes; c'est pourquoi on doit en user avec précaution.

I. —La parole est une grande chose
1

La parole peut unir les hommes; la parole peut les désunir; la parole peut servir l'amour, comme elle peut servir l'inimitié et la haine. Garde-toi de la parole qui divise ou qui provoque l'inimitié et la haine.

2

La parole exprime la pensée; la pensée manifeste la puissance divine; c'est pourquoi la parole doit correspondre à ce qu'elle exprime. Elle peut être indifférente, mais ne peut et ne doit pas exprimer le mal.

3

L'homme est porteur de Dieu. Il peut exprimer la conscience de sa divinité par la parole. Comment dès lors ne pas observer de la prudence en parlant?

4

Le temps passe, et la parole dite reste.

5

Si tu as le temps de réfléchir avant de commencer à parler, réfléchis sur la nécessité de ce que tu veux dire et si cela ne peut faire de tort à personne. Car il arrive le plus souvent qu'après avoir réfléchi, tu ne commences même pas à parler.

6

Réfléchis avant de parler. Mais arrête-toi avant que l'on ne te dise «assez». La faculté de la parole met l'homme au-dessus de la bête, mais il lui est inférieur s'il dit tout ce qui lui passe par la tête.

SAADI.
7

Après une longue conversation, tâche de te rappeler tout ce qui a été dit, et tu seras étonné de voir combien tout ce qui a été dit était vain, inutile et souvent méchant.

8

Ecoute, sois attentif, mais parle peu.

Ne parle jamais si l'on ne s'adresse pas à toi; lorsque l'on t'interroge, réponds de suite et brièvement, et ne sois pas honteux si tu dois avouer que tu ne sais pas ce que l'on te demande.

SOUFI.
9

Si tu veux être sage, apprends à questionner raisonnablement, à écouter attentivement, à répondre tranquillement et à cesser de parler quand tu n'as plus rien à dire.

LAVATER.
10

Ne loue pas, ne blâme pas, ne discute pas.

11

Ecoute les discours d'un homme savant avec attention, quand bien même ses actes ne correspondraient pas à son enseignement. L'homme doit s'instruire, quand bien même les préceptes seraient gravés sur un mur.

SAADI.
12

Il existe trois mots excellents très courts: Je ne sais. Habitue ta langue à les dire plus souvent.

Sagesse orientale.
13

Il y a une ancienne sentence qui dit: de mortius aut bene, aut nihil, c'est-à-dire: «dis du bien des morts ou n'en parle point». Combien cela est injuste! On aurait dû dire, au contraire: «Dis du bien des vivants ou n'en parle point.» Combien de souffrances cela aurait évité aux hommes, et comme cela est facile!

Pourquoi ne doit-on pas dire de mal des morts? Dans notre monde, au contraire, on s'est accoutumé, par suite de l'usage des nécrologies et des jubilés, de ne faire aux morts que des éloges exagérés, par conséquent, dire des mensonges. Et ces éloges mensongers sont nuisibles parce qu'ils cachent la différence entre le bien et le mal.

14

A quoi peut-on comparer la langue dans la bouche de l'homme? C'est la clef du trésor; lorsque la porte est fermée, personne ne peut savoir ce qui y est renfermé: des pierres précieuses ou du rebut inutile.

SAADI.
15

Bien que le silence soit utile d'après la doctrine des sages, la parole libre est également utile, mais utile en son temps seulement. Nous péchons par la parole quand nous nous taisons, alors que nous devrions parler, et quand nous parlons, alors que nous devrions nous taire.

SAADI.
II. —Tais-toi lorsque tu te fâches
1

Si tu sais comment les gens devraient vivre et que tu leur veux du bien, tu le leur diras. Tu tâcheras de le leur exprimer de façon à ce qu'ils croient à tes paroles. Et pour qu'ils le croient et te comprennent, tu dois t'efforcer de leur transmettre tes idées sans irritation et colère, mais avec calme et bonté.

 
2

Si tu veux, dans la conversation, faire part à ton interlocuteur de quelque vérité, l'essentiel est de ne pas te fâcher et de ne pas prononcer une seule parole mauvaise ou blessante.

D'Après ÉPICTÈTE.
3

Une parole non prononcée est d'or.

4

Si tu ne peux pas calmer ta colère immédiatement, tiens ta langue. Tais-toi, et tu te calmeras bientôt.

BAKSTER.
5

Tâche, pendant la discussion, de rendre tes paroles douces et tes arguments fermes. Tâche non pas de vexer ton adversaire, mais de le convaincre.

WILKINS.
6

Dès que nous sentons la colère pendant la discussion, nous ne discutons plus pour la vérité, mais pour nous-mêmes.

CARLYLE.
III. —Ne discute pas

Une querelle qui s'allume est pareille à un torrent qui mine une digue: dès qu'il la traverse, tu ne peux plus le retenir. Et toute querelle est provoquée et alimentée par la parole.

Le Talmud.
2

La discussion ne convainc personne, mais elle désunit et irrite. La discussion est, par rapport à l'opinion des gens, la même chose que le marteau par rapport au clou. Après la discussion, les opinions, encore vagues, se calent solidement dans la tête, de même que les clous enfoncés dans le mur jusqu'à la tête.

D'après JUVÉNAL.
3

Pendant la discussion, on oublie la vérité. Celui qui est le plus sage cesse le premier à discuter.

4

Prête l'oreille aux discussions, mais ne t'y mêle point. Dieu te préserve de l'emportement et de l'irritabilité, même dans leur moindre manifestation. La colère est toujours déplacée, mais surtout dans une affaire où l'on a raison, parée qu'elle ne fait que l'obscurcir et la troubler.

GOGOL.
5

La meilleure réponse à un fou est le silence. Chaque mot de réplique te reviendra par ricochet. Répondre à une offense par l'offense revient au même que de jeter du bois dans le feu.

IV. —Ne juge point
1

«Ne jugez point, afin que vous ne soyez point jugés; car on vous jugera du même jugement dont vous jugez; et on vous mesurera de la même mesure dont vous mesurez. Et pourquoi regardes-tu la paille dans l'œil de ton frère, tandis que tu ne vois pas la poutre dans ton œil? Ou bien, comment dis-tu à ton frère: Permets que j'ôte cette paille de ton œil, et voici qu'une poutre est dans le tien? Hypocrite. Ote premièrement de ton œil la poutre, et alors tu penseras à ôter la paille de l'œil de ton frère.»

MATTH. VII, 1-6.
2

En pénétrant en notre for intérieur, nous découvrons presque toujours le péché que nous blâmons chez un autre. Et si nous ne connaissons pas le même péché, nous n'avons qu'à chercher pour en trouver un plus mauvais encore.

3

Lorsque tu te mets à juger un homme, pense à ne pas dire de mal de lui, si tu es sûr qu'il a commis ce mal, et, à plus forte raison, lorsque tu n'en sais rien et que tu répètes simplement les paroles d'autrui.

4

Il est toujours injuste de juger un autre, parce que personne ne peut jamais savoir ce qui s'est passé et ce qui se passe dans l'âme de celui que l'on juge.

5

Il est bon de s'entendre avec un ami afin que l'un arrête l'autre, si l'un de vous deux commence à médire de son prochain. Et si tu n'as pas un tel ami, entends-toi là-dessus avec toi-même.

6

Il est mauvais de médire des gens en leur présence, parce que cela les offense, et il est malhonnête de le faire en leur absence, parce que cela les trompe. Le mieux est de ne pas chercher le mal chez les autres, de l'oublier, mais de le chercher en soi-même et de s'en rappeler.

7

La médisance spirituelle est comme un plat de charogne à la sauce. La sauce cache toutes les saletés que l'on mange sans s'en apercevoir.

8

Moins on est renseigné sur les mauvaises actions des gens, plus on est sévère envers soi-même.

9

N'écoutez jamais ceux qui disent du mal des autres et du bien de vous-mêmes.

10

Celui qui médit de toi derrière ton dos te craint, et celui qui te loue en ta présence te méprise.

Proverbe chinois.
11

La médisance plaît tellement aux gens qu'il est très difficile de se contenir de ne pas être agréable à ses interlocuteurs en médisant des absents. Mais si tu tiens absolument à régaler les gens, offre-leur autre chose que des mets malsains, tant pour toi-même que pour ceux que tu régales.

12

Cache le péché d'autrui, Dieu t'en pardonnera deux.

V. —Le danger de l'intempérance de langage
1

Nous savons que nous devons manier les fusils chargés avec précaution, et nous ne voulons pas savoir que l'on doit prendre les mêmes précautions avec la parole. La parole peut non seulement tuer, mais causer plus de mal que la mort.

2

Nous nous révoltons devant les crimes de la chair: excès de table, coups de poing, adultère, meurtre; et nous considérons avec beaucoup de légèreté les crimes de la parole: médisance, offense, trahison, publication de paroles mauvaises et dépravantes, et, cependant, les conséquences des crimes commis par la parole sont bien plus graves que les crimes commis par la chair. La seule différence entre les deux catégories est en ce fait que le mal des crimes de la chair s'aperçoit immédiatement, tandis que nous ne remarquons pas le mal du crime commis par la parole, parce qu'il se manifeste loin de nous, dans le temps et dans l'espace.

3

Il y avait une nombreuse réunion, plus de mille personnes, dans un grand théâtre. Au milieu du spectacle, un sot voulut plaisanter et cria: «Au feu!» Le public s'élança vers les portes. Tous se ruèrent, s'écrasant, et lorsque le calme revint, on constata que 20 personnes étaient tuées et 50 blessées.

Ce grand mal n'a été causé que par une sotte parole.

Ici, au théâtre, le mal causé est perceptible immédiatement, mais souvent une sotte parole cause lentement bien plus de mal encore, quoiqu'on ne le remarque pas immédiatement.

4

Rien n'encourage l'oisiveté autant que les vains discours. Si les gens se taisaient, au lieu de dire les bêtises pour chasser l'ennui de l'oisiveté, ils n'auraient pu supporter celle-ci et se mettraient à travailler.

5

En parlant mal des gens, on fait du tort à trois personnes à la fois: à celui dont on parle, à celui à qui on parle, et surtout à celui qui parle.

BASILE LE GRAND.
6

Il est surtout mauvais de médire des gens hors leur présence, parce que l'opinion exprimée qui pourrait être utile à l'absent, si elle lui était dite en face, lui demeure cachée; par contre, elle est communiquée à celui à qui elle est nuisible, parce qu'elle éveille en lui un mauvais sentiment envers celui dont on médit.

7

On se repent rarement d'avoir gardé le silence, mais combien de fois on se repentira d'avoir parlé, et on s'en serait repenti plus souvent encore si l'on connaissait toutes les conséquences de sa parole.

8

Plus on a envie de parler, plus il y a de danger à dire du mal.

9

L'homme qui sait se taire, même s'il a raison, possède une grande force.

CATON
VI. —L'utilité du Silence
1

Laisse davantage reposer ta langue que tes bras.

2

Le silence est souvent la meilleure des réponses.

3

Tourne ta langue sept fois avant de te mettre à parler.

4

Il faut ou bien se taire, ou bien dire des choses qui sont meilleures que le silence.

5

Celui qui parle beaucoup travaille peu. Un homme sage craint toujours que ses paroles ne promettent plus qu'il ne peut donner; c'est pourquoi il se tait le plus souvent, et ne parle que lorsque cela lui est nécessaire, à lui, non aux autres.

6

J'ai vécu toute ma vie parmi les sages, et je n'ai rien trouvé de mieux pour l'homme que le silence.

Le Talmud.
7

Si, sur cent fois, tu regrettes une fois de n'avoir pas dit ce qu'il fallait, tu regretteras sûrement 99 fois sur cent d'avoir parlé lorsqu'il fallait te taire.

8

Seul le fait d'avoir exprimé une bonne intention affaiblit déjà le désir de la réaliser. Mais comment retenir l'expression des élans nobles et pleins de fatuité de la jeunesse? Ce n'est que bien plus tard qu'on les regrette comme on regrette d'avoir cueilli une fleur encore en bouton et que l'on voit ensuite fanée et foulée au pied.

9

La parole est la clef du cœur. Si la conversation est vaine, un seul mot est déjà superflu.

10

Lorsque tu es seul, pense à tes péchés; lorsque tu es en société, oublie ceux des autres.

Sentence chinoise.
11

Pour un sot, le mieux est de se taire. Mais s'il le savait, il ne serait plus un sot.

12

Quand tu parles, tes paroles doivent être meilleures que le silence.

Proverbe arabe.

Celui qui est loquace ne peut éviter le péché.

Si la parole coûte un denier, le silence en vaut deux.

Si le silence sied aux sages, il convient d'autant plus aux sots.

Le Talmud.
VII. —L'Utilité de la tempérance du langage
1

Moins tu parleras, plus tu travailleras.

2

Deshabitue-toi de médire, et tu éprouveras, dans ton âme, un accroissement de la capacité d'aimer, tu ressentiras une augmentation de vie et de bonheur.

3

Mahomet et Ali rencontrèrent un jour un homme qui, considérant Ali comme son offenseur, se mit à l'injurier. Assez longtemps, Ali supporta cela patiemment et en silence; finalement, ne se contenant plus, il se mit à répondre par des injures aux injures. Alors, Mahomet s'écarta d'eux. Lorsqu'Ali revient à Mahomet, il lui dit d'un ton vexé: «Pourquoi m'as-tu laissé seul à supporter les injures de cet homme insolent?» – «Lorsque cet homme t'injuriait et que tu te taisais, dit Mahomet, je voyais dix anges autour de toi et qui lui répondaient. Mais quand tu t'es mis à lui répondre par des injures, les anges t'abandonnèrent, et je me suis écarté également».

Légende musulmane.
4

Cacher les défauts des autres gens et parler de ce qu'ils ont de bon est une preuve d'amour et le meilleur moyen pour attirer l'affection des prochains.

Des Pieuses Pensées.
5

Le bonheur de la vie des hommes est dans l'amour entre eux; or, une mauvaise parole détruit l'amour.